𝐋𝐄 𝐌𝐎𝐍𝐃𝐄 𝐄𝐓 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐄𝐍𝐂𝐎𝐑𝐄 [𝑒𝑛 𝑟𝑒́𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒]

Chapitre 80.

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L'Équinoxe fend l'océan en deux, s'élançant droit vers cette mystérieuse structure. La tension est palpable sur le pont. Nox tient le gouvernail et nous dirige d'une main de maître vers une mort certaine. À la poupe, proche de la figure de proue qui représente la déesse Aëloria, je suis tentée de prier pour qu'elle nous protège, moi et mon équipage.

Nous sommes plus qu'à une centaine de mètres de l'Antre. Les blocs de pierre se dressent comme des gardiens ancestraux. Leur surface lisse et polie varie entre des teintes de gris et de beige, créant un motif naturellement marbré. Ces roches sont d'une taille titanesque, prévenantes quand au passage que nous sommes sur le point de traverser.

Tous les canons sont rentrés de sorte à ce que rien ne dépasse du navire. L'Équinoxe file entre les deux immenses strictes avec douceur. Mes battements de cœur s'accélèrent. Je n'arrive pas à croire que nous allons vraiment dans là-bas. J'attrape le collier que je porte en permanence autour du cou et l'embrasse en regardant le ciel.

– Maman si tu m'entends, par pitié, donne moi ta force.

Il n'y a plus de retour en arrière. Dès que nous sommes à l'intérieur, une sensation d'angoisse m'envahit. Je ne suis pas spécialement claustrophobe mais je dois avouer que je me sens à l'étroit. J'étouffe.

Le pont est silencieux. Tout le monde est à l'affût du moindre bruit suspect. Notre trajectoire n'est pas tout à fait longiligne. Chaque écart est finement calculé par Nox. Les minutes défilent mais la tension ne décroît pas. Le gris de la pierre est marqué à certains endroits, nous indiquant que nous ne sommes pas les seuls à avoir tenté l'expérience.

– J'espère que je vivrai assez longtemps pour voir une sirène de mes propres yeux, chuchote Claes qui vient s'appuyer aux bastingages à mes côtés.

– Je passerai volontiers de leurs visites, vois-tu.

– Impossible. Voir une sirène, c'est le rêve de tout pirate.

– Je ne suis pas une pirate.

C'est effectivement le rêve de n'importe quel pirate. Les sirènes sont des êtres de légende et je n'ai jamais croisé la route d'un marin qui a prétendu en apercevoir. Des créatures enchanteresses mais aussi cruelles. Je me demande si mon père a déjà eu l'occasion d'en voir une. Je chasse cette pensée dans le fond de mon cerveau.

– Comment va Jack ? demandé-je pour me changer les idées.

– Pas fort. Il ne mange plus et c'est à peine s'il s'hydrate. Il prend tous les tours de garde de nuit sous prétexte qu'il n'arrive pas à dormir. Je ne l'ai jamais vu comme ça. Lui qui est toujours souriant et blagueur, je ne le reconnais plus.