Chapitre 66.

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Un petit rictus mélodieux s'échappe de ses lèvres. Cet homme déborde de confiance en lui. Il respire le pouvoir. Il possède tout ce que je convoite. Il est tout ce que j'aimerai être.

Du coin de l'œil, j'observe que sa main se décolle du manche de son sabre. Elle se rapproche de moi délicatement comme s'il s'apprêtait à toucher un animal blessé sur le point de déguerpir.

Je m'efforce de rester sereine et immobile. Réagir d'une manière agressive ne ferait que le combler de joie. il semble apprécier me voir sortir de mes gonds. Je me laisse faire et ne bouge pas, dans l'attente que sa peau rencontre la mienne. Ce n'est pas dans mes habitudes de me laisser faire. Sa main proche de mon visage, Nox semble étonné par ma non-réaction. Ses paupières papillonnent plusieurs fois et il reprend enfin ses esprits. Je m'attends à rencontrer la chaleur de sa paume mais il se rétracte. Ses doigts calleux attrapent une mèche de ma chevelure et dans un geste tendre, il la replace derrière mon oreille.

– J'ai besoin de toi. Tu le sais très bien.

Quand ses doigts glissent dans ma chevelure, j'ai l'impression de défaillir. Son geste me replonge dans les souterrains obscurs. Il y a plus de deux semaines, nous avons partagé un moment similaire, hors du temps. Sauf qu'aujourd'hui, nous sommes sur mon navire et éclairés par la lumière émise par les bougies. Je ne suis plus obligée de me contenter de faire des suppositions quant à son expression, de l'imaginer à ma mercie. Il se trouve devant moi et semble fasciné par ma présence. Il ne s'attendait sûrement pas à ce que je me laisse faire et je ne pensais pas être capable d'apprécier son toucher.

Je dissimule mon apaisement en serrant les dents. Je renie toutes les émotions qui éclosent dans le creux de mon estomac tel les fleurs qui s'épanouissent au printemps. Nox finit par se pencher vers mon oreille. Quand il franchit les centimètres qui nous séparent, le temps se suspend. Sa respiration chaude me chatouille le cou.

– Après, je te tuerai.

Lorsqu'il prononce ces mots, une partie de moi me souffle qu'il n'en fera jamais rien.


* * *


J'essuie les quelques gouttes de sueur qui perlent sur mon front. La chaleur de l'après-midi est étouffante. Il y a plus d'une heure, je suis venue de mon plein gré à bord de L'Équinoxe dans le but de trouver un nouveau cap.

La carte des 1001 contrées est posée sur une large table en bois massif. Les coudes appuyées sur le papier ancien, je recherche le moindre indice qui pourrait nous mettre sur la bonne voie. Nox tourne autour de la carte tel un prédateur prêt à bondir sur sa proie. Il est tourmenté et frustré. Le pirate ignore qu'il est pris dans un cercle vicieux. Il aura beau sillonner les océans, il ne trouvera rien car je suis en possession de l'objet qui nous apportera des réponses. Le médaillon est censé nous guider vers notre prochaine destination. Au risque de me faire égorger pour lui avoir caché quelque chose d'aussi grave, je demeure muette.

Durant de longues minutes, j'étudie la carte sous tous ses angles. J'examine les potentielles similitudes entre les symboles sur le médaillon et la carte. Accablée par la déception de n'avoir rien trouvé, je m'écarte de la table. Appuyée contre le bastingage, je dévisage Nox qui est sur le point de devenir fou s'il ne se calme pas. Comme si j'avais pensé trop fort, sa tête dans ma direction avec un regard chargé de haine.

– Ça n'a pas l'air de t'embêter le fait que ta précieuse quête soit au point mort, ça en devient presque inquiétant. Tu n'es pas malade ?

– Je suis en pleine forme Whitley mais merci de t'inquiéter.

Ma réponse n'a pas l'air de le satisfaire. Il fait claquer sa langue contre son palais. Peut-être qu'il commence à se doute de quelque chose. Je reprends en bafouillant.

– Je n'ai pas la réponse à nos soucis si c'est ce que tu veux savoir. Cette situation me plombe le moral autant que toi.

– Et c'est bien ça le problème, dit-il nonchalamment en tournant de nouveau ses yeux vers la carte.

– C'est-à-dire ?

– Je commence à te connaître Galia. Ton cerveau est toujours en train de travailler. Tu penses à tout, tout le temps. Et tu essaies de me faire croire que dans cette situation précisément, tu as enfin pu trouver un peu de répit.

Sa marche est affirmée mais je ne me laisse pas impressionner. Je n'arrive à lire aucune émotion si ce n'est de la détermination. Une fois suffisamment proche de moi, il déclare :

– Si tu n'avais aucune théorie comme tu essaies de me le faire croire, tu n'agirais pas de cette manière. Tu serais sur les nerfs et tu aurais tenté de me tuer une bonne dizaine de fois. Je pense que tu me caches quelque chose.

Ces yeux bleus et accusateurs sont braqués sur moi. Quelle satisfaction de savoir que j'ai un tour d'avance sur lui. Je me délecte de sa frustration. Lui qui a toujours eu tout ce qu'il voulait : le pouvoir, la richesse, les femmes. Je détiens enfin quelque chose qu'il n'a pas. Sans savoir pourquoi, cette pensée égoïste me comble de joie. J'hausse les épaules et garde mon calme :

– Si j'étais en possession de quelconque information cruciale, je n'aurai aucun intérêt à te le cacher. C'est toi qui détiens la carte.

– Qu'est-ce qui t'empêcherait de me la prendre ?

Je me pince les lèvres. Il y a bien longtemps que j'ai cessé de spéculer dans son dos. J'ai fini par croire à mes propres mensonges, que nous étions une véritable équipe. Que notre marché avait de la valeur. Que je ne pouvais plus le trahir.

Pourtant, Nox vient de me soumettre une idée plus qu'envisageable. Cette pensée ne m'avait même pas effleuré l'esprit depuis notre pacte. Avec en poche le médaillon et la carte, j'aurai une longueur d'avance considérable sur tout le monde. Pour ne pas éveiller les soupçons, je répond du tac au tac :

– Parce que je me mettrai à dos le roi des pirates ?

Je ne suis pas assez convaincante. Ses muscles ne se détendent pas. Son pouce atteint la chevalière de son index et la tourne de manière frénétique. Ses pupilles suspicieuses se décrochent enfin des miennes et fixent l'horizon. Il ne s'éloigne pas pour autant.

Aucun de nous deux n'a la force de s'engager dans un débat sans fin. J'estime son corps beaucoup trop proche du mien. Son cou est dégagé et sa chemise ample laisse découvrir ses clavicules saillantes. À travers le tissu, je devine une magnifique musculature. Mon regard dévie ensuite vers ses avant-bras veineux. Sa peau est abîmée et marquée de nombreuses cicatrices. Ma curiosité me pousse à suivre les lignes de son corps. Je m'arrête sur ses grandes mains, son pouce joue toujours avec la chevalière de son index. Ses mains elles aussi semblent abîmées. Elles paraissent rugueuses, témoins de tout son travail acharné. Je résiste à l'envie de les toucher et de les observer de plus près. Nox est l'interdit à ne pas franchir. L'homme auquel je ne dois pas m'attacher.

Il est la tentation incarné qui me détournera de mon but. Pour accomplir ma destinée, je dois lui résister. Je relève la tête et la stupéfaction sur son visage ne m'indique rien de bon. Il fixe un point précis dans mon dos, la bouche entrouverte. Sa voix rauque me tire de mes pensées.

– Au nom d'Aëloria.

𝐋𝐄 𝐌𝐎𝐍𝐃𝐄 𝐄𝐓 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐄𝐍𝐂𝐎𝐑𝐄 [𝑒𝑛 𝑟𝑒́𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant