Rien Que l'Éternité

Ch 50 : Pour Elle

« Pourquoi Mei Fang, donne-moi une raison ! Dis-moi pourquoi avoir fait tout ça ? »

Mei Fang jeta un coup d'œil dépité à son cadet.

« Pour l'intérêt général et pour l'honneur de ma famille, naturellement.
— Pour la famille ? Tu veux dire... Pour les Yu ?
— Tss, petit frère ! Je t'en supplie, cesse d'être aussi niais ! Pourquoi fais-tu comme si tu ne connaissais pas le genre de pourriture qu'ils étaient ? Ils t'ont exilé loin des tiens, de ta maison, et tu crois que c'est pour les Yu que j'ai fait ça ? Jamais ! ...Ils ont fait à moi, bien pire qu'à toi. Sheng'er... Nous venons tous deux de mères et de familles ordinaires. J'ai une affection particulière pour toi, car tu étais haï comme moi. Même si nous n'avions pas la même mère, tu es la dernière famille qui me reste.
— Je ne comprends pas...
— Je l'ai fait pour de nombreuses raisons. Parce que c'était mon devoir filial. Je me devais de venger ma mère des affronts de cette secte arrogante. J'ai anéanti le clan Yu et j'y ai fait un autel à son nom en leur greffant son nom ! C'est pour elle et elle seule que j'ai fait en sorte que le nom du clan Yu soit remplacé par Yumei. J'ai prouvé à tous les Yu, et aux générations avant eux et après eux, que je surpasserai ce clan déchu d'exorcistes. J'ai démontré ma valeur en accomplissant des prouesses qui les surpassent ! J'ai donné à l'homme le pouvoir sur les esprits, et je marcherai et je soumettrai les Enfers ! Voilà mon but ! Voilà pourquoi le Coeur de Soleil est venu à moi ! Il m'a choisi pour ça ! »

Le Coeur de Soleil une nouvelle fois pointé sur Qian Jingliu, Mei Fang marcha vers Yu Shengcai. Il sortit son épée de l'autre main qu'il pointa sur son cadet.

« Sheng'er je te le demande de nouveau. Pointes-tu cette épée sur moi ou contre moi ? »

Confus, Yu Shengcai baissa des yeux hagards sur son épée et la rangea. Mei Fang se plaça derrière lui et entoura un bras autour de l'épaule de son frère, le serrant fort contre lui, tandis que le Coeur de Soleil n'avait pas quitté sa cible un seul instant.

Yuan Lie avait envie de le faire brûler vif et n'envisageait que la mort comme issue pour Mei Fang. Pourtant, tant que cette couronne de diamants était braquée sur l'homme qu'il aimait, il ne ferait pas un pas de plus. Rien ne l'empêcherait de le réduire en cendres sur-le-champ et de s'emparer du Cœur de Soleil, mais Yuan Lie dut reconnaître que Mei Fang était rusé comme un renard. S'il le faisait brûler maintenant, il blesserait aussi Yu Shengcai avec lui. Mei Fang sourit d'un air narquois, comme s'il lisait ses pensées. Les yeux remplis de défi, son regard n'exprimait nulle peur.

« Yuan Lie, je me demande depuis longtemps, comment êtes-vous revenu dans le Monde Mortel ? Je soupçonne que quelqu'un vous a invoqué... Par déduction, peut-être à l'aide de la Pierre d'Opaque, ou par un sacrifice d'enfants, mais ça auraient fait beaucoup de bébés et beaucoup de pleurs. On en aurait entendu parler si des milliers de bébés venaient à disparaître pour quelque sort démoniaque. Dites-moi, qui vous a ramené ici ?
— Je ne le sais pas. Mon invocateur m'a seulement confié une mission et n'a pas jugé utile de me révéler son identité.
— Qui croirait cela ?
— Libre à vous de me croire ou non. Je ne sais pas qui m'a invoqué. C'est peut-être une ou plusieurs personnes, une femme, un vieux grand-père, qui sait ? Seule ma mission importe.
— Cette mission donc... ? Prouver que je suis le meurtrier d'une banale jeune fille ? Tous mes secrets dévoilés à cause d'une simple inconnue ? »

Le visage de Yu Shengcai exprima un changement d'expression, ses traits se lissèrent, ses yeux s'égarèrent lentement sur le côté, comme s'ils se perdaient dans un souvenir lointain. Ses lèvres fines se détendirent, s'allongèrent et s'étirèrent comme l'arc d'une lune croissante. Il mit une main sur le bras posé sur son torse et murmura d'une petite voix.

« Une simple inconnue peut représenter l'univers entier aux yeux d'une seule personne... Une banale jeune fille peut remplir tout le néant et le vide dans la vie d'un jeune garçon. Mon frère, on n'oublie jamais vraiment son premier amour. On ne pardonne jamais à celui qui nous l'a arraché.
— Qu'est-ce que tu marmonnes ? Tu vas me dire que c'est toi ? Que tu connaissais cette femme et que c'est toi qui as invoqué ce monstre ? Je ne te crois pas !
— Non mon frère, je ne connaissais pas cette femme.
— Reste tranquille dans ce cas. On va réussir à se sortir d'ici petit frère, je te le promets.
— Moi aussi, je connaissais une banale jeune fille. Je l'aimais... À moi aussi, on me l'a arraché, dit Yu Shengcai en souriant timidement. Tu te rappelles de Xiuxiu ? Elle aussi n'était qu'une banale jeune fille... Mais elle était tout mon monde. »