Point de vue : Adrian
Une douleur dans mon pouce me fait tressauter. Mes yeux se baissent sur l'ongle ensanglanté que je mords depuis... depuis combien de temps ? Au moins une demi-heure. Lio' a voulu me dire de me calmer mais je l'ai à peine regardé qu'il a fermé sa bouche.
Quand on est rentré des courses, j'ai trouvé ça louche de ne pas voir ni entendre Alana et John. Connaissant l'instabilité mentale de ma belle brune, j'ai eu un pressentiment. On a fouillé le chalet avant de descendre au sous-sol avec Lio'. En haut des escaliers, on entendait déjà ses hurlements de détresse, de douleur. John était assis en face d'elle, la secouant par les épaules et lui hurlant de respirer. On aurait dit qu'elle était dans un autre monde. Elle ne nous entendait pas, ne nous voyait pas. Elle était comme paralysée par sa propre angoisse.
Mon regard se pose sur la main d'Emilio. Mon frère a soulevé John, pensant que c'était de sa faute, et lui a envoyé son poing de toutes ses forces dans la figure. Après Alana, c'est John qui est tombé dans les pommes sous la puissance du coup. Sauf que lui s'est réveillé quelques minutes après, la joue boursouflée et une légère coupure à la pommette due à la chevalière de mon ami. J'allais prendre la relève mais il s'est empressé de nous expliquer la situation. Alana a commencé sa crise lorsque John lui a présenté ses excuses et ses explications.
Ils m'ont forcé à la laisser tranquille dans la chambre principale. J'ai encore failli me battre, cette fois-ci avec les deux. Emilio a su me raisonner : Alana n'a pas besoin de ça actuellement. Même si j'en veux à John, je sais que c'est mal placé.
Il s'est retrouvé là sans le vouloir, à cause de sa dévotion pour son métier. Le visage de ma Alana me vient à l'esprit. Ils ont la même histoire avec des chapitres différents. Alana s'en est rendu compte et ça l'a rendue malade. Elle ne peut pas lui en vouloir à cent pour cent. Au fond, il s'est fait piéger comme elle et n'a rien pu faire d'autre que d'obéir.
J'observe discrètement John. Il est au bout de sa vie. Je ne l'ai jamais vu aussi désemparé. Je crains pour sa vie à vrai dire. Il a les yeux de quelqu'un qui serait prêt à en finir par honte, par résignation, par culpabilité. Je connais ce sentiment. Il a les yeux vides et à la fois si tristes. En pleine détresse. Comme elle. La différence c'est Cléa, elle fait tenir Alana pour aller jusqu'au bout. John, bien qu'il ait sa femme, il sait qu'il ne pourra plus la regarder en face sans voir la douleur qu'il a créé dans la vie d'une autre femme.
En regardant John, complètement abattu, Emilio, exténué malgré sa volonté de cacher ses émotions, Alana, instable et actuellement dans les pommes, et moi-même, perdu dans tout ce cauchemar, je me demande comment ça pourrait être pire. Sincèrement, je ne pensais pas que l'on pourrait tomber aussi bas, émotionnellement parlant. Sans compter la santé physique qui se retrouve obligatoirement impactée par la santé mentale, clairement exécrable.
La vraie question que j'évite c'est : comment vais-je me sortir de là ? Nous sortir de là ?
Je sais que nous pourrons retrouver Cléa, le but de mon géniteur n'est ni de la tuer, ni de la rendre inaccessible. Il s'en sert comme pion, comme appât pour nous avoir plus rapidement. Et je sais aussi qu'au fond, il ne veut aucun mal - aussi ironique que ça paraît - à Alana. Elle n'est qu'un "dommage collatéral" pour m'abattre. Pour ne plus que je sois dans son chemin vers la politique et le pouvoir.
Je n'ai jamais aimé les politiciens.
La justice a beau être présente, elle n'est pas infaillible. Je pense que les politiciens qui prouvent ce constat sont légion. Au grand malheur de l'humanité.
Donc je sais qu'elles vont s'en sortir. En revanche, John, Emilio et moi, je n'en suis pas certain. Tout ce que je veux c'est qu'il ne fasse plus de mal à personne. John a toujours été son avocat, il nous a défendu coûte que coûte. William a pourtant menacé sa femme alors qu'il le connaît depuis je ne sais combien d'années. Emilio, mon géniteur n'en a rien à secouer, il ne le connaît pas et c'est un latino, comment vous dire que mon père a peu d'estime pour les gens qui ne sont pas, vous savez, blancs. D'autant plus qu'il est mon ami depuis que j'ai fini dans une prison mexicaine alors William va d'autant plus l'apprécier.
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LAWYER
RomanceAlana est une avocate, jeune mère célibataire d'une petite fille de trois ans. Adrian est un ancien PDG d'une grande entreprise de marketing, issu d'une famille riche et très connue, accusé de braquage à main armée dans une banque de Chicago. Il e...