Chapitre 39

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— Sahar, comment ça se passe ici ? demanda-t-il doucement, en s'approchant d'elle.

Elle leva brièvement les yeux vers lui, et, comme à chaque fois qu'il l'interrogeait, esquissa un sourire poli, un sourire qui n'atteignait jamais ses yeux.

— Tout va bien, répondit-elle, sans vraiment entrer dans les détails.

Ali soupira discrètement, s'approchant du patient allongé sur le lit. Il échangea quelques mots avec lui, écoutant ses plaintes et ajustant ses recommandations, mais son esprit était ailleurs. Tandis qu'il travaillait, il ne pouvait s'empêcher de jeter de fréquents regards vers Sahar, cherchant un signe, un geste, une ouverture. Il avait espéré que ses attentions délicates et son soutien constant finiraient par toucher quelque chose en elle, mais il ne récoltait que cette même distance polie.

— Tu as l'air fatiguée, Sahar, reprit-il, cette fois d'une voix plus basse, presque intime.

Elle hocha la tête sans répondre immédiatement, ajustant les draps du patient sans se tourner vers lui. Le silence qui suivit pesait lourd entre eux, et Ali s'imprégna de ce silence, comme s'il tentait d'y trouver une réponse. Finalement, Sahar murmura, presque pour elle-même :

— Ce n'est rien. Juste la routine.

La routine ? Il savait qu'il s'agissait de bien plus que cela. La tristesse de Sahar ne provenait pas seulement de l'épuisement quotidien d'un travail exigeant. Il la voyait se battre, jour après jour, contre quelque chose de plus profond, une douleur qu'elle n'avait jamais partagée avec lui.

Il aurait voulu la libérer de cette souffrance, la réconforter d'une manière que ses simples paroles ne pouvaient atteindre. Mais comment pouvait-il prétendre à un rôle dans sa vie alors qu'elle ne le laissait jamais s'approcher ?

Il se redressa, son regard restant fixé sur elle.

— Si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis là. Vraiment, tu peux me parler.

Sahar tourna légèrement la tête vers lui, croisant son regard avec une douceur empreinte de tristesse. Elle savait qu'Ali lui portait de l'affection, elle avait senti son regard sur elle à de nombreuses reprises, mais son cœur était ailleurs, inatteignable pour lui. La tendresse d'Ali ne parvenait pas à effacer l'ombre du roi qui hantait encore ses pensées. Le sourire doux et l'attention sincère d'Ali ne pouvaient effacer l'image du souverain qui occupait son cœur, malgré la distance infinie qui les séparait.

— Je le sais, Ali, murmura-t-elle finalement. Je te remercie.

Elle détourna les yeux, retournant à ses tâches, et ce simple geste mit une barrière invisible entre eux. Ali sentit son cœur se serrer. Il savait, à cet instant, que cette barrière ne serait jamais franchie. Il avait beau être à ses côtés jour après jour, offrir sa présence et son soutien, il n'était pas celui qui pourrait apaiser son âme troublée.

Le silence de la chambre, interrompu uniquement par le bruit régulier des machines, devint de plus en plus pesant. Ali se détourna finalement, prenant la décision de s'éclipser pour laisser Sahar poursuivre sa journée.

Avant de quitter la pièce, il s'arrêta près de la porte, se retournant une dernière fois pour la regarder. Elle était là, concentrée sur son travail, un visage serein masquant une tristesse profonde. Il savait qu'elle ne partageait pas ses sentiments, qu'il ne serait jamais pour elle ce qu'il aurait voulu être. Malgré tout, il ne pouvait se résoudre à abandonner.

— Prends soin de toi, Sahar, murmura-t-il avant de disparaître dans le couloir, sa voix se perdant dans le bourdonnement lointain de l'hôpital.

Le soleil de midi perçait à travers les grandes fenêtres de l'hôpital, inondant les couloirs d'une lumière presque cruelle, éclatante, qui contrastait violemment avec la fatigue que Sahar ressentait au plus profond d'elle-même. Elle venait de finir de border son dernier patient pour la matinée et s'appuya un instant contre le mur, ses yeux fermés, tentant de chasser l'épuisement qui s'abattait sur elle comme une vague.

𝗟𝗔 𝗩𝗜𝗦𝗜𝗧𝗘 𝗗𝗨 𝗣𝗢𝗧𝗜𝗘𝗥Où les histoires vivent. Découvrez maintenant