NightHawk

Chapitre 49

21 heures 45. Domaine des Hunter, État-Unis

...Damian...

Vous est-il déjà arrivé de vous sentir si oppressé que vous aviez l'impression que votre cœur allait exploser ?

Autour de moi, le monde semblait suspendu dans un étrange silence. J'entendais les sons, j'observais les mouvements, mais c'était comme si mon corps n'était plus vraiment là, flottant dans un espace où rien ne m'atteignait. Les bruits devenaient lointains, étouffés, comme si la réalité s'effaçait peu à peu. En une seule nuit, j'allais accomplir ma vengeance, honorer ma famille, et peut-être repartir avec celle qui hantait mes pensées, mes rêves, mes insomnies.

Elle m'avait eu. Je n'avais jamais autant réfléchi, jamais autant douté, que depuis qu'elle était entrée dans ma vie. Désormais, je la comprenais, tout comme elle semblait me comprendre. Pendant des heures, j'avais tenté de rationaliser tout ce qui se passait autour de moi, tout ce que je ressentais. Et même si je ne lui avouerais peut-être jamais... je l'imitais. Je suivais ses traces, sans même m'en rendre compte.

J'avais voulu la comprendre, cette nuit-là. Comprendre cette liste qui nous avait liés, malgré elle. Comment une personne, capable de rédiger des étapes si méthodiques pour disparaître, pouvait-elle être aussi douce, aussi apaisante en apparence ? Cette dualité m'avait toujours fasciné. Son calme, sa manière de glisser à travers le monde comme une ombre. Et pourtant, cette même personne, sans le savoir, avait inspiré en moi quelque chose de nouveau, de dangereux.

Au lieu de me perdre dans mes habituels gribouillages, mes symboles obsessionnels, j'avais pris un stylo. Pour la première fois depuis longtemps, j'avais écrit. Pas n'importe quoi.

J'avais écrit ma propre liste.

Une liste pour cette nuit, pour mes propres pas, pour mon avenir. Mais cette fois, je ne pensais plus seulement à la mort. Je pensais à ce qui venait après. À l'avenir. À un avenir avec elle. Disparaître en une nuit, mais à ses côtés.

Chaque mot que j'avais inscrit sur ce foutu morceau de papier pesait sur mon esprit. Chaque phrase semblait scellée dans le destin que j'avais commencé à tracer. L'idée de tout détruire en une seule nuit m'obsédait, m'attirait. Il y avait quelque chose de terriblement séduisant dans ce chaos planifié. Mais en même temps, cette idée me paralysait. Comme si écrire ces mots les avait rendus réels. Et si cela arrivait vraiment ? Si cette nuit devenait la dernière, pour moi, pour nous ?

Je n'arrêtais pas de relire ces phrases, ces quelques mots qui avaient suffi à faire basculer mes pensées. Chaque détail soigneusement choisi, chaque intention cachée. C'était comme si, en écrivant, j'avais mis en place un piège pour moi-même. Et maintenant, je ne pouvais plus reculer.

Je te comprends mieux maintenant, mon ange...

Dans chaque mot que j'ai écrit, je sens ton influence, ton ombre.

- On est arrivés, Damian, fit une voix familière qui perça le brouillard de mes pensées.

C'était comme si je venais d'être arraché à un rêve, violemment projeté dans une réalité que j'essayais d'éviter. Harper était là, devant moi, ses yeux fixés sur les miens, tandis que la voiture venait de s'immobiliser devant l'imposante demeure des Hunter. Le manoir, illuminé dans la nuit, se dressait fièrement devant nous, comme un rappel que dès que je franchirais cette porte, rien ne serait plus comme avant.

Dès que mon pied toucherait le sol, cette soirée marquerait la suite de ma vie, la suite de notre vie.

- Damian, ça va ? demanda Harper, son visage troublé par une inquiétude que je ne voulais pas affronter. Elle passa une main devant mes yeux pour capter mon attention. Qu'est-ce qu'il se passe ?