Chapitre 61 : Nathan

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Installé dans le vaste jardin, je balance la balle à Mozart, la regardant rebondir sur le gazon humide. Mozart file derrière, les oreilles tendues, puis revient aussitôt avec la balle entre les crocs, tout fier de sa trouvaille. D'habitude, ces petites pauses avec lui me vident la tête, mais aujourd'hui, mes pensées s'égarent encore et encore vers Riley. Je déteste passer la journée loin d'elle, même si je sais qu'on ne peut pas passer chaque minute ensemble. Je lui ai envoyé quelques messages dans l'après-midi pour vérifier que ma mère n'était pas trop bizarre avec elle, qu'elle ne lui mettait pas trop la pression. D'après ses réponses, tout semblait bien se passer, alors j'ai décidé de ne pas trop insister pour éviter de passer pour le type incapable de lâcher sa copine plus d'une heure. Mais la vérité, c'est que je n'arrive pas à m'empêcher de penser à elle. Merde, je suis vraiment accro à cette fille.

Les heures semblent fades sans elle, je me surprends même à compter les minutes jusqu'à ce qu'elle revienne. C'est dingue. Et ça me plaît autant que ça m'effraie.

Perdu dans mes pensées, je ne remarque pas tout de suite mon père qui s'approche, deux bières à la main. Il en pose une à côté de moi et s'installe en silence, jetant un coup d'œil à l'étendue du jardin. On reste comme ça un moment, sans échanger un mot, jusqu'à ce qu'il brise finalement le silence d'une voix posée :

— Tu ne nous as toujours pas dit où tu l'as rencontrée, cette fille.

Je prends une grande inspiration, un peu sur mes gardes. Avec ma mère, je sais que répondre à cette question aurait été quasiment impossible, mais mon père... Il est plus détendu, plus réaliste. Finalement, je décide de lui dire la vérité.

— Dans un club de strip, lâché-je, direct.

Il semble un peu surpris, mais il ne dit rien. Il prend une gorgée de sa bière, le regard pensif. Puis, après un instant, il finit par ajouter :

— J'espère juste que tu ne t'es pas foutu dans des emmerdes.

Je ne dis rien, laissant le silence s'installer un moment. Il semble interpréter mon silence comme une réponse, et un soupir échappe à ses lèvres.

— Qu'est-ce que tu as fait, Nathan ? demande-t-il, le ton un peu plus sérieux.

— Je gère, répondis-je en prenant ma bière pour boire une gorgée.

Un nouveau silence. Mon père hoche la tête et décide de ne pas insister. Il me connaît assez pour savoir que je suis têtu et que je ne lâcherai pas davantage d'infos. Finalement, il change de sujet, posant la question habituelle que j'entends rarement de sa bouche :

— Et les cours, ça va ?

Je grimace, légèrement agacé par son intérêt soudain.

— Maintenant, ça t'intéresse ? dis-je, la voix un peu trop amère.

Il marque une pause, les sourcils froncés, puis il répond avec un soupir.

— Nathan, je m'en suis toujours soucié. Tu restes mon fils, tu le sais bien.

Je secoue la tête, sentant la colère monter. Depuis combien de temps je ressens cette distance entre nous, cette déception à peine masquée dans son regard ?

— Ah oui ? Parce que ça ne m'a pas vraiment paru évident, surtout l'année dernière, quand je t'ai dit que j'allais me spécialiser en science pour devenir vétérinaire et que tu m'as ignoré pendant une semaine entière.

Il grimace, visiblement un peu mal à l'aise. Il avale une nouvelle gorgée de bière et prend une longue inspiration avant de répondre :

— Je... J'avoue que ma réaction n'a pas été la meilleure. Je ne m'y attendais pas, voilà tout. Dans ma tête, tu allais suivre ma voie, comme tous les Caldwell avant toi. Le business, le commerce...

The Midnight GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant