Chapitre 2 : Nathan

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Le son strident de la lame de mes patins qui mord la glace résonne à travers la patinoire. Le froid est saisissant, mais je m'y suis habitué depuis longtemps. La sensation est familière, presque apaisante. Quand je suis sur la glace, tout le reste disparaît. Le bruit de la ville, les problèmes familiaux, les erreurs que j'ai commises... Tout s'efface. Il n'y a que le mouvement fluide du patinage, l'adrénaline, et la recherche constante de l'équilibre parfait entre vitesse et contrôle.

Aujourd'hui, l'entraînement est intense, comme toujours. Coach Henderson ne nous laisse jamais nous reposer sur nos lauriers. Il veut que chaque séance soit un défi. Des tours de patinoire pour échauffer les jambes, des sprints pour augmenter notre vitesse de réaction, et maintenant, c'est l'heure des drills de maniement de palet.

Je m'avance rapidement, alternant entre les cônes placés en zigzag sur la glace, contrôlant le palet avec la lame de mon bâton, le gardant aussi près que possible de moi, le laissant filer à peine quelques centimètres avant de le ramener. C'est un travail de précision, de coordination. Mon esprit s'efface encore plus profondément, ne se concentrant que sur l'instant. Juste moi et la glace.

Une fois le maniement terminé, c'est l'heure des exercices de tirs au but. Je me place en ligne avec mes coéquipiers. On s'élance tour à tour en direction du gardien, Mack, qui se prépare à chaque coup. Je récupère le palet, le contrôle, puis le frappe violemment. Le bruit sourd du caoutchouc frappant le filet résonne alors que le disque file juste à côté du casque de Mack, le laissant immobile. Je souris intérieurement. Une belle feinte.

Le coach siffle et nous ordonne de nous regrouper pour un exercice de situation en infériorité numérique. Un de mes préférés. L'équipe se divise en deux groupes : les attaquants et les défenseurs. Nous devons maintenir le contrôle du palet malgré l'infériorité et tenter de marquer sous pression. C'est un travail de stratégie, de timing.

Je patine en arrière, prêt à défendre, mes yeux suivant le palet de près. Je pivote rapidement, bloquant un des attaquants, puis l'empêche de progresser en lui coupant la trajectoire. Mon corps réagit instinctivement, anticipant ses mouvements, cherchant le bon moment pour intercepter.

Je me souviens encore de la première fois que j'ai vraiment découvert ce sport. J'avais 12 ans, lors d'un voyage au Canada avec mon père. On avait assisté à un match des Canadiens de Montréal contre les Maple Leafs de Toronto, à Montréal. J'étais fasciné. Le rythme, la tension, les chocs des corps contre la balustrade, les cris de la foule... C'était quelque chose d'électrique. À partir de ce moment-là, le hockey est devenu une obsession. Chaque jour après l'école, je m'entraînais, visionnant des vidéos, apprenant à connaître les stratégies et techniques. J'ai même insisté pour m'inscrire à l'équipe junior de la ville dès notre retour.

Et même si, aujourd'hui, je suis considéré comme l'un des meilleurs joueurs de l'équipe universitaire, je sais très bien que le chemin vers une carrière pro est semé d'embûches. La concurrence aux États-Unis est féroce. Seuls 0,15 % des joueurs de hockey universitaire parviennent à passer pro. Et la majorité d'entre eux viennent de milieux où ils s'entraînent dans des clubs privés depuis leur enfance, parfois avant même de savoir marcher. C'est un autre monde.

C'est pour ça que, même si je suis passionné par le hockey, je ne me fais pas d'illusions. Le hockey, c'est mon exutoire. Mais mon futur ? Il est ailleurs. J'ai choisi une autre voie, une voie plus apaisante. Vétérinaire. C'est une vocation qui me parle vraiment, bien plus que l'immobilier ou les affaires comme mon père aurait voulu. Lui, il m'aurait préféré dans le business familial, probablement à diriger une chaîne d'hôtels ou à investir dans des propriétés de luxe. Mais moi, j'ai trouvé un sens dans autre chose.

En plus de mes études, je passe mes après-midis libres au Refuge Paw Haven, un centre de secours pour chiens abandonnés. Là-bas, je retrouve une autre forme de calme. Prendre soin de ces animaux, leur offrir une seconde chance... Ça me fait me sentir utile. Mes parents ne comprennent pas vraiment pourquoi je m'investis là-bas. Pour eux, c'est une perte de temps, quelque chose d'inutile, mais pour moi, c'est devenu une nécessité. Et chaque jour, je m'accroche un peu plus à cette idée.

The Midnight GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant