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Et voilà comment tout à commencé!

Sanders avait raison, j'avais réussi mon audition et gagné le droit de rejouer encore et encore la même horrible scène avec lui devant tout un tas de gens que je ne connaissais pas.

Après cette matinée fatidique tout s'est emballé très vite. On m'a parlé du projet et de mon personnage, un peu.
On m'a surtout parlé contrat, argent, formation accélérée, droit d'images et royalties, on m'a vendu le rêve et la gloire, on a évoqué la fin de l'anonymat et la perte de la liberté individuelle. J'avais fait un petit pas vers le monde de l'illusion et je n'étais pas sûre de vouloir y plonger toute entière.
Walter m'a beaucoup aidé,  fier d'affirmer sa légitimité auprès de ce monde sans pitié très fermé. Il m'a raconté sa vie avec ses hauts et ses bas, ses échecs et ses plus belles réussites. Il m'a tant appris en si peu de temps.

<tu verras, Lyla, que le plus difficile dans tout ce bric à bras, c'est de garder son identité. Ne pas se perdre et surtout savoir se retrouver dans le tourbillon des émotions que nous offrent les personnages. Tu verras comme c'est dur de rester soi même>

Je sais maintenant qu'il parlait de lui, qu'il revivait avec moi ce qu'il avait mis tant de temps à accepter pour lui même. Il avait tellement espéré de cette vie, se voyant déjà en haut de l'affiche et remplissant les salles de spectacle. Il avait cru à tout le scénario qu'on lui avait promis mais rien ne s'était passé comme prévu et après des années d'infortune il avait fini par accepter l'échec, se tournant vers le recrutement pour garder un pied dans ce monde chéri désormais inaccessible. Et cela lui plaisait, il rencontrait énormément de monde et ses analyses pointilleuse des rôles le rendait très fin dans ses recherches. Il était reconnu et respecté. Mais il attendait toujours ce moment où son nom serait à nouveau sur le générique, espérant toujours qu'un jour un réalisateur verrait en lui autre chose qu'un oeil avisé et lui donnerait enfin un rôle, un vrai rôle.
Je l'aimais beaucoup tant il était fort et vulnérable à la fois. Il m'avait guidé sans langue de bois au début de cette aventure de dingue.

J'avais aussi appelé mon père à la rescousse pour étudier toute la paperasse qu'on m'avait donnée. Il n'avait d'abord pas cru à mon histoire jusqu'à ce que Calabano fasse envoyer le contrat à son bureau. Il était alors complètement surexcité, sa fille allait tourner pour un réalisateur reconnu et dans une tête d'avocat New Yorkais cela signifiait qu'il fallait être sur ses gardes et éplucher le moindre astérisque. Mon père s'est toujours occupé de moi, même en habitant à des milliers de kilomètres, n'oubliant jamais mon anniversaire, suivant les résultats scolaires avec attention et me payant l'aller retour Paris - Pittsburg aussi souvent que possible. Mais la distance n'aide pas à créer de vrais liens, le décalage était infime mais bien présent et, étrangement, mes problèmes d'adolescente sous influence ont été le déclencheur pour lui.
Il est venu à Paris, chose qu'il n'a que très peu faite en 20ans, et à décidé avec ma mère de me prendre avec lui, loin de toute cette merde. Aujourd'hui je peux dire que j'adore mon père, il est adorable et même sa femme un tantinet soupe au lait est plutôt cool. Il me laisse vivre ma vie en toute confiance avec un oeil averti sur ma scolarité et mes fréquentations. Alors de me savoir dans les mâchoires aussi féroces du cinéma le rend un peu dingue. Il n'a pas confiance en ce monde de dérangé comme il dit. Il s'est donc auto désigné mon avocat et s'est fait une joie de participer à toutes les rencontres, toutes les réunions auquelles j'étais conviée pour mon plus grand bonheur. Je lui suis tellement reconnaissante et l'avoir à mes côtés me rassure incroyablement.

Mes amis aussi ont été très présents, j'ai cru qu'Alex allait s'étouffer avec son propre souffle quand j'ai parlé de Calabano, il m'a fait répéter plus de dix fois le déroulement de cette audition et Amy m'a prise dans ses bras en me disant comme elle était fière de moi. Elle s'est mise à pleurer en pensant au temps que j'allais sûrement passer loin d'eux mais je leur ai promis que dès que je le pourrai je les ferais venir me rejoindre.

When Stars Are ShiningOù les histoires vivent. Découvrez maintenant