Two

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- Chace ! Viens nous aider s'il te plaît. Réclama sa mère.

- Oui maman. J'arrive. Répondit le jeune homme arpentant curieusement la maison.

Les murs sentaient encore la peinture fraiche alors qu'il s'agissait là d'une demeure inhabitée depuis 1992. Elle ne semblait pas si vieille que cela. Le sol marbré avait clairement besoin d'un lavage et d'un bon rafraichissement, mais suffisamment en bon état pour y faire quelques parties de roller skate.

Avant même que Chace ne s'avance vers la cuisine où un bruit légèrement strident apparut du bout de la pièce, il fut aussitôt rappelé à l'ordre par sa mère. Marie-Faith.

À peine avait-il franchi la première marche que Coddey, le benjamin de la famille arriva avec un gros carton d'où les petites mèches dépassaient drôlement. Il s'avançait en trébuchant presque sur le bitume.

- Tu veux que je t'aide ?

- Non ça va aller. Dit-il sur un ton comme s'il se sentait aussi fort que hercule.

En approchant le coffre ouvert du 4×4, Chace entreprit le carton le plus épais, où un bout de tissu bleu dépassait de la fêlure.

- Qu'en penses-tu mon grand ? Demanda sa mère, comme si elle avait une des plus grandes merveilles sous les yeux.

- Bah...c'est sympa.

- Arrête. Elle n'est pas juste "sympa". Elle est juste magnifique. Reprit-elle sur un ton évident.

- Ouais c'est vrai. Elle est sympa. Taquina-t-il.

- Ton père nous rejoindra au plus vite. Tu sais comme il est ? À toujours vouloir se soucier pour notre sécurité.

- Je sais. Mais il faut le comprendre. Depuis le cambriolage il redoute que ça nous arrive une nouvelle fois. C'est d'ailleurs pour ça aussi qu'on a déménagé non ? Répondit le jeune homme, l'air navré.

            **********

- Oui je vais essayer de joindre les fournisseurs car ils m'ont toujours pas rappelé depuis deux semaines.

- Ils ne veulent peut-être plus avoir à faire à toi ! Plaisanta Robert, le rire crépitant au bout du fil.

- Je dois encore regarder au cas où je tomberai sur un quartier chaud que l'agent immobilier aurait omni de nous dire. Répondit Tom.

- Ça marche. Tu nous appelle une fois que t'es rentré ?

- Pas de problème. Ce sera fait. Répondit-il avant de lâcher son téléphone sur le tableau de bord.

Tom arpenta sereinement la longue avenue où les voisins les plus célèbres seraient Tom Cruise ou Jessica Alba. D'épaisses lignées de Carmelita fleurirent le long des murs jusqu'à la villa qu'il avait repéré. L'une des plus couteuses qui le faisait tant rêver. Il aperçut rapidement la porte encore ornée de lianes noires en acier, rejoignant le point central doré de la poignée.

La hauteur, et la vue d'une pareille merveille qu'il aurait tant aimé continuer de sublimer. La demeure de Rebecca Eldman. L'actrice de les jours infinis.
Elle était aussi majestueuse qu'au temps où il l'avait découverte sur un magazine Forbes que Marie-Faith laissait traîner. Il se souvint d'un prix à neuf chiffres. Un palace encore inhabitée depuis 1993.

La nuit était presque en train de sombrer, une petite drache l'accueillit en toute bienvenue dans sa nouvelle maison. À travers la fenêtre du salon, il aperçut sa fille Claire entrain de bouquiner sagement dans le fauteuil pendant que Coddey semblait s'amuser avec un de ses personnages de Magic and Falls d'où les ombres reflétaient sur le plafond.

Jamais il ne redoutait autant de rentrer dans son nouveau "chez soi". L'agent immobilier n'avait pas menti, le seul quartier sensible qui résidait aux alentours n'atteignait pas moins les dix kilomètres, le centre-ville se situait bel et bien à huit pas de la rue, quant aux interminables doutes de Marie-Faith, jamais il ne s'était mit à les appréhender de nouveau.
Même sa sincérité était encore mise à rudes épreuves. Eh oui Tom, même quand un mariage se déroule à merveille il faut toujours que l'épouse y trouve quelque chose à redire. Lui disait Ralph, un ancien collègue qui fut  témoin à son mariage.

"Allez, c'est parti."

La clef ôtée du compteur, il ouvrit la porte en se laissant baptisé par les petites gouttelettes qui lui tombaient  sur le bras nu. Puis il s'avança de la porte, comme s'il approchait le couloir de la sentence.
Il sentait qu'elle l'attendait, juste derrière. À présent, il ne pouvait plus se permettre de reculer. Même pour y réfléchir encore un peu.

La clef dans la serrure, il ne tarda pas à franchir le seuil d'un pas mi-serein, tel un mari n'ayant absolument rien à se reprocher.

Marie-Faith se retourna, l'air sournoisement surprise.

- Bonsoir chéri. Alors rassuré ?

- Oui ça va. Mais j'ai pas encore tout visité. Répondit-il le cœur serré.

- Après tout ce temps ? Allez, viens j'ai commandé notre première pizza à Los Angeles. L'invita-elle avec un sourire.

Même après treize années de mariage, elle était toujours aussi rayonnante. Toujours aussi coquette. Il adorait la voir dans ce pull en cachemire rose, égayant sa mine et ses yeux bleus.
Mais il est fini le temps où la jeune Marie-Faith arborait des robes saillantes, à la crinière volumineuse, digne d'une superbe copie de Farrah Fawcett.

Place désormais à la mère au foyer, agréable qu'elle était, prenant toujours le soin à ce qu'aucun de ses cheveux cendrés ne dépasse de son chignon bas. Elle a changé. Tout a changé. Se disait-il.

- Tiens. Un nouveau parfum ? Demanda-t-elle, l'air farouchement innocent après avoir déposé soigneusement les lièvres sur les siennes.

Hollywood SuicideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant