𝐒𝐀𝐑𝐐𝐀𝐍 | 1 et 2 |

25. Parle-moi d'amour

𝕐𝕠𝕦𝕤𝕣 𝕊𝕖𝕘𝕙𝕚𝕣

Parle-moi d'amour. Parle-moi de l'acte et non du sentiment.

- Tayc

Mon bras sous celui de Zaïm, nous entrons doucement dans la grande maison style ancien. Les lumières des lustres m'éblouissent lorsque mon pied se pose à l'intérieur. Dans ma poitrine, mon cœur bat à la chamade et j'ai un flux de salive dans la bouche. Comme si j'étais sur le point de vomir. Le stress me monte au cerveau.

Un serveur avec un plateau à la main se poste devant nous, proposant des flûtes de champagne. Le boucan autour de nous est léger, mais je ne serais, en aucun cas, capable de répéter ce que le serveur me dit.

Zaïm se détache de mon bras avant de récupérer deux flûtes. Il m'en tend une que j'attrape, tout en analysant les gens autour de moi. Ils ont sorti leurs plus beaux vêtements, les plus chers bijoux, leurs plus belles coiffures. Ils ont tous un sourire éclatant qui illumine leurs visages. Un gala pour financer la mort d'une policière et ils sont heureux de la sorte.

Je mérite d'être dans le même sac qu'eux. Après tout, j'ai dépensé une blinde pour une robe et des bijoux que je ne mettrais plus jamais.

J'apporte la flûte à mes lèvres, laissant le goût sucré pêche émoustiller mes papilles. Rapidement, les gros yeux de Zaïm me font face et je l'interroge du regard.

─ T'as descendu la flûte d'une flèche.

Je baisse les yeux vers le verre dans ma main et soupire, déjà épuisé de la soirée. Il attrape mon verre et pose les deux sur le plateau d'un serveur faisant le tour de la pièce.

Replaçant mon bras sous le sien, Zaïm ouvre la marche afin de nous dégourdir doucement les jambes.

Maintenant, que je suis ici, entouré de certains de ses collègues ou des miens, il m'est impensable de me dire qu'Anna est... Morte. Assassinée. Ma meilleure amie, à qui je disais le moindre de mes problèmes, ne fait plus partie de ce monde. La seule personne que ma mère a réussi à accepter dans ma famille - sans compter Zaïm.

Des heures au téléphone, envolé. Des mois d'enquête ensemble, envolé. Des rires et des pleurs, envolés. Tous nos souvenirs finiront par s'envoler eux, aussi, ne me laissant plus rien avec le temps. Je devrais être assez forte pour faire un deuil, mais quand vous ne vous y attendez pas, c'est encore plus difficile.

Le métier que j'effectue me demande une bonne adaptation et un travail sur moi-même chaque fois que j'ai affaire à une mort, mais ça devient pesant avec le temps. Je sais que j'ai les épaules pour supporter la charge de tristesse, mais lorsqu'elle ci sera trop grosse pour moi, qu'est-ce qui va m'arriver ?

La psychologue du personnel va sans doute me fixer un autre rendez-vous pour voir si je peux tenir le coup mentalement. Bien-sûr que je tiens le coup mentalement. Il suffit de faire comme d'habitude. De rester en deuil quelques heures avant de se forcer à oublier la personne. Même si celle-ci était votre meilleure amie avec qui vous partagiez tout.

Un claquement de doigts devant les yeux me fait reprendre conscience. Je tourne la tête vers Zaïm qui m'interroge du regard.

Ouais, je peux oublier Anna en la remplaçant par Zaïm. Un pansement en plus sur une blessure qui ne cesse de s'ouvrir.

Celui-ci se poste devant moi en fronçant les sourcils. C'est marrant la façon dont ses yeux vairons me dévorent même lorsque nous sommes à l'extérieur. Même lorsqu'il semble anxieux ou en colère contre moi. Ses cheveux bleu nuit brillent plus fort due aux dizaines de lustres accrochés sur un plafond blanc avec des moulures. La cicatrice qui traverse son œil bleu et descend jusqu'à ses lèvres... Ses lèvres que j'ai embrassées et qui ne demandent qu'à être prise et pleine à nouveau.