𝐒𝐀𝐑𝐐𝐀𝐍 | 1 et 2 |

42. Mens-moi

𒆜ʏօʊֆʀ ֆɛɢɦïʀ 𒆜

Guerrière dans la rue en toute finesse, 

ils m'ont appris dès mon plus jeune âge à faire attention à moi. 

 – Manal

76 heures avant la fin...

─ Quelqu'un sait désamorcer les bombes ? Je demande aux hommes qui sont restés avec moi.

D'un signe de la tête, je leur indique la porte principale de la banque coincée par une bombe qui n'explosera que dans trois jours. Du moins, si quelqu'un ne la pète pas avant. 

Je n'ai pas l'intention de rester coincer ici avec les braqueurs et tous ses traîtres qui n'ont que l'argent dans la tête. Moins de peur et plus d'actes, je leur montrerai que c'est de mon côté dont il faut se ranger et non de celui des voleurs qui manipulent leurs cerveaux. 

Quand ils secouent tous la tête, je grimace à l'idée que je vais devoir faire tout le boulot moi-même. 

Je lève le regard vers les marches où Night me dévisage à travers son masque de corbeau. 

Mon plan est tombé à l'eau sans que je ne m'y rende compte. La vanité d'être promu l'enquêtrice ayant piégé les braqueurs que tout le monde s'arrache, m'a prise de court. Je veux tout et tout de suite, en me mettant dans les pires prises de tête. 

Je le sens derrière son masque, ce rictus au bout des lèvres qui se moque de moi, d'avoir été aussi insouciante. 

J'ai appris à aimer l'homme sans son côté criminel, oubliant à quel point il manipule bien les pensées des gens. Il a joué avec moi comme je pensais jouer avec lui. Il menait cette danse intrépide, me poussant à réaliser des pas aussi incohérent les uns des autres. 

Mon cœur a aimé le classique de cette relation où lui et moi n'étions simplement que des humains s'avouant s'adorer et se promettre l'éternité, chérissant chaque souvenir. 

Hier soir dans ma chambre, je doutais encore de moi et de lui. Je voulais entrer dans sa chambre, envahir son espace personnel et l'aimer juste une dernière nuit. Lui avouer à quel point je me sens indécise quand il s'agit de le piéger. Lui dire depuis combien de temps, j'ai su tout de lui. 

Lui déclarer que mon cœur n'a jamais battu aussi vite que notre seconde rencontre au Congo où je lui ai demandé d'éteindre sa cigarette. Lui avouer avoir aimé notre première course-poursuite à Londres, où il m'a laissé une marque ineffaçable à cette côte cassée pendant des mois. Puis quand ma casquette s'est envolée au retour du Bahreïn et que ses yeux vairons ont accrochés les miens pendant que le vent soufflait son sable afin de nous séparer, je l'ai su. Je mènerai ma vie dans une chute longue et douloureuse au bord du propice. 

B'ba ne saura jamais le vrai danger de cette affaire. Ce n'est pas courir après les braqueurs qui m'effraient, c'est d'avoir couru après ce criminel simplement par amour. 

Comme je l'ai promis à Anna, si j'aime un homme, je le tuerai. J'aime parler et adore agir, alors cet homme ne perd rien pour attendre. Quand j'aurais l'avantage, je retournerai la situation afin qu'il soit celui qui me supplie de lui laisser la vie sauve. 

Je me concentre à nouveau sur le groupe qui s'est installé autour de moi, me laissant au centre. Nous ne sommes qu'une dizaine, mais pouvons encore parler avec les autres traîtres afin de les faire revenir vers moi. Manier leurs cerveaux afin qu'ils se retournent contre ses bandits. 

J'entends un groupe revenir de sa tâche de travail avec mon frère comme responsable. Le grincement de mes dents me renvoie au goût amer de la trahison de mon propre sang. Pendant tout ce temps, il se jouait de moi, détruisait chacune de mes trouvailles et me souriait faussement alors qu'il a vendu ma mort à ses braqueurs qui n'attendent que ma chute.