Chapitre 18

5.4K 372 120
                                        

                                 ~

Le souffle court, la petite fille remonte les escaliers en bois aussi vite que ses jambes le lui permettent, et s'enferme dans sa chambre.
Elle claque violemment la porte, comme pour se couper des cris qui s'élèvent déjà en bas, et se bouche les oreilles en rejoignant son lit.
Elle ne veut rien entendre. Elle souhaiterait ne plus rien entendre.
Mais les cris des voix sont forts, et les coups, et le bruit de verre qui se brise s'ajoutent au chaos ambiant et traversent la barrière de ses mains plaquées sur ses oreilles.
Sa voix à lui est plus forte et dominante, comme toujours, tandis que celle de sa mère s'efface et est vite remplacée par des sanglots et des cris de douleurs étouffés.
La petite fille se roule en boule en serrant les dents, tandis que les cris lui glace le sang.
Les larmes qu'elle retenait s'échappent de ses yeux et innondent son visage qu'elle a enfouis dans sa couette.

Lorsqu'elle rouvre les yeux, après ce qui lui paraît être une éternité, la petite fille remarque qu'elle est blessée en trouvant du sang sur sa couette immaculée. Elle porte les doigts à sa bouche pour découvrir l'ampleur de l'entaille à sa lèvre inférieure, puis se lève courageusement pour sortir chercher de quoi se panser.
Elle ouvre craintivement la porte de sa chambre en bois rose délavée, et s'avance prudemment dans le couloir.

Il n'y a plus aucun bruit. Même la télévision semble avoir été éteinte.

Elle se penche au dessus de la rembarde des escaliers, pour jeter un oeil au rez-de-chaussée, puis se ravise vivement en trouvant des éclats de verres et des gouttes de sang au pied de l'escalier.

Elle est si jeune ; trop jeune pour subir ça, et trop jeune pour comprendre.

Elle ne sait rien des colères excessives de cet homme, et des violences physiques subitent par sa mère.

Les seules choses qu'elle comprend, c'est que cet homme est méchant, et qu'il est méchant avec elle et avec sa mère. Évidemment, qu'elle se doute qu'il frappe la femme qu'elle aime le plus au monde, puisqu'il la frappe elle aussi, mais que peut-elle bien faire de toute façon ?

“Ce sont des affaires de grands, d'adultes, et je ne veux pas que tu te mêle de ça, ma chérie. Alors je veux que tu me promettes que dès que tu rentres à la maison, tu files dans ta chambre. Ne fais rien qui pourrait l'énerver, et ne fait pas de bruit pour éviter qu'il te remarque.”, lui avait soufflé à l'oreille sa mère, il y a longtemps déjà.

La petite fille avait promis. Elle avait hoché docilement la tête, en signe d'assentissement, et sa mère l'avait prit dans ses bras en lui chuchotant qu'elle était courageuse.

Et elle le lui répéte tous les soirs.

Elle lui obéis toujours, pour la rendre fière et heureuse. C'est tout ce qu'elle veux, tout ce qu'elle souhaite voir : son sourire dévoiler ses belles dents blanches et cette mine joyeuse qui fait pétiller ses yeux.

En se plaçant devant le miroir, la petite fille découvre la plaie couverte de sang à sa lèvre, et celle de son bras, bien plus grosse et sanguinolente.

Pour une raison qu'il lui est inconnue, il lui avait donné une claque. Et lorsqu'il l'avait fait, il l'avait donné avec tant de puissance, qu'elle avait tituber avant de s'effondrer, KO, sur la table basse en verre qui s'était brisée sous son poids.

Maintenant, des morceaux de verres sont encore nichés dans la peau tendre et laiteuse de son bras.

Elle les retire bravement, sans pleurer ni tourner de l'oeil, puis désinfecte ses deux blessures.

N°2304Où les histoires vivent. Découvrez maintenant