Chapitre 28

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Zack soupire une énième fois, se racle la gorge puis se remet encore à gigoter sur sa chaise.

-Qu'est-ce que t'as encore ?je grommèle, agacée par le craquement de la chaise.

Ça fait une heure que nous avons terminé le "jeu des questions" et ça fait une heure que j'essaie tant bien que mal de rendormir, en m'efforçant d'ignorer Zack qui n'arrête pas de faire du bruit.

-Je croyais avoir été claire quand je t'avais dit que je ne voulais plus aucun bruit.

La fin de notre jeu ne s'est pas bien terminé et l'envie d'être gentille et agréable avec lui m'est totalement passée.
Suite à mes questions, Zack m'en a posé des très personnelles auxquelles je ne m'étais pas du tout préparé. Ses questions étaient beaucoup plus profondes et organisées que les miennes, et résultat : au lieu de se retrouver avec cinq malheureuses réponses comme moi, Zack doit au moins connaître toute ma vie. À peut-être quelques détails près, mais quand même.
Il sait pour mon géniteur qui m'a battu toute mon enfance, pour ma mère qui est...décédée, et pour Maverick, mon premier amour.
J'ai tellement été prise au dépourvu par ses questions et par la vague d'émotions incontrôlables qui m'a submergé, que je me suis lamentablement mise à pleurer. Comme une ridicule petite fille.
Et j'en veux à Zack pour ça. Je suis en colère contre lui pour avoir appuyer là où ça fait mal et pour m'avoir regarder pleurer, silencieusement​. Il a brisé mes défenses mentales en seulement quelques coups de marteau, comme si, finalement, je n'étais pas si solide que ça.
Pour essayer de me consoler, Zack m'a dit que de toute façon il avait deviné qu'on m'avait déjà "taper sur la gueule". “Je te trouve étonnement courageuse et forte pour ton âge”, m'a-t-il dit. Il m'a avoué avoir remarqué chez moi que je me crispait dès que Shane faisait des mouvements brusques autour de moi. “Les gens sur qui on a déjà levé la main réagisse souvent comme ça. C'est comme un réflexe”.
J'ai encore eu plus de mal à m'arrêter de pleurer. Tu parles d'une consolation.
Je ne me suis sentie que plus pathétique.
Voyant que ça ne m'aidait pas, et comme il s'en voulait d'avoir évoqué le sujet douloureux que sont les parents, il a finalement accepté de le révéler ce qu'étaient ces fameux jetons jaunes. Il m'a d'abord demandé où j'en avais entendu parler et je lui ai répondu que j'avais surpris Léna plusieurs fois en train d'en récupérer avec des garçons. Ses sourcils se sont haussés en une expression mi-surpris, mi-gêné et il a baissé la tête pour dissimuler son petit sourire naissant.


-Les jetons jaunes nous servent à faire du troc.

Quand il dit "nous", je sais qu'il veut parler de eux, les hommes.

-Il y a une sorte de guichet qu'on appelle l'Accueil où on peut les échanger contre du matériel nécessaire. Des vêtements, des sous-vêtements, des chaussures...tout ce genre de truc dont on pourrait avoir besoin.

-Je n'ai vu aucun guichet pourtant.

-Non c'est normal, il est un peu caché, m'expliquait-t-il.

-C'est illégal ?

-Non, non ; bien sur que non. Mais...c'est quelque chose de tabou dont on ne préfère pas parler. C'est pour ça d'ailleurs qu'on l'appelle comme ça, pour que ça passe plus inaperçu.

Je ne comprenais pas. Depuis quand aller faire des courses est tabou ?

-Comment ça ? Je demandais, tâchant de comprendre, les sourcils froncés.

Zack se racla la gorge en fuyant mon regard puis joignit les mains.

-L'obtention des jetons jaunes est un peu...particulière.

Particulière ? Comment ça particulière !?

-Est-ce que vous devez coucher avec les gardes pour en obtenir !? Je m'exclame, horrifiée.

N°2304Où les histoires vivent. Découvrez maintenant