Chapitre 37

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-Je suis fatigué, souffle-t-il d'une voix rauque, le regard dans le vide. Je ne veux plus vivre ça.

-Shane, je te promets que plus personne ne mourra, mais s'il-te-plait, je t'en supplie, calme-toi...

Dix minutes que je me bats contre lui pour qu'il se calme.
Dix minutes qu'il ne semble plus lui même et qu'il détruit tout dans la chambre.
J'ai peur ; peur qu'en faisant trop de bruit il n'attire l'attention et qu'on vienne le chercher.
J'ai tout essayé ; je l'ai même menacé d'appeler un garde, mais ça n'a servi à rien. Il s'est simplement contenté de dire : "Qu'ils m'y remmène. J'aurais dû mourir là-bas de toute façon".
Chaque paroles que prononce Shane me désole un peu plus.
Mes larmes coulent sans discontinuité.
Je ne comprend pas vraiment ce qu'il dit, mais sa voix. Sa voix est si...affligée. Ça me détruit.
Je ne comprend pas ce qui lui arrive mais son comportement m'effraie. Je ne sais pas s'il est furieux, désespéré ou simplement bourré. Mais en le voyant tout détruire dans la chambre, j'ai juste peur que cette histoire de perte de contrôle ne s'avère être vraie.

-S'il-te-plait, Shane...je le supplie en pleurant, les deux mains tendues devant moi pour l'approcher doucement.

Ses mouvements s'arrêtent et il se fige comme s'il prenait enfin conscience de ma présence. Son bras qui allait jeter une bouteille contre le mur retombe contre son flanc, et il se tourne, face à moi, les sourcils froncés comme s'il était troublé.

-Est-ce que tu as peur de moi ? S'enquiert-t-il d'une toute petite voix.

J'ai l'impression de prendre un coup à la poitrine.
Oui. A vrai dire, Shane, tu me terrorise. Je n'arrive pas à comprendre ce que tu dis et ce qui t'arrive m'échappe totalement. Ton comportement violent me pétrifie et j'ai juste peur que tu t'en prenne à moi, comme le faisait mon père. J'ai l'impression d'être dans un vieux remake de mes pires souvenirs, sauf que cette fois, c'est moi la femme qui supplie son marie de se contrôler.
De se maîtriser et de s'arrêter.
Les larmes me brouillent la vue mais je continue d'avancer prudemment sous son regard désespéré, suppliant, meurtri.

-Non, mais s'il-te-plait arrête de tout casser. Je n'ai pas envie que l'on vienne te chercher.

-Tu mens. Je te fais peur. Sinon pourquoi pleurerais-tu ?

Ses yeux fouillent les miens et je suis incapable de répondre. Shane soupire, abattu et se détourne face au mur.

-Parce que ce que tu dis est triste, je souffle après quelques secondes de silence.

Il hausse les épaules et baisse la tête.

-C'est comme ça. La vie est triste.

Il s'arrête et je l'entends déglutir avec difficulté comme si sa gorge était nouée.
Les secondes passent avant qu'il ne se tourne face à moi et que je puisse sonder son regard.
Désolation.
Désespoir.
Abandon.
Il ferme les yeux, pendant ce qui me semble être une éternité, et quand il les rouvre, toute trace d'émotion a disparu. Son regard est juste...vide.
Lentement, il s'approche de moi, ses yeux plongés dans les miens.

-Arrête-toi, s'il te plaît, je répète d'une voix tremblante de peur qu'il ne s'avance que pour briser la bouteille sous mes yeux.

Mais Shane continue de s'avancer et ne s'arrête que lorsqu'il est face à moi. Si près que je me tends.
Il m'observe simplement, ses yeux toujours dans les miens, et ne pas savoir ce qui se passe dans sa tête me rend anxieuse. Son regard est vide et perçant à la fois. Il pourrait très bien éclater en sanglots, là maintenant, comme il pourrait très bien s'énerver et lever la main sur moi. À cet instant, tous les scénarios me semblent possibles.
Je fouille son regard pour trouver quelque chose ou même le faire réagir mais il ne bouge pas. Il reste immobile, si près de moi, à observer en détail mon visage.
Puis ses yeux se posent sur mes lèvres et ne les quittent plus.
Je déglutis en tâchant de refouler le trop-plein d'émotions qui me submerge mais je n'y arrive plus.
À l'heure actuelle, je n'arrive plus à rien. Je n'ai plus aucune maîtrise sur mon corps et je n'essaie même plus de me poser de questions. Mes émotions partent dans tous les sens et je ne peux plus retenir mes larmes.
J'ai juste conscience de ce qu'il veut sans qu'il n'ai eu besoin de le dire.

N°2304Où les histoires vivent. Découvrez maintenant