Storm |k.s|

4 • "Arrête de me fuir"

Ken me fixe du regard, alors que moi je recrache ma fumée en prenant soin de regarder le ciel pour éviter de le regarder lui. Le ciel nous a toujours fasciné, je ne compte plus le nombre de nuits que nous avons passé ensemble sur un toit, dans un parc ou simplement à la fenêtre pour admirer les astres.
Et puis je suis déjà assez mal à l'aise, je ne vais pas en plus le regarder dans les yeux.
J'attends qu'il commence la conversation, mais il ne dit rien, alors je m'engage timidement.

- Alors cette semaine ? T'as fait quoi ?

- Comme d'habitude.. J'ai gratté, je suis allé au stud. Rien de nouveau.

Même si je savais qu'avec ma question je ne pouvais pas m'attendre à mieux, sa réponse me laisse sans voix, ne sachant pas quoi ajouter. Mais heureusement pour moi, il continue :

- C'était bizarre sans toi. J'ai plus l'habitude. J'avais l'impression de toujours attendre après quelque chose, puis après je me rendais compte que c'était parce que tu n'étais pas la. J'attendais juste de sentir ta présence.

Même si avec Ken, on a toujours été très communicatifs depuis le début, cette révélation me surprend. Je ne savais que ma présence était aussi importante pour lui, au point que même quand il est avec les gars, il attend que je sois là.
En même temps, c'est pareil pour moi. Quand je suis avec les gars mais que Ken n'est pas là, j'ai toujours l'impression qu'il manque quelque chose. De toute façon ce n'est pas qu'une impression, puisqu'il manque Ken. Je ne peux pas me sentir au complet tant que celui-ci c'est pas près de moi, en train de rire avec les autres. Tant qu'il n'est pas là, j'ai l'impression de passer mon temps à attendre.
A attendre qu'il arrive, à attendre de l'écouter parler de rap, à attendre de l'entendre enregistrer un nouveau morceau, à attendre de l'entendre rire. A attendre de sentir son regard brûlant sur moi, à attendre un sourire qui m'est destiné.

Si j'ai vite créé un lien fort avec Mekra Mo et Framal, rien n'est comparable au lien que j'ai avec Ken. Plus loin qu'une connexion, c'est la fusion qui nous unit. Parce que quand je le regarde, j'ai l'impression de me voir moi mais dans un autre corps. Au départ, cela m'avait déstabilisée, et j'avais alors essayé de ne pas me rapprocher de lui. Je ne voulais pas que quelqu'un puisse lire en moi, pourtant lui paraissait capable d'apercevoir chaque chose qui me faisait. Mes failles, mes faiblesses, mes doutes, mes peurs... Il avait tout su deviner, puisqu'il avait les mêmes.
Alors, je n'avais pas pu lutter plus longtemps contre l'inévitable. C'est comme si une force invisible nous forçait à nous rapprocher. Comme si c'était écrit. Et depuis, nous étions inséparables. Je ne m'étais jamais sentie aussi comprise par quelqu'un, aussi étonnant soit-il, alors qu'on se connaissait depuis 1 mois à peine à l'époque.
Et cela faisait maintenant 2 ans que cela durait. 2 ans que j'avais rencontré mon âme sœur au masculin. Parce que j'en avais toujours été persuadé, il était la mienne. La seule âme jumelle à la mienne, c'était la sienne.

- Si on ne t'a pas vu cette semaine, ce n'est pas parce que tu voulais m'éviter ? me demande-t-il soudainement.

A l'entente de cette question, je tourne mon visage vers lui. C'est à présent lui qui regarde droit devant lui, comme s'il n'osait pas affronter la réalité. La triste réalité de ce qu'on a fait.

- Je vous avez prévenu que j'allais être occupée avec ma semaine d'exams.

- Ca ne t'a jamais empêché de venir nous voir avant. Alors pourquoi cette fois-ci tu nous as carrément laissé ?

Je perçois une once de reproche dans sa voix, presque comme s'il était blessé. Mais je ne me vois pas lui dire qu'il a raison, que j'ai voulu l'éviter pendant quelque temps pour parvenir à me remettre les idées en place. Surtout que ca a été un échec cuisant, puisque dans ma tête tout est encore plus confus qu'avant.