58 • "J'ai l'impression que c'est la dernière fois qu'on se voit"

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Vu mon départ précipité et plus qu'imminent, on a décidé de tous rester dormir chez Deen pour cette "dernière soirée" tous ensemble. Plus que jamais la nostalgie m'a gagnée, sentant que plus aucune soirée de ce type n'arriverait de si tôt. Mais c'est mon choix, et même si je me sens obligée de fuir pour aller mieux, il faut que j'accepte la décision que j'ai prise.

Les gars n'ont pas touché à une seule goutte d'alcool et ils ont même laissé leur joint de côté de cette soirée. On a juste passé la nuit éveillé, tous ensemble, juste nous et vraiment nous. Ma famille, chacun de mes frères autour de moi. On a parlé durant toute la nuit, d'à peu près tout et rien, de nous, notre rencontre, nos souvenirs les plus lointains et les plus beaux, de nos disputes qui sont maintenant des souvenirs qui nous font rire. On a même parlé de Ken sans tabou et sans gêne, pour la première fois depuis plus d'un mois, et je me rends compte que ça me fait du bien. Quelque part je me rends compte que ça me libère d'en parler plutôt que de tout garder pour moi, et puis c'est aussi une façon pour moi de l'avoir près de moi et de faire exister un peu plus longtemps de notre histoire. De toute façon les souvenirs, que ce soit de Ken ou des garçons, c'est tout ce qu'il me restera demain et ce pendant quelques semaines au mieux.

Alors c'est comme ça que j'ai passé ma dernière nuit à Paris : dans le petit appartement de Deen qui est bien trop souvent devenu mon refuge ou ma deuxième maison cette dernière année, écoutant chacune des paroles et chacun des rires de ma famille, installée sur les genoux de Mo et plaquée contre son torse comme une enfant, Deen à ma gauche qui ne cessait de me faire des blagues pour éviter de voir de nouvelles larmes couler quand Alpha et Darryl nous rappelaient de vieux souvenirs, Framal à ma droite qui n'a pas laché ma main de la nuit, Doum's qui ne cessait de me demander quand je rentrerai et Mekra en face de moi qui me lançait sans cesse des regards toutes les 5 secondes, comme s'il avait peur que je m'envole d'une seconde à l'autre... Et je ne pouvais m'empêcher de penser que c'était un peu ce qui arriverait dans quelques heures, que ça devait être ce que tous mes amis ressentaient... Que j'étais là, avec eux, puis que je serai soudainement disparue en moins d'une heure.

Je ne saurais dire comment j'ai vécu cette nuit, si c'était une bonne chose ou non, ou si mon coeur a réussi à l'encaisser. Les heures sont passées sans que je ne m'en rende compte, trop absorbée à observer chacun des détails que j'aime chez mes amis, à imprimer leur façon de sourire ou de fronçer les sourcils, à me remémorer leur voix, pour pouvoir les revoir dans ma tête lorsque je me sentirai seule dès demain. La nuit s'est écoulée entre fou rire lorsqu'on se moquait tous d'Eliott et Mo qui disaient n'importe quoi, puis entre mes larmes quand les souvenirs qu'on évoquait me rappelaient juste à quel point ils me sont précieux et la déchirure que créerait les aurevoirs le lendemain. Le seul point positif est que je ne me suis certainement pas gênée pour essuyer à nouveau mes larmes dans le tshirt de Mo, mais qu'il a bien vite arrêté de râler. Il comprenait.

Alors le jour a fini par se lever calmement, et c'est à ce moment-là que j'ai pris conscience que le monde continuait de tourner malgré tout, et que je ne pouvais rien faire pour empêcher l'heure de mon départ d'arriver. J'allais devoir les quitter malgré moi et c'est une partie de moi qui se déchirait, comme si j'allais laisser un bout de moi ici.

Plus les heures défilaient et plus je sentais les bras de Mo se resserer autour de moi comme pour me retenir, sa chaleur réchauffer mon corps et plus les regards du reste des gars s'attardaient sur moi. Puis est arrivé le moment fatidique, celui que je redoute depuis plusieurs jours. Deen consulte l'heure de son téléphone puis il le range lentement dans sa poche avant de tourner le regard vers moi. Il a l'air si désorienté que je me dis soudainement que je ferais mieux de rester ici, de venir habiter avec lui et de continuer ma vie comme si tout allait bien. Comme si rien de mal n'était arrivé.

Storm |k.s|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant