🌟40. Perfect couple

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Rick était en train d'enfiler un tee-shirt. Et moi, je faisais mine d'arranger mes cheveux, tandis que je l'observais à la dérobée dans le miroir de notre loge.
Il m'avait embrassée, mordillée ; avait provoqué des mini feux d'artifice dans tout mon corps en me touchant de partout, et voilà qu'il agissait comme si je n'existais pas. Bon d'accord, les baisers, ça avait été pour le magazine, mais quand même... D'ailleurs, je ne saisissais toujours pas pourquoi ces gens nous avaient choisis. Rivera OK, mais que venais-je chercher là ?
Rick m'avait juste informé qu'on nous voulait pour le numéro de novembre, et un jour plus tard, je recevais mon contrat. Ça n'avait jamais été mon rêve de faire la couverture d'un magazine ; je n'aimais même pas me prendre en photo. Cependant, j'y avais vite vu l'opportunité de me faire connaître en tant que personne. Pour une fois, le sujet ne se centrerait pas uniquement sur Rick, je n'allais quand même pas rater ça ! Alors j'avais attrapé ma plume et j'avais signé.
J'en avais vraiment marre d'être juste « la fan que Rick Rivera avait épousée » aux yeux de tout le monde. Mais bon, je savais bien que ça allait prendre du temps. Quand on vivait dans l'entourage d'une personne comme Rick, il fallait bien s'attendre à évoluer presque uniquement dans son ombre. Il n'y avait qu'à le regarder sur le plateau. Le mec était tellement à l'aise derrière les caméras ! C'était comme s'il avait fait ça depuis tout petit.
Pour ma part, ça avait été mon premier photo shoot. Autant dire que je n'avais pas été super-super ; au grand bonheur d'une styliste à la peau laiteuse qui ne semblait pas trop me porter dans son cœur. Je ne pouvais même plus compter le nombre de remarques désobligeantes que j'avais reçues d'elle ce jour-là.
Ça avait d'abord commencé en coulisse où elle me lâchait des « Mais c'est quoi ces cheveux ! » « Ses yeux sont trop grands ! » « Mais où sont ses seins ? " « Au final, elle a quoi d'exceptionnel ? »
On ne me blessait pas facilement, mais j'avais dû faire appel à tout mon self-control pour ne pas lui balancer ces quatre vérités ; à commencer par sa gueule qui empestait l'ail. Après un dernier commentaire dégueulasse, au moment même où j'allais enfin exploser, on l'avait appelé pour je ne sais quel motif, et elle était allée cracher son venin ailleurs. Bon débarras !
Les autres étaient loin d'être si pénibles. Par contre, leurs manières guindées avaient vite fini par m'éreinter. J'avais voulu leur faire comprendre qu'ils pouvaient être cools avec moi, mais comme toute réponse, je n'avais eu droit qu'à une froideur professionnelle. À croire que tout le monde voulait que je décampe au plus vite, Rick compris.
Celui-là et moi, on avait passé pas mal de temps dans l'immense salle blanche au haut plafond, à se faire capturer sous tous les angles. C'était donc cette proximité récente et le contraste avec cette froideur qui m'agaçait. Je ne m'attendais pas à des câlins ensuite, mais je ne supportais pas d'être ignorée de la sorte alors qu'il avait eu ses mains partout sur moi, pendant plus de trois heures.
Vous n'imaginez même pas le temps qu'il fallait à ces photographes avant d'être satisfaits ! Ces gens étaient tellement difficiles ! Une chose était sûre : je ne voudrais jamais faire mannequin professionnelle ; même si à mon avis eux non plus n'auraient pas voulu de moi. Entre les poses what the fuck, les tenues c'est quoi cette merde, les accessoires chelous, en plus d'être analysé comme une verrue au microscope, c'était très peu pour moi !
Il y avait même eu une séance où on avait utilisé du faux sang pour les photos. J'avais eu peur du rendu et avais gentiment demandé au photographe de me laisser voir quelques-unes des clichés. Pourtant, à ma grande surprise, ça n'avait pas du tout été ce à quoi, je m'attendais. Le résultat était tellement bluffant !
C'était sombre, étrange, troublant... mais mes mains ensanglantées émergeant de sous les bras de Rick pour se poser sur son torse nu, tandis que celui-ci adressait son regard le plus ténébreux à la caméra, c'était juste magnifique. Sur la photo, j'avais les yeux fermés et penchais la tête sur un côté, tandis que mes cheveux, plus les extensions qu'on m'avait ajoutées, tombaient magnifiquement en cascade.
Je ne savais pas ce que c'était censé représenter. Cependant, j'avais eu la preuve que les gars étaient des professionnels. Alors je les avais laissés faire leur travail sans rechigner.
Rick m'avait tâtée, m'avait empoigné les fesses, avait glissé sa langue dans ma bouche. Cependant, il n'y avait eu aucune délicatesse dans ses gestes. Il m'avait embrassé comme s'il voulait me punir. Je ne comprenais pas pourquoi il était encore en colère pour cette histoire de shampoing ! J'étais pourtant certaine qu'il serait chou en chauve.
Il avait à peine terminé d'enfiler son tee-shirt lorsque l'un des caméramans vint nous prévenir qu'il était temps de commencer. On allait se faire filmer pour la partie question-réponse. Adieu les fourrures et les tenues de créateurs tous plus bizarres que les autres, qui n'en finissaient plus depuis tout à l'heure. On nous avait laissé le choix de nos vêtements cette fois-ci. Et Rick avait opté pour son look de tous les jours, à savoir perfecto, jean destroy, Dr Martens et tee-shirt à slogan. Mais sérieusement pourquoi avoir choisi le « She loves my lollypop » ? Cette pub de bite, était-elle vraiment nécessaire ?
Avec un soupir d'agacement, je montai à sa suite sur le plateau essentiellement blanc, orné des lettres lumineuses GQ en arrière-plan. Des fois, j'avais vraiment envie de taper ce mec. Personnellement, j'avais apporté mon caraco à fleurs que j'avais inséré dans mon jean boyfriend taille haute, le tout accompagné de bottines.
On nous disposa face à face et nous remit à chacun une pile de quinze petits cartons. Le but de ces questionnaires était de déterminer à quel point on se connaissait l'un l'autre. Lorsque la réalisatrice cria action, je savais que c'était à moi de commencer.
J'étais stressée comme tout. Je voulais dire, Rick et moi on ne se connaissait pas tant que ça. Et si on avait faux toutes les réponses, que penseraient les gens ? Monsieur le rockeur par contre, lui, paraissait serein, accoudé à son fauteuil dans une pose décontractée. Après tout, il était habitué à répondre à des questions. Il devrait être capable d'improviser facilement. Après une longue inspiration, je pris mon courage à deux mains et me lançai enfin :
— Quel est mon signe astrologique ?
— T'es Sagittaire, répondit-il sans hésiter.
Je fis passer le premier carton sous la pile avec un petit sourire satisfait. Effectivement, j'étais née un 23 novembre. On n'en avait jamais vraiment parlé. Comment savait-il alors ? Il l'avait probablement vu sur notre contrat de mariage. Et il s'en est souvenu, ne pus-je m'empêcher de me réjouir intérieurement.
J'étais franchement plus détendue pour la suite. Lui par contre, son visage demeurait obstinément fermé. Mais ça ne paraîtrait pas bizarre. Tous les fans de Rick étaient habitués à son humeur lunatique. Ce fut à son tour de poser une question et il demanda :
— J'ai combien de tatouages ?
— Tu n'en as aucun.
— T'es certaine ? me nargua-t-il. Pourtant certaines personnes sont convaincues que j'en ai quelques-uns cachés.
— Ces personnes n'ont pas exploré ton corps comme je l'ai fait, rétorquai-je en le regardant droit dans les yeux.
Et son premier sourire de la journée apparut à ce moment-là ; le cul étant bien sûr l'un de ces sujets préférés. J'avais fait exprès de sortir ça, car j'en avais eu assez de son air grognon. En plus, c'était vrai, il n'avait pas de tatouage. C'était son choix, les gens devraient arrêter de penser que parce que c'était une rockstar, il devait forcément aimer les tatouages.
— C'est quand la première fois qu'on a fait l'amour ? lus-je dans le deuxième carton.
Il n'avait clairement pas envie de répondre à cette question. Il déglutit en se grattant le crâne et répondit finalement d'une voix basse :
— Notre lune de miel.
Deux des gars derrière la caméra éclatèrent de rire et la réalisatrice s'exclama d'un ton amusé :
— Vous êtes bien sorti ensemble pendant près d'un an, non ?
— Oui, grogna Rick.
Alors c'était ça ! Sa réputation prenait un grand coup. Tout le monde croyait qu'on se voyait depuis le jour où on s'était embrassé dans la rue - où je l'avais embrassé puis m'étais enfuie, plus précisément. Rick avait toujours été le genre de mec à coucher dès le premier soir. C'était donc pour ça qu'il avait été si réticent à partager cette information.
— Oh mon Dieu ! rit la femme aux cheveux frisés, suivie des gars de l'équipe technique.
Ma maman serait sûrement fière en découvrant cette vidéo : sa petite fille n'avait pas couché avant le mariage. La pauvre, elle ne saurait jamais que ce n'était pas du tout grâce à moi ce soi-disant exploit. Au contraire, j'avais été prête à m'offrir à Rick à plusieurs reprises. C'était parce qu'il avait refusé qu'on avait tenu jusqu'au mariage. Et voilà qu'il récoltait toutes les moqueries, mais ce n'était pas moi qui allais le plaindre.
— Bon, ça va, grommela-t-il. Mais l'attente valait le coup. Je ne regrette pas, ajouta-t-il d'un ton que j'aurais presque pu croire honnête si je ne savais pas à quel point il était bon menteur.
— Ouuuuw ! s'exclamèrent les autres, amusés.
J'avais hâte de voir le rendu de tout cela après le montage. Avec la voix hors champ des techniciens, j'étais sûre que ce serait drôle, même si d'ici la fin, cette vidéo serait bourrée de mensonges.
— Quel est mon animal préféré ? questionna Rick.
— Le pingouin, m'empressai-je de répondre.
— Non les cochons !
— Quoi, mais tu m'avais dit pingouin, protestai-je.
Il haussa les épaules avec un petit sourire malicieux.
— Bien, repris-je en changeant de carton. Je mesure combien ?
— Je sais pas, un mètre soixante ? hasarda-t-il nonchalamment.
— Quoi ? m'insurgeai-je.
Je n'avais pas l'air d'être si petite quand même ? Je faisais un mètre soixante-huit.
— 62 ? tenta-t-il de nouveau.
— Tu plaisantes, j'espère ?
— Je suis ton mari, pas ton médecin. Enfin sauf quand on joue au docteur, fit-il avec mon sourire.
On n'avait jamais joué au docteur. Pourtant, en bonne comédienne, je le tapai sur la cuisse d'un air réprimandant pour faire genre que j'étais gênée qu'il partage cette information de notre vie sexuelle très active. Lol.
J'espère avoir tapé fort.
— Même question, reprit-il sans sourciller.
Tant pis.
— Tu fais un mètre quatre-vingt-treize, répliquai-je en levant les yeux au ciel, l'air de dire « trop facile ».
Je connaissais sa taille avant même de vivre avec lui. On dit merci qui ? Merci internet.
— Quelle honte ! s'exprima-t-il d'un air contrit que je savais feint. Tu connais ma taille et moi pas. Quel type de mari je suis ! C'est quoi la prochaine question ?
— Le nom de jeune fille de ma maman, lus-je avec un haussement de sourcil défiant, sachant d'avance qu'il aurait encore faux.
— Coucou Diane Karen Ewing, se tourna-t-il vers de la caméra avec un sourire triomphant.
Maman allait adorer. Comment, diable était-il au courant de ça ? Se parlaient-ils encore ? Ce mec pouvait tellement être surprenant par moment !
— Je mange quoi au petit-déj ? enchaîna-t-il.
— Un camion, rigolai-je avant de reprendre plus sérieusement : non, mais sincèrement : bacon, œufs, tartines, saucisses, pancakes, gaufres au sirop d'érable, café, lait... Et je n'ai même pas fini de citer... Tu sais ce à quoi, cette question me fait penser ?
— Ne le dis pas, s'il te plaît, me pria-t-il sans parvenir à garder son sérieux.
J'aimais trop ces moments où il pouvait deviner mes pensées sans que je n'aie à dire quoi que ce soit. Il avait suffi que je mentionne le souvenir pour qu'il saisisse auquel je faisais référence. On se mit à rigoler comme des fous tandis que et les autres nous dévisageaient, perplexes ; la cause de notre hilarité leur étant inconnue.
En fait, celle-ci était due au souvenir de ce matin où Rick avait mangé des céréales périmées. Tout simplement, parce qu'il n'avait pas pu attendre que Nan termine de préparer à manger.
C'était avant notre mariage. J'avais l'impression que tout était plus simple à cette époque.
Évidemment, Rick n'était pas au courant que la date de péremption des céréales avait été dépassée. Moins d'un quart d'heure plus tard, pris d'un violent mal de ventre, il avait couru comme une furie dans l'une des toilettes du rez-de-chaussée. Malheureusement, il remarqua que celle-ci n'avait plus de papier, seulement après avoir fait son affaire.
J'avais interdit aux servantes de lui en apporter et lui avais promis à travers la porte de lui filer de PQ, uniquement s'il chantait une chanson de mon choix. Il avait juré, gueulé, avait promis de me tuer, mais il avait fini par obtempérer.
Après son concert dans les chiottes, je m'étais enfuie à la minute où je l'avais entendu se laver les mains. Une fois sorti, il m'avait poursuivi dans toute la maison et lorsqu'il m'avait enfin eu, on était tous les deux tombé dans la piscine.
Sa colère retombée, il avait réalisé le comique de la situation, et on avait tellement ri ce jour-là. Ça avait été trop génial ! À mon avis, il devait aussi penser à la même chose en me regardant de ses yeux rêveurs.
Je finis même par oublier les autres personnes présentes dans le studio. Ça faisait tellement du bien de me replonger dans l'un de ces beaux souvenirs que j'avais avec lui !
— Je t'aime Sara Hood Rivera, dit-il dans un murmure, une fois nos fous rires calmés.
Je rigolais encore doucement, et de surprise, je m'étranglai avec ma salive tandis que mes cartons qui s'étaient échappés de mes mains, s'éparpillaient par terre.
QUOI ?

Rock Hard, Love HarderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant