🌟65. Coupable

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— Allons-y ! m'écriai-je.
Monica me stoppa dans mon élan en posant une main sur mon torse.
— Il faut que tu saches vraiment ce que tu veux. Si tu veux la reconquérir... Enfin, si elle ne te tue pas avant ; tu sais ce que cela signifierait ? Plus de batifolages avec Blondie ou qui que ce soit.
— Personne d'autre qu'elle ne compte, confessai-je en mettant toute ma détermination dans mon expression.
Ma sœur me fixa longtemps, mais mon regard ne flancha pas. Lorsqu'elle sembla finalement satisfaite, elle m'intima de la suivre et on embarqua dans la voiture de location, empruntée à Maryse.
Le parcours fut pour moi une vraie torture. Ma sœur devait sûrement me trouver chiant, car je ne cessais de la faire confirmer que oui, Sara avait vraiment accepté de me voir. Était-ce seulement réel ?
Oui, j'avais été un gros enfoiré ces dernières semaines, mais je n'avais jamais cessé de l'aimer... Je ne pense même pas que ce serait possible, un jour.
— Elle a exigé de te voir dans un lieu public, m'informa Monica. Si tu avais des projets de réconciliation sur l'oreiller, c'est mort. J'aime cette fille ! rigola ma chauffeuse. Je crois que c'eeest là ! On a dîné hier dans un restau près d'ici. Elle m'a dit qu'elle t'attendra sous ce belvédère.
— Central Park ? À une heure du mat ? Sous la neige ? protestai-je. Vous avez planifié mon assassinat ou un rendez-vous ?
— Tu le sauras quand tu seras mort, sourit la psy d'un air goguenard.
— Hahaha ! ironisai-je. En plus, j'ai même pas de veste !
— Ah merde ! T'as oublié ce détail dans ton empressement. Tu prends mon manteau ?
— Non merci. Sara est même pas encore là. Je ne vois personne.
— Elle a promis de venir.
Je jetai de nouveau un œil méfiant au plus grand espace vert de New York, désormais enveloppé par une épaisse couche de blanc. Les allées enneigées et les bancs avec les célèbres plaques dédicacées étaient visibles depuis la voiture, car ils étaient éclairés par des lampadaires et la lumière des immeubles avoisinants.
Il n'y avait pas trace d'âmes qui vivent dans le parc, et ce calme ne me disait rien qui vaille. C'était normal à une heure pareille, mais ça ne me rassurait pas le moins du monde. Pourquoi n'avait-elle pas tout simplement choisi un restau ?
— Tu sais que John Lennon s'est fait assassiner pas loin d'ici ? maugréai-je. C'était en décembre ; on est en décembre. Si jamais...
— Rick arrête avec tes idées noires ! pouffa Monica. Je t'attendrai pas loin.
— Si je ne te connaissais pas, j'aurais vraiment cru que c'est un complot pour me tuer, conclus-je d'un air mauvais en descendant de la voiture.
— Mauviette ! se moqua-t-elle.
À peine avais-je mis le pied par terre que le froid hivernal new-yorkais me gifla et me glaça tous les os jusqu'au dernier. Il faisait combien, nom de Dieu ? Moins cent ? Je détestais l'hiver ! Je haïssais la neige !
— Je veux ton manteau ! m'écriai-je en tendant ma main grelottante à Monica.
Elle rit devant ce changement d'avis et me le tendit en me souhaitant bonne chance.
Le vêtement en laine n'avait aucune chance de rentrer sur moi, bien évidemment. En plus, je serais ridicule avec. Je le passais sur mes épaules comme une cape et me traînai jusqu'au belvédère en pestant à chaque nouveau pas. Il faisait un froid de canard et j'avais peur.
Trois minutes d'attente à peine, je songeais déjà à retourner dans la voiture lorsque des bruits de pas se firent entendre derrière moi. Je me retournai brusquement, les sens aux aguets. Cependant, je ne tombai pas sur un brigand comme je le redoutais, ou alors sur Sara, et encore moins le père Noël...
Adams s'avançait dans ma direction, vêtu d'un long manteau sombre, les mains dans les poches.
C'était une blague ? Je devais voir Sara, pas Shawn. Ou alors, c'était une petite surprise de leur part : elle m'avait envoyé son amant. C'était donc vraiment fini entre nous ?
Avec un goût amer dans la bouche, je m'apprêtais à faire demi-tour, lorsque l'ancien basketteur m'interpella d'un ton tranchant :
— Moi non plus, je n'ai pas envie de te voir, Swan.
Je m'immobilisai à l'écoute de mon vrai prénom, mais ne me retournai pas.
— Mets-toi en tête que si je fais ça, c'est pour Sara. Uniquement, pour elle, continua-t-il sur le même ton. Cependant, sache que je reste persuadé que tu ne la mérites pas.
Oui, j'avais compris. Elle était à lui. Par contre, je peinais à saisir ce que venait faire le photographe ici. J'entendis ses pas s'arrêter à une distance respectable de moi et il annonça :
— Il n'y a rien eu entre elle et moi, ce soir-là !
Je comprenais de moins en moins ce qui se passait. Cependant, après cette phrase, il avait capté toute mon attention. Je fis demi-tour, plus intrigué que jamais de découvrir la suite.
— J'ai vu le paparazzi, enchaîna le tatoué. Je l'ai embrassée et je me suis assuré qu'elle soit trop saoule pour rentrer, car je savais que ça te mettrait dans tous tes états. Alors, je le répète : il n'y a rien eu entre elle et moi, se soir-là.
Quoi ? Alors, Sara n'avait pas menti.
Oui, jusque-là, j'avais encore eu des doutes. Mais même s'il s'était vraiment passé quelque chose entre eux et que ça m'arracherait le cœur, je l'aurais accepté ; il aurait juste suffi qu'elle veuille encore de moi. Alors que là, je me sentais tellement bête, tellement con. Toutes ces choses que j'ai dites et faites... Oh mon Dieu. Voudrait-elle seulement me pardonner ?
— Mais pourquoi t'as fait ça ? hurlai-je.
J'avais foiré en infligeant ça à Sara, mais rien de tout cela ne serait arrivé sans Shawn. Je me rappelais qu'on traînait ensemble à l'époque. Pourquoi avoir manigancé tout ça ?
— Je ne sais pas. Pourquoi t'as fait ça à Barbara ? répliqua-t-il du tac au tac.
— Mais je ne me rappelle même pas de ta putain de Barbara !
Il fit un tour sur lui-même en se tenant la tête comme pour s'efforcer de rester calme, mais il n'y arriva pas, car il aboya :
— C'était ma meilleure amie ! Je l'aimais plus que tout. Et toi, tu l'as anéantie. Tu ne l'as même pas remarqué quand elle a commencé à ne plus venir à l'école. Je t'ai laissé des et des chances de te rattraper. J'ai continué à te sourire, à traîner avec toi... Tu sais, j'ai vraiment lutté pour te pardonner. Mais Barbara ne s'en est jamais remise de ce que tu lui as fait, et toi t'as continué d'être un connard. Ils ont dû l'interner, et dernièrement, elle s'est suicidée. Tu l'as tuée, Rivera !
Il s'interrompit pour essuyer rageusement une larme sur sa joue et aussi étrange que ça pouvait paraître, je ressentais sa douleur. Je me sentais vraiment mal pour la personne que j'avais été, mais je n'arrivais toujours pas à me souvenir d'une Barbara, ni de ce que j'avais pu lui infliger.
— Je vais te détruire, Rivera, reprit Adams avec une lueur meurtrière dans le regard. Je voulais commencer par t'atteindre avec Sara, mais elle ne mérite pas ça. Elle n'a rien à faire dans cette histoire. Je regrette de l'y avoir mêlé. C'est quelqu'un de bien qui fréquente juste la mauvaise personne. C'est entre toi et moi. Fini les invitations et les sourires mielleux. Je te hais, Swan. Et je te jure sur la tombe de Barbara, que tu vas me payer pour ce que t'as fait.
Puis il tourna les talons et je restai planté là, complètement hagard. Le froid ne m'atteignait même plus, j'étais perdu. Les menaces de Shawn étaient sérieuses, mais ce n'était pas cela qui m'inquiétait. Qu'avais-je fait à cette fille pour lui arracher tout désir de vivre ? Quel type de personne étais-je pour ne même pas m'en rappeler ?
Je ne pouvais m'empêcher d'imaginer le pire, parce que justement, le gamin en manque d'attention que j'avais été, était capable du pire. Si Shawn n'avait pas menti, et je doute qu'il l'ait fait, j'étais indirectement responsable de la mort de quelqu'un, et je vivais tranquillement ma vie, comme si de rien n'était.
Je me sentais si immonde.
Peut-être que tous mes efforts étaient vains, finalement. Peut-être que je n'arriverais jamais à être une personne bien.
— T'as pas des excuses à présenter à quelqu'un, par hasard ?
Sara !
Je pivotai lentement et mon cœur rata un battement lorsque je posai les yeux sur elle. Elle était plus belle que jamais avec ses cheveux coupés en un carré dégradé qui lui conférait une allure encore plus rebelle.
Les mains dans les poches de son manteau cintré, elle s'avançait d'une démarche altière avec une intensité brûlante dans le regard.
Lorsqu'elle arriva à ma hauteur, elle se planta devant moi et me dévisagea avec mépris.
— Sar...
Avant même que je ne termine de prononcer son nom, mon visage partit violemment vers la gauche, car je venais de recevoir une gifle tellement puissante que je perdis toute sensation ma joue.
— Putain ! Qu'est-ce que ça fait du bien ! s'exclama ma châtieuse d'un air satisfait.

Rock Hard, Love HarderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant