21. La maison des cris, des adieux, de la mort

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Précédemment dans Bad Feelings

« Et tu ne manqueras à personne » me chuchote une voix similaire à celle de Cara. Je regarde mes jointures rougies et je pense à elle, sûrement allongée à l'infirmerie. Miller a raison. J'ai recommencé. Je n'ai pas retenu la leçon. Je ne retiens rien. Je fouille rapidement dans mon sac à dos et retire de la petite poche intérieur, un joint. Je m'apprête à l'allumer quand :

- Allanah ?

Je me raidis en reconnaissant mon prénom. Madame Lopez continue d'abaisser sa vitre ; elle a arrêté sa Mercedes juste à mon niveau.

- Oh bonjour madame Lopez, dis-je d'une voix monotone.

Ces deux dernières semaines, j'ai séché énormément de cours ; et encore plus ceux d'Espagnol car j'ai pleinement conscience de l'attention particulière et étrange que me porte cette femme. Elle fixe mes mains et tout à coup gêné, je plonge mon briquet et le bédo dans la poche arrière de ma salopette.

- Ça fait longtemps, me rattrapé-je.
- Monte.

J'observe ce visage qui m'avait au premier abord semblé familier et poussé par je ne sais quoi, je m'exécute. Je fais le tour du véhicule et prend place. Aussitôt, une suave odeur s'infiltre dans mes narines. Elle hausse sa vitre, nous enfermant dans le petit habitacle et se tourne vers moi ; ses yeux m'étudient longuement et dans un mouvement qui me paraît à la ralenti, ses lèvres bougent.

- Dis-moi ce qui ne va pas.

Et tout remonta. Le poison qui coulait dans mes veines depuis tout ce temps.

- Tout, soufflé-je, le cœur dégoulinant à nouveau.

Elle fut la première qui sut, elle fut la première à qui vit à quel point je m'étais détruite.

- Mon cœur pleure, il saigne. Emmenez-moi loin d'ici.

Sans un mot, elle fit gronder le moteur. Et je partis avec cette inconnue, loin de savoir qu'elle était l'un de mes démons, l'origine même de mes constructions fragilisés, l'essence de mon instabilité.

*

Allanah

Dans la vie, il faut accepter de vivre avec l'idée que les gens vous décevront toujours. Petite ou grande déception, peu importe ça arrivera, c'est ce qui nous rend humain, on se trompe, on fait des erreurs. Je le sais très bien car j'en ai fait pas mal. J'ai fait beaucoup de choses pas très sympa. J'ai été victime mais avant ça, j'ai aussi été l'agresseuse. J'ai joué à ce jeu de rôles, de popularité, ce jeu auquel nous sommes obligés de jouer au lycée. Tu ne veux pas d'étiquettes ? Eh bien, on te la collera quand même sur le front. L'adolescence est ce moment où nous nous affirmons, où nous décidons ou non de faire partie de groupes, où nous décidons de promette appartenance à tel ou tel bande. Au début, à Tong High School, j'étais la jolie nouvelle de première, aujourd'hui, nous sommes au second trimestre de terminale et beaucoup me qualifieront de jolie pute. Et pourtant je n'ai couché qu'avec deux garçons depuis que je suis arrivée. Ces dernières semaines, je pense avoir été surnommé « la salope camée » non, je pense pas en fait, j'ai entendu une seconde en parler avec ses copines alors que j'étais aux toilettes.

Au début, voyez-vous, j'ai essayé d'arracher l'étiquette qu'on me collait mais très vite elle a été remplacé. Et chaque semaine, j'en recevais une, si bien que j'ai arrêté de me battre, je les ai laissé m'étiqueter, m'en épingler sur le bras, sur le front, sur le corps. Et j'ai cessé de les lire. Au fond, je m'en fous d'elles, même si ça fait mal, ça ne m'atteindra jamais comme lui peut m'atteindre.

Burning Desire {Zayn Malik}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant