1 : Alexandra

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À tâtons, je ramasse mon boxer. Encore une fois, je ne l'aurais pas porté longtemps, et pourtant, je m'escrime à mettre un truc en dentelle à chaque fois. L'habitacle du 4X4 est plongé dans un noir presque total et c'est avec difficulté que je trie mes affaires des siennes.

Sans un mot, comme d'habitude, nous nous rhabillons rapidement. Qu'est-ce que nous aurions à nous raconter ?

Je ne vais pas lui dire que c'était bien, je ne le recontacterais pas si ce n'était pas le cas. Heureusement que je ne suis pas arrivée à un tel point de misère sexuelle. Dans vingt ans peut-être, ou trente, quand mes formes ne seront plus aussi attrayantes, et encore, ce ne sont pas mes seules qualités. Enfin, j'espère ! Je me rassure comme je peux.

Nous retournons à l'avant du véhicule dans une habitude bien huilée.

Toujours dans le silence, il démarre et quitte l'abri des chênes sous lesquels il avait caché sa voiture. Il n'est pas du genre pudique, j'imagine qu'il a fait l'effort de la planquer pour que je ne fasse pas de remarques. Même si avec cette nuit noire printanière, nous aurions pu nous exposer au sommet d'une colline sans que personne ne nous voie. Néanmoins, j'apprécie le geste.

Quand il s'arrête non loin de chez moi, il m'embrasse avec cet air espiègle qui me donne autant envie de le déshabiller que de le frapper. Je ne sais pas pourquoi il se donne cette peine, il est tellement distant pour tout le reste. Je profite de ce baiser passionné avant de me détacher de ses lèvres avec presque un goût de regret.

— À une prochaine, lancé-je avant de fermer la portière.

— Fais signe quand tu veux, m'invite-t-il à travers la vitre qu'il a ouverte exprès.

Je ricane à cette remarque, car je sais que je vais attendre longtemps espérant que ce soit lui qui me recontacte. Sauf qu'il agit de la même manière et il peut se passer des mois avant que nous nous retrouvions.

Quand je perds patience, il m'arrive de faire exprès d'être sur son chemin par pur « hasard ». Ce qui m'évite de lui donner la satisfaction de me voir revenir vers lui. Une façon de ne pas trop malmener mon égo. Je ne sais pas s'il est dupe ou si ça l'arrange.

C'est fatiguée que je rentre dans la petite maison où je vis. Tom a été exigeant ce soir, c'était à lui « d'imposer » ses règles. Chacun notre tour nous prenons les commandes du programme de nos échanges torrides. C'est le seul avec qui c'est comme ça. Les autres ont plutôt tendance à se plier en quatre pour me faire plaisir, sinon ils savent que je ne les rappellerais pas. Mais avec Tom c'est toujours une fois sur deux, il aime jouer et dominer. Et il aime aussi que je sois en perpétuel désaccord avec lui. Parfois, j'ai l'impression qu'il propose des choses simplement pour que je les refuse. Je crois que c'est ce qui l'excite.

Quatre ans qu'on joue à ce petit jeu. C'est mon plan cul qui dure depuis le plus longtemps et je crois que je suis le sien aussi. Je préfère voir le côté flatteur et m'imagine que c'est parce que je lui plais et non parce que je suis la seule à rester célibataire.

Je me gifle mentalement pour arrêter de penser à tout ça. Le but c'est de ne pas se prendre la tête, mais je réfléchis trop.

Après m'être déshabillée et fait un saut rapide sous la douche, je me saisis d'une tablette de chocolat neuve que je vais finir. Je me déculpabilise en pensant aux calories que j'ai brulées ce soir et vais dans mon lit me perdre sur YouTube pendant deux heures, avant de prendre un repos mérité.

Je ne suis pas encore complètement sortie de la léthargie du sommeil en arrivant au travail.

Ce matin, je suis partie en retard, pourtant je ne m'étais pas couchée si tard que ça. C'est quand même triste à vingt-cinq ans de ne pas tenir le choc. Je suis parfois nostalgique de mes années de lycée, où peu importe les nuits blanches et les fêtes, j'étais toujours en forme.

Ne Jamais Dire JamaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant