Mon téléphone se mit à sonner lorsque j'entrai dans ma chambre, après avoir pris une douche et pansé ma plaie à l'épaule.
Serviette enroulée autour de ma taille, je me dirigeai vers mon lit et attrapai le combiné sur ma table de chevet, avant de m'asseoir. Il s'agissait d'Elena.
Cela faisait maintenant cinq jours que je ne lui avais pas parlé, n'étant pas sorti de chez moi et évitant tout contact avec l'extérieur. J'ignorais ses appels, pas parce que je ne voulais pas parler avec elle – à vrai dire je mourais d'envie d'entendre le son de sa voix –, mais parce que je ne savais pas quoi lui dire, comment lui expliquer. C'était lâche, je le savais bien... mais j'essayais de retarder l'échéance le plus possible.
Je ne voulais pas la décevoir, c'était la dernière chose que je souhaitais, pourtant, en lui racontant tout ce qui était arrivé samedi – les détails de ce trafic de merde qui avait tellement mal tourné –, je le ferais irrévocablement.
Leurs visages me hantaient toujours, tout comme le son de cette balle qui avait fendu l'air pour venir se loger dans mon épaule. Je revoyais également la tête du salopard qui m'avait tiré dessus, c'était inéluctable. À peine fermais-je les yeux, que tout tournait en boucle dans ma tête.
— Tu ne décroches pas ? demanda Tanis en me faisant sursauter.
Ayant laissé ma porte entrebâillée, elle se tenait appuyée contre le battant, me contemplant, un air triste collé sur son visage.
Je raccrochai et éteignis mon portable, ayant vraiment marre de l'entendre sonner. J'avais l'impression de devenir fou à chaque fois que cette satanée sonnerie envahissait la pièce.
— C'était Elena ?
— Ça ne te regarde pas.
Et c'était bien le cas, ce n'étaient pas ses affaires et je ne lui avais rien demandé.
— Ferme la porte, lui ordonnai-je en me couchant et en lui tournant le dos.
Je ne voulais voir personne, n'étant vraiment pas d'humeur.
Depuis samedi, après tout ce qui était arrivé, je n'étais plus moi-même. Quelque chose à l'intérieur de moi était mort, sans doute le peu d'innocence qu'il me restait encore. On me l'avait volé au moment où j'avais vu Jay Santos planter une balle en plein crâne à Alvaro.
Ces images ne s'effaceraient jamais de ma mémoire.
J'en avais vu et fait des choses, je n'étais pas un enfant de cœur et jamais je n'avais prétendu l'être. Pourtant, ce bain de sang avait changé quelque chose en moi. Et à chaque fois que ces images revenaient me hanter, je sentais une telle haine déferler en moi, que j'avais même peur de ce que je pourrais faire.
J'avais tous les symptômes d'un trouble de stress post-traumatique, je le savais. Mon corps était en état de vigilance permanente et redoublait d'efforts lorsque tous les événements me revenaient en pleine poire si un son, une odeur ou autre me rappelait l'un de ces moments vécus. Ça prendrait du temps avant que mon corps ainsi que mon esprit comprennent que je n'étais plus en danger, mais dans l'immédiat, je voulais simplement cesser de revoir ces images, ayant l'impression que j'allais devenir dingue.
Dans notre société, un homme était censé tout endurer sans broncher, comme s'il était obligé de supporter le poids du monde sur ses épaules. Pas de sentiments, pas d'émotions, un homme ne pleurait jamais. Pourtant, et même si cela pouvait être humiliant, j'avais envie de pleurer depuis ce jour, à cause de tout ce que j'avais vu. Mais... je ne l'avais pas fait, ayant l'impression d'être égoïste en m'apitoyant sur mon sort, alors que j'étais bel et bien en vie, pas comme Sofia ou Santiago qui désormais étaient six pieds sous terre.
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Paradis Brisé (Tome 2 de Paradis Secret) © [TRILOGIE SOUS CONTRAT D'ÉDITION]
RomanceLorsque la confiance est brisée, il est vraiment difficile de la récupérer. Se sentant trahie, Elie a décidé de rompre avec le seul garçon qu'elle n'ait jamais aimé. Pourtant, bien qu'elle s'efforce de l'oublier, elle n'arrive pas à le laisser part...