20. Fragment III, partie I - Moscou, année 2020

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En cours, tout le monde parle de Yulia. Je ne l'ai encore jamais vue, mais je serai curieux de savoir à quoi elle ressemble. Les filles de ma classe la dénigrent, les garçons l'idolâtrent. Apparemment, elle aurait un physique à rendre envieuse Aphrodite. Je demande à voir ça ! Même si au fond de moi, je suis davantage préoccupé par la matière noire qui recouvre notre univers plutôt que par la gent féminine...

Mes deux amis Boris et Igor insistent pour me la montrer lorsque le cours d'astrophysique sera terminé. D'un air dédaigneux puis suivi d'un soupir, je finis par accepter.

Heureusement, ils savent où la trouver. Elle est étudiante en deuxième année de biologie alors quand monsieur Travinskov achève son dernier discours sur les lois de Newton, mes deux camarades s'empressent de quitter l'amphithéâtre afin de ne pas rater la sortie des classes. Je suis sûr que si je leur demande ce qu'ils ont retenu du cours d'aujourd'hui, ils ne sauraient me dire parce qu'ils passent leur temps à rêvasser sur cette fille.

Sur le chemin, je suis dans mes réflexions comme d'habitude. Je pense à notre univers. Il est tellement passionnant et j'ai la chance d'avoir les facultés intellectuelles pour l'appréhender convenablement. D'ailleurs, je ne me lasse pas de l'étudier. Je veux faire partie des plus grands scientifiques, ceux qui révolutionnent le monde comme Newton, ou encore Galilée et Einstein. Ces gens-là étaient vraiment incroyables !

Je sors de mes pensées et reviens à la réalité.

— Je ne comprends pas pourquoi vous perdez votre temps à observer une fille si ce n'est pour rien faire.

— C'est juste pour le plaisir des yeux, me répond Igor.

— Pour le plaisir des yeux ? Je répète ahuri.

— Oui Dimitri, pour le plaisir des yeux ! Maintiens Boris.

— On sait tous que tu préfères regarder tes notes prises en cours, ajoute Igor, mais parfois tu devrais un peu lever les yeux !

Je n'en reviens pas, mes amis me font une pluie de reproches et sans vergogne. Ils me vexent, mais je ne le leur montre pas.

Nous arrivons enfin devant le bâtiment où les élèves en deuxième année de biologie passent la moitié de leur temps. Soudain, mes camarades deviennent aussi attentifs qu'un soldat pendant son tour de garde. Mais finalement, ils me font rire et je trouve ça plutôt divertissant.

— La voilà ! s'écrit Boris.

— Regarde-moi cette beauté ! Enchéri Igor.

Je suis du regard le doigt de mon camarade qui pointe discrètement vers la jeune fille quand soudainement le temps s'arrête. J'entends les pulsations de mon cœur gronder comme un orage d'été après une nuit de canicule. Il bat le rythme tel un percussionniste sur un tambour. Il tape si fort que je le sens pousser ma cage thoracique vers l'extérieur.

Je ne la lâche pas des yeux, car je suis hypnotisé, Boris et Igor ont raison, c'est certainement la plus belle femme que j'ai jamais vue de ma vie. Mince ! Que m'arrive-t-il ?

Son charme n'a d'égal que sa beauté angélique dessinée et forgée par la main du Tout-Puissant en personne. Son sourire naturel reflète une humilité innée, fruit d'une éducation probablement simple et de bonnes valeurs. Son allure, aussi innocente que fragile semble légère comme l'air. Ses longs cheveux, délicatement ondulés — châtains clairs cendrés, aux reflets de miels — sont en osmose avec ses yeux couleur vert d'eau, translucides. Sa peau est pâle, mais paraît si douce. Je suis quasiment bouche bée. C'est un ange. Elle n'est pas humaine, ce n'est pas possible. Autour de moi, c'est le silence, Boris et Igor m'adressent la parole pourtant je ne les perçois plus. Le temps s'est arrêté l'espace de quelques secondes alors qu'il n'y a plus qu'elle et moi...

La vie aux mille visages (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant