La vie aux mille visages (Tome 1)

31. Fragment V - Lettre à Raquel, France, octobre 2115

« Chère Raquel,

Je me rappelle de toi, discrète, timide, tu semblais insaisissable, jusqu'au jour où, après une dure journée de labeur, tu t'es assise à côté de moi.

Tu partais alors tous les soirs après le service, la nuit t'attendait ailleurs...

Pourtant, ce soir-là, tu es restée le temps d'un verre, de quelques mots, et là mon univers s'est arrêté.

Je me suis tourné vers toi, car j'ai senti ta douce et furtive présence alors que mon cœur s'emballait. Tout ce qui se trouvait autour de moi s'était subitement envolé, mais je pouvais tout de même sentir les regards de mes collègues envieux, parce que tout le monde te considérait, tout le monde, sauf moi...

Lorsque tu m'as lancé ce premier regard, j'ai tout de suite su que tu m'étais destiné comme si une Force supérieure nous avait réunies ce soir-là afin de nous rencontrer. Et puis, ton tatouage sur le poignet représentant un triangle dans un cercle avec en son centre deux mains entrelacées, étrangement semblable au mien. Quelle coïncidence incroyable ! J'ose croire que dans cette vie, rien n'arrive de manière fortuite et que tout arrive pour une raison.

Que je suis sot de penser ça.

C'est ridicule, je le sais ; plusieurs milliers de kilomètres nous séparent maintenant et pourtant aucun mot, aucune phrase ne pourrait décrire à quel point tu me manques. Nous nous découvrons à peine, mais c'est comme si je te connaissais depuis toujours, comme si une partie de moi était toi, comme si en partant, tu avais pris mon autre moi avec toi...

Je ne rêve que de te retrouver.

Je t'avais promis de t'écrire à mon retour en France. J'espère que tu recevras bien ce message.

À Paris, il fait une chaleur écrasante, mais nous appréhendons l'hiver qui approche à grands pas.

J'espère avoir de tes nouvelles vite, car je ne peux m'empêcher de penser à toi.

Prends soin de toi.

Ton cher et tendre Adam. »