PIERRE DE FEU

M. Lesouple le retour (beaucoup de retour je sais)

Capucine est allée voir Fatima hier après-midi. Elle ne lui a toujours pas avoué qu'elle vivait chez Abdallah depuis plus d'un mois. La jeune Égyptienne est au courant pour son entreprise de photos, mais elle ignore que c'est le chanteur qui a financé le projet. Elle sait en revanche que Capucine travaille régulièrement avec lui.

Dans son bureau, ce matin-là, la jeune photographe, occupée à trier des photos, ne peut s'empêcher de culpabiliser :

"Je devrais tout avouer à Fatima, c'est ma meilleure amie. Mais j'ai tellement peur qu'elle me juge... pour avoir été naïve de croire en l'amitié d'Abdallah, pour avoir accepté son aide à monter ma société et maintenant pour vivre chez lui alors que je sais pertinemment ce qu'il attend de moi..."

On sonne à la porte de son bureau.

- Oui, entrez !

- Bonjour Capucine !

Si elle s'attendait à cela...

- Bonjour monsieur...

Elle ne sait comment réagir. Face à elle, M. Lesouple...

Il fait le tour de la pièce de son regard :

- Ça va, tu es bien installée. J'ai entendu dire récemment qu'une nouvelle photographe, une Française, avait ouvert son bureau il y a quelques mois. J'avais comme un pressentiment que c'était toi. En voyant la petite pancarte à l'entrée, plus de doute ! Donc c'était ça ton fameux poste en Égypte. Je vois que tu as fini par adopter ce pays toi aussi. Moins facile ici pour une femme cependant... surtout jeune et seule... Tu aurais pu me le dire que tu cherchais à ouvrir ton propre truc, je ne crains pas la concurrence, tu sais...

Il lui sourit.

- J'avais peur que vous me voyiez un peu comme une ingrate... Vous m'avez tout appris...

- Je t'ai pris en apprentissage, c'était mon rôle. Je cherche à ouvrir mon bureau moi aussi ici, c'est d'ailleurs en parlant de ça avec un ami que j'ai appris pour la photographe française installée au Caire. Il disait en rigolant que j'aurais de la concurrence.

- Je fais surtout des photos de mariages et d'événements familiaux, c'est mon principal revenu... un peu de photos et vidéos de musique d'artistes locaux...

- Donc, pas trop de concurrence à craindre en effet. Je ne suis pas du tout dans le créneau photos des familles... toujours principalement dans la publicité, je travaille encore pour Gamal, et un peu dans la musique aussi. Mais j'aimerais néanmoins avoir mon propre bureau en ville comme avant à Paris et comme toi maintenant, d'abord parce que je recherche toujours un assistant, et aussi pour les autres clients que je traite habituellement chez moi. J'en ai marre d'avoir tous mes dossiers professionnels à la maison au milieu de ma vie personnelle. D'autant plus que Claudine attend un bébé...

- Ah ? Mes félicitations alors, monsieur.

- Je te remercie Capucine...

Il se racle la gorge et la fixe :

- Tu sais, je n'ai plus de nouvelles d'Abdallah Elgohari, le chanteur... Il a apparemment renoncé à mon travail... Ce ne serait pas pour le tien par hasard ? 

Elle devait bien se doutait qu'il le lui demanderait :

- Euh... oui, en effet, il travaille avec moi. Mais c'est lui qui a voulu, je ne cherchais pas à vous prendre un de vos clients !

- Pas la peine de te défendre, je me doute très bien que c'est lui qui a voulu, ça ne me surprend pas du tout ! Sous ses airs de "M. Le bon pote qui fait semblant de ne plus te courir après", je l'ai très bien cerné ! Je ne serais même pas étonné d'apprendre qu'il t'a forcé la main pour que tu ne restes pas avec moi et qu'il puisse recommencer à te séduire...