Chapitre 30

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Qu'est-ce qu'était la pudeur ? Je n'en avais pas la moindre idée, en tout cas lorsqu'il s'agissait de mon petit ami, avec lui je n'avais aucun tabou, alors ce fut presque naturellement que je posai en toute discrétion ma main sur sa cuisse. Mes doigts effleurèrent avec la plus grande délicatesse le tissu noir de son pantalon, faisant tendre tous ses muscles, alors que mon père et moi étions en pleine conversation et que ma mère et ma sœur épiaient les autres invités.

- Les petits changements que tu as fait lorsque tu as commencé à travailler à la Corp ont été très fructueux, admit Céthia en hochant la tête, lui qui n'avait pas vraiment cru en mes capacités au début. Notre chiffre d'affaires a augmenté de vingt pour cent et nos dépenses diminué de trente pour cent. Tu ne rigolais pas lorsque tu m'as parlé de gagner des guerres à tes côtés.

- C'était une promesse et comme tu le sais, je n'ai qu'une seule parole.

J'esquissai un sourire rempli de fierté à mon géniteur et il en fit de même, se rendant compte que plus je vieillissais plus je me rapprochais que celle qu'il espérait que je devienne. Ma présence le captivait et ce fut ce que je voulais, cependant, lorsque ses yeux bleus vinrent se poser sur celui qui était assis juste à côté de moi, les battements de mon cœur se mirent à accélérer.

- Jeon, dit mon père avant que je ne déglutisse avec difficulté. N'est-elle pas impressionnante ? Ma fille ?

Ne voulant en aucun cas éveiller les soupçons de Céthia, je tournai lentement la tête afin de poser mes yeux sur mon petit ami, espérant de tous mes forces qu'il ne ferait pas la bêtise de chercher mon regard afin de savoir quoi répondre. J'espérai le temps d'un instant que Jungkook puisse discuter avec mon père sans que je ne fasse quoi que ce soit, car aucun homme ne cherchait quelqu'un d'autre que son interlocuteur du regard s'il n'avait rien à cacher.

À vrai dire, mon géniteur, aussi intelligent qu'il était, aurait pu trouver le pot aux roses si Jeon m'avait regardé ne serait-ce qu'une fraction de seconde. Après tout, j'avais quand même insisté pour qu'un simple employé s'asseye à table avec ma famille alors un simple regard aurait suffit à mon père pour faire le rapprochement, néanmoins, je fus soulagée lorsque Jungkook prit la parole sans aucune hésitation.

- Mademoiselle DeLayne travaille d'arrache-pied. Le travail paye toujours.

- Vous avez bien raison ! S'exclama Céthia avant de poser ses yeux sur son assiette, recommençant à manger. Je songe de plus en plus à lui donner ses trente-quatre pour cent. Faire d'elle l'actionnaire majoritaire de DeLayne Corporation est une possibilité qui ne quitte plus mon esprit.

- Tu parles comme si je ne pouvais pas t'entendre. Tu peux me le dire. Que tu es fier de moi.

Mon père ricana en tapant gentiment ma main gauche, celle qui se trouvait sur la table, alors que l'autre commença à frôler l'entrejambe de mon beau garde du corps. Je le connaissais d'ailleurs bien assez pour savoir, sans même le regarder, que ses joues prenaient une couleur rosées, et cette unique pense fut assez excitante pour que je mordille délicatement ma lèvre inférieure.

- Je dois aller aux toilettes, dis-je en pressant subitement la bosse qui se formait entre les cuisses de mon petit ami.

Mon père me fit un petit mouvement de main afin de me donner son accord pour sortir de table, puis je me levai de ma chaise, posant momentanément mes yeux sur Jungkook. Une fine couche de sueur faisait faiblement luire son front alors qu'il était comme figé, ne regardant moi, ni mon père, ni personne, rien que le vide.

- Jeon ! S'écria Céthia pour faire sursauter le garçon dont il était question.

- Ou-... Oui monsieur, souffla-t-il avec une respiration non loin d'être haletante.

- Êtes-vous le garde du corps de ma fille ou non ? S'enquit mon géniteur avant de marquer une pause, laissant le noiraud faire un signe positif de la tête. Alors pourquoi vous ne vous levez pas ? Vous devez la suivre comme son ombre. Faites sérieusement votre boulot.

Celui que j'aimais, frustré, se leva d'un bond, s'inclinant poliment avant de me suivre de près. Nous nous mîmes à slalomer habilement entre les tables, Jungkook regardant naturellement où je mettais les pieds tant il me savait maladroite, alors que je laissais paraître mon beau et faux sourire. L'idée de pouvoir satisfaire mon petit ami était bien tout ce occupait mon esprit à ce moment-là, et je fus surexcitée lorsque nous arrivâmes devant les sanitaires, où plusieurs personnes allaient et venaient.

- J'entre et tu me rejoins dans cinq minutes, chuchota-je en tournant ta tête sur la droite.

- Vas-y.

La courte réponse de Jeon me montra qu'il s'impatientait et ce fut avec un sourire en coin que je poussai la grande porte, plusieurs autres portes séparant les quelques WC du reste de la pièce. Une fillette et ce que je présumais être sa mère quittèrent la petite salle, me laissant avant que je ne me mette à contempler mon reflet dans le large miroir qui se trouvait au-dessus des lavabos.

Je me croyais seule et ce fut le cas jusqu'à ce que la porte s'ouvrir à nouveau. J'emprisonnai automatiquement ma lèvre inférieure entre mes dents, pensant qu'il n'était plus qu'une question de temps pour que les mains de Jungkook ne touche, quand tout à coup, je vis dans la glace le reflet de cet homme qui me répugnait, me retournant directement pour lui faire face.

- Tiens, tiens. Mon cœur... Murmura-t-il en me regardant de haut en bas. Tu es de toute beauté.

- Ne me parle pas et ne me regarde pas, Samuel.

J'allais le contourner, quand soudain, agressivement, il me bloqua entre lui et la paillasse. Ce fut alors que mon cœur et ma respiration commençèrent à s'emballer. J'avais peur lorsqu'il était près de moi, de la peur comme seul lui savait m'en inspirer. Je sentais les larmes me monter aux yeux alors que je fixais ses pupilles dilatées, sentant sa jambe se glisser entre mes cuisses et ses doigts effleurer mes hanches.

Je voulais crier, mais comme autrefois, ce fut là encore paralysée par l'effroi. Samuel n'avait décidément aucune crainte. Tous ses invités dont mon père se trouvaient de l'autre côté de la porte et pourtant, il s'approcha tout de même de moi tel le prédateur qu'il était, prêt à me toucher comme il l'avait fait tant de fois, prêt à me toucher force.

Comme toujours, mon souffle se coupa lorsque je sentis ses mains se poser sur moi, pressant soudainement mes fesses pour me rapprocher agressivement de lui. Mon corps était celui d'une statut, stoïque, et mon âme celle un être ayant vécu l'invivable, totalement mutilée. Mon bourreau était au plus près de moi et mes faiblesses refirent surface, l'abandon d'espoir me gagnant même si cela ne me ressemblait pas. Non, je n'étais pas faible, mais les horribles souvenirs que je gardais de lui me rendaient ainsi, pleinement démunie.

Ce jour-là, Samuel Valentine aurait pu me violer une énième fois sans même que je ne puisse me défendre, cependant, il fut stoppé juste à tant. Cet homme qui aurait pu être mon père s'éloigna de moi aussitôt que l'entrée de la pièce s'ouvrit, ma tête se tournant aussitôt vers la porte afin de voir le visage de mon ange gardien. Cette personne venait de sauver mon âme déjà bien meurtrie et lorsque je vis qu'il s'agissait de Jungkook, ma respiration reprit son cours.

- Se-... Mademoiselle DeLayne, rectifia-t-il en remarquant que nous n'étions pas seuls.

- Allons-y Jeon. Je veux rentrer chez moi.

Pourquoi me taisais-je, demanderaient certains. C'était simple. Je l'avais promis à ma mère. À quatorze ans, je lui avais promis que j'emporterais ce secret avec moi, dans ma tombe.

𝐌𝐚𝐧𝐢𝐚𝐜 - 𝐉𝐄𝐎𝐍 𝐉𝐔𝐍𝐆𝐊𝐎𝐎𝐊 [𝐭𝐞𝐫𝐦𝐢𝐧𝐞́] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant