Elias Bridgestone
Le blond courait dans la forêt sous sa forme humaine. Son sac à dos devait peser une douzaine de kilos mais il n'était absolument pas gêné par la charge grâce à sa force de lycanthrope.
Éden le suivait de près, aussi rapide, si ce n'est même plus, que lui. Le paysage se succédait depuis déjà huit heures. Les deux blonds s'étaient arrêtés quelques minutes pour se reposer. Ils avaient beau être bien plus puissant que les hommes et avoir une force physique qui devait être dix fois supérieure aux autres, ils n'étaient pas invincibles. Les loups comptaient peut-être parmi les créatures les plus majestueuses et les plus dangereuses grâce à leur musculature mais il existait quand même un point de rupture que les deux blonds connaissaient parfaitement.
Les deux blonds s'arrêtèrent aux nouvelles fois pour se reposer et cette fois-ci, ils préparèrent un repas. Elias faisait griller de la viande séchée, qui était alors devenue un peu près mangeable. Puis ils avaient grignoté des biscuits secs à la fin du repas. Celui-ci bien que frugal avait réussi à les revigorer. Alors le frère et la sœur était reparti en trottinant.
La nuit commençait à tomber et il approchait peu à peu de leur destination finale. Le voyage avait été grandement réduit par le fait qu'il pouvait courir sur de très longues distances.
La vie nocturne prenait petit à petit vie. Les chouettes hululaient. Les chauves-souris chassaient. Et les loups les accompagnaient. Ils devaient les considérer comme des compatriotes puisque leurs odeurs étaient assez similaires.
Ces heures en compagnie des animaux passèrent à une vitesse folle. Quand, Elias commença à reconnaitre chaque arbre qui n'avait pas changé depuis une douzaine d'années, il comprit qu'il n'était plus très loin. Le manoir familial qui abritait, il y a longtemps, la meute à laquelle appartenaient Éden et Elias. Cette époque où, il n'était encore pas devenu des Malévole. Cette époque où, son cœur n'était pas plus qu'un trou béant. Cette époque où, ses parents étaient encore en vie.
Elias était surement le plus marqué par la tragédie. Il était le plus âgé des loups ayant survécu et celui qui avait dû s'occuper de la meute alors qu'il était en pleine adolescence. Ces souvenirs de ses parents et de cette nuit-là étaient loin d'être flous, contrairement aux autres survivants.
Le manoir se profila à l'horizon, une de ses trois hautes tours n'avait pas brulé et surplombait la forêt. Même au plus profond de la nuit, le manoir était visible et dominait tout ce qui l'entourait.
Elias se souvenait encore de la fumée qui s'était échappée des deux autres tours. Il se souvient, de la nuit où il avait vu comme en plein jour à cause de l'incendie. Dès potron-minet, de ce jour-là, rien n'aurait pu lui faire penser qu'il allait se faire attaquer quelques heures plus tard. La forêt, de cette fin de printemps s'était éveillée, calme et reposante.
Les oiseaux nouveau-nés s'étaient mis à chanter, inconscient du danger. Au milieu de l'après-midi, le soleil devenu étouffant était à son apogée. La meute avait donc décidé d'aller se baigner dans le petit lac près du manoir. En fait, il s'agit plus d'un étang avec de la vase au fond et des têtards qui venaient leur téter les pieds. Les nénuphars et leurs feuilles servaient aux enfants de blague en tout genre.
Le clan était loin d'être dangereux, il avait tout comme les humains, oublié les massacres qu'avait commis leur aïeul des siècles plus tôt. La rancœur qu'il y avait toujours eu, sans que personne ne sache pourquoi, entre les deux clans avait disparu depuis quelques générations pour les loups.
Elias serra les mains en se remémorant ses souvenirs, il avait été trop candide puisque la rancœur des paroissiens, elle, était loin d'avoir disparu. Il avait peaufiné l'attaque pendant des années, il avait fait exprès d'attendre la lune rousse, pour mettre son plan à exécution. Il ne comptait pas s'arrêter en si bon chemin et ce n'était très certainement pas Valentin, en tant que sorcière de malheur qui allait l'arrêter.
Il n'avait plus la liste des décès qu'il avait méthodiquement conçu mais il n'en avait rien à faire puisque désormais sa cible serait le brun qui avait osé le trahir et le dénoncer. Il n'avait jamais eu l'intention de lui faire du mal à lui et sa compagne puisqu'il ne souhaitait pas éradiquer les surnaturelles. Mais désormais tous ceux qui s'opposeraient à lui, seraient ses cibles, quelles que soient leurs natures.
Elias sortit de ses lugubres pensées lorsque lui et sa sœur arrivèrent au manoir familial. La porte d'entrée qui autrefois était composée de bois noble et de vitraux de couleur était devenue une masse sombre brinquebalante.
Heureusement pour eux, l'incendie n'avait pas atteint une partie de l'aile est. Le blond, trouva cela étonnant, il n'était jamais revenu et avait toujours pensé qu'il ne restait aucun lien physique avec son ancienne vie.
Les deux jeunes gens prirent chacun une chambre de libre et ils s'occupèrent de les nettoyer de fond en comble. Une poussière impressionnante s'était installée sur le sol et les meubles. Celle-ci aurait fait tousser n'importe quelle personne même celle avec les poumons les mieux conservés. Le ménage des pièces qu'ils allaient habiter dura jusqu'à la fin de la nuit. Ils rangèrent par la suite les affaires qu'ils avaient réussi à amener avec eux.
Le soleil frôlait l'horizon faisant de leurs ombres des monstres d'une hauteur gigantesque. Alors que l'astre commençait sa course dans leur partie de l'hémisphère, les deux blonds s'approchaient du tombeau de leurs proches. Ils portaient tous deux un bouquet de fleurs, qu'ils avaient pris le temps de confectionner quelque temps plus tôt.
Le caveau familial était un petit édifice au fond de la propriété. S'il n'avait pas été aussi fastueux, on aurait pu penser qu'il s'agissait d'un abri de jardin.
Les deux blonds contournèrent le petit bâtiment et commencèrent à grimper la pente du début de la chaine de montagne. Ils ne mirent pas longtemps à arriver jusqu'à un plateau où il avait une vue sur toute la forêt qui s'étendait jusqu'à l'horizon.
Deux tombes étaient plantées au bord du plateau. Des croix de fortunes avaient planté devant deux gros tas de terres. Ces derniers avaient fini par être recouverts d'une jolie herbe verte et luxuriante.
Elias déposa son bouquet devant la tombe de sa mère et Éden fit de même devant celle de leur père. Les minutes s'étirent alors que le vent emmêlait leurs cheveux. Le silence calme donnait un air de rêve à cette nouvelle rencontre.
Des larmes commencèrent à tomber des yeux du plus âgé. Il se laissa tomber à genoux en laissant échapper un cri de souffrance qui résonna dans les montagnes derrière eux. Éden entoura ses épaules dans une douce étreinte puis elle chuchota contre son oreille :
—Tout va bien. Je te promets que tout ira mieux.
Elias posa sa main sur un des bras de sa sœur puis profita de sa présence pour guérir le trou béant qu'il s'était ouvert de nouveau dans sa poitrine.
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Est Sauvage
WerewolfDans l'Est Sauvage un petit village devient la cible de redoutables créatures nocturnes. Chaque nuit, le cadavre d'un paroissien est retrouvé et tous se retrouvent déroutés par ces attaques qui semblent venir de nulle part. Mais lorsqu'une nuit Rudy...