CHAPITRE QUARANTE-HUIT

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CAMERON

    J'aime Emery. Je l'aime comme un fou. Je pourrais faire n'importe quoi pour elle. Je serais même prêt à mourir si cela lui permettait d'obtenir tout ce qu'elle désire dans la vie. Seulement, il y a certains moments où elle me tape sur le système, où je voudrais lui échapper. Surtout depuis quelques temps. 

     Notre relation est particulièrement tendue depuis que j'ai failli tuer un mec devant ses yeux. La soirée du feu de camp nous a sérieusement amochée. Je me sens comme une merde d'avoir agi comme un fou furieux et j'ai l'impression qu'elle est toujours distante avec moi. Chaque fois que je me trouve près d'elle, je ne sais pas comment me comporter et je déteste ça. Je ne devrais pas me sentir aussi mal à l'aise en sa présence. Et puis, il y a aussi les questions qu'elle se borne à me poser depuis quelques jours. Elle ne cesse de m'interroger sur mon père. Ça ne me plaît pas du tout. Je n'aime pas parler de lui. Je ne veux pas le faire et surtout pas avec elle. Mon passé ne la regarde pas. 

     Malheureusement, Emery est du genre à toujours vouloir tout savoir. En ce moment, j'ai la sensation qu'elle passe son temps à me cuisiner. Je sens bien que quelque chose cloche. Sa curiosité est différente de d'habitude. Elle tente d'être subtile mais ça ne prend pas avec moi. Je sais qu'elle me cache quelque chose et que cela a à voir avec mon passé. S'il y a bien un sujet que je ne veux pas aborder avec elle, c'est celui-ci. Elle n'a pas besoin de savoir ce qu'il m'est arrivé. Elle n'a pas le droit d'exiger une vérité qui ne la concerne pas. Je ne la laisserais pas me berner en jouant de mes sentiments pour obtenir ce qu'elle veut. Ses interrogatoires ne prennent pas sur moi. 

     Au contraire, ils m'oppressent. Chaque fois qu'elle me pose des questions sur mon père ou sur mon enfance, j'ai envie de la faire taire. Je ne supporte pas de devoir faire bonne figure alors que je refuse de lui livrer certains détails de ma vie. J'aimerais pouvoir clore le sujet gentiment chaque fois qu'elle l'aborde mais je ne sais pas quoi faire quand il est question de mon père, de ma vie avant sa mort. J'ai encaissé tellement de choses depuis cette époque-là que je ne sais plus faire autrement que de tout garder en moi. Je considère que cette partie de ma vie ne regarde personne d'autre que moi. Ma mère n'en parler jamais et c'est très bien comme ça. Je ne veux pas qu'Emery se mette en tête qu'elle peut creuser sur ce chemin. Ce n'est pas parce que nous sommes ensemble que je dois lui parler de tout ce qu'il y a dans ma tête. J'ai droit à un espace privé sur lequel elle n'a pas à empiéter. Je sais qu'elle se sent fébrile quand elle pense ne pas tout savoir de moi mais il faut qu'elle accepte cette partie de ma vie que je ne veux pas lui révéler. Moi, je ne la forcerais jamais à me parler de quelque chose qu'elle veut garder secret. Elle doit se faire à cette même idée. Je ne lui dois rien concernant mon père. 

     Je ne regrette pas d'avoir coupé court à notre conversation. Ou plutôt, à notre dispute. Je devais le faire. En fait, je n'ai pas pu m'en empêcher non plus. Elle m'avait poussé à bout sans même s'en rendre compte. Ce que je regrette amèrement ce sont les mots qui sont sorti de ma bouche quand j'ai réellement commencer à dérailler. Je n'aurais pas dû être aussi dure avec elle. Seulement, je voulais vraiment lui faire comprendre qu'elle ne devait plus chercher à s'aventurer sur ce terrain-là. Ce sujet est très délicat et je ne veux pas qu'on l'aborde. Elle aurait dû le comprendre, elle qui ne veut jamais parler de sa mère. Je ne l'ai jamais contrainte par un quelconque moyen à m'en parler. Je sais qu'elle ne supporte pas d'aborder le sujet. J'aurai aimé qu'elle en fasse de même pour moi. Néanmoins, j'ai dépassé les bornes en m'en servant contre elle. Je n'aurais pas dû mêler sa mère à tout ça. Ça fait de moi un connard fini. Malheureusement, c'était plus fort que moi. J'avais envie de lui faire mal pour qu'elle me lâche enfin. 

     Toute cette oppression qu'elle a engendré en moi depuis quelques jours m'a poussé à péter un plomb. Je n'aime pas me comporter ainsi avec elle mais je n'ai pas pu retenir les élans de mon mauvais caractère. C'est pour cela que j'ai préféré partir avant de dire plus d'horreurs. J'ai eu mal quand j'ai vu la douleur dans son regard et je n'avais pas la force de la supporter en plus de la mienne. Il fallait que je m'en aille pour souffler un peu à l'écart d'elle. C'était la meilleure solution. 

THE WAY - LE MENSONGEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant