CHAPITRE CINQUANTE-SEPT

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Il est près de dix-neuf heures lorsque je quitte la grande patinoire du Rockefeller Center. Je sors d'une bonne séance de patinage d'une heure. Ma mère et Charlie sont toujours sur la glace. Main dans la main, ils serpentent entre les nombreux enfants et adultes qui ont eu la même idée que nous, c'est-à-dire, venir profiter de cette soirée enneigée pour patiner aux sons des cloches et aux lumières étincelantes de Noël.

Le décor des fêtes de fin d'année est spectaculaire à New-York. Les tours et gratte-ciels brillent de milles feux aux couleurs rouges, vertes, dorées ou argentées. L'immense sapin de Noël du Rockefeller Center trône majestueusement entre les centaines de personnes venus profiter du spectacle. Des chants de Noël retentissent un peu partout. Il y a une véritable ambiance de fête qui réchauffe le coeur de chacun.

Légèrement éreintée par l'effort, j'ai décidé de retirer mes patins pour rejoindre mon père qui sirote tranquillement un bon chocolat chaud aux abords de la patinoire. Je remets mes chaussures et tiens mes patins à la main afin de me faufiler à travers la foule. Je n'ai pas froid malgré la basse température de ce début de soirée. Ma séance sur la glace a échauffé mon corps. J'ouvre d'ailleurs mon manteau afin de profiter de l'air frais. Je porte le pull de Cam qui me tient assez chaud.

Lorsque j'atteins la table où mon père est installé, celui-ci m'adresse un sourire ridé qui n'appartient qu'à lui. Son visage est infiniment réconfortant. C'est le visage d'un père inspirant la sécurité et la bienveillance. J'aime quand il me regarde ainsi, quand il me couve de ses yeux protecteurs. J'ai la sensation de le retrouver comme avant.

-Tu n'as plus envie de patiner ? me demande-t-il alors que je prends place sur un haut tabouret en face de lui.

-Non, plus vraiment. J'en ai assez fait. Je suis fatiguée.

-Ta mère et ton frère sont encore là-bas ?

-Oui, réponds-je. Charlie est encore en pleine forme. Il voulait faire quelques tours de plus.

-D'accord. Tu veux un chocolat chaud ?

Il me présente le plateau sur lequel il y a trois gobelets fumants.

-J'en ai pris pour vous trois au cas où.

-Merci.

Je saisis l'un des gobelets et trempe mes lèvres dans le liquide brun. Le chocolat sent incroyablement bon. J'en vois quelques gorgées chaudes qui m'inspirent le réconfort d'un soir d'hiver au coin du feu.

-C'était une sacré journée, dit mon père.

-Oui, en effet. Je commence à avoir sérieusement mal aux pieds.

-Ce n'est pas étonnant. On a dû faire une bonne vingtaine de kilomètres aujourd'hui.

-Time Square fait toujours cet effet-là. On piétine pendant des heures et, en un rien de temps, on a déjà fait dix kilomètres.

-Au moins, on aurait aucun soucis pour s'endormir ce soir.

-Oui.

Ou pas.

Ma dernière nuit s'est encore une fois soldée par une longue insomnie de plusieurs heures. Je ne sais pas comment faire pour retrouver le sommeil. Pour l'instant, je me contente de survivre en dormant quelques heures par nuit. J'essaie d'économiser mes forces au mieux mais ce n'est pas avec une journée comme celle que nous venons de passer que je vais y arriver. Je suis épuisée au plus haut point.

Nous sommes partis tôt pour une grande balade à Central Park ce matin. Charlie et moi avons redécouvert avec plaisir notre endroit préféré de la ville. Mon frère a heureusement pu revoir les écureuils qu'il aime tant et qui ont élu domicile là-bas. Maman nous a prit en photo et a même traîné mon père devant l'objectif. Nous avons eu l'air d'une vraie famille le temps d'un instant.

THE WAY - LE MENSONGEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant