CHAPITRE CINQUANTE-HUIT

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CAMERON


-Je t'aime. Rappelle-moi.

Bon sang, ça me retourne littéralement l'estomac de l'entendre pleurer. Ses sanglots étouffés et sa voix usée me font l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Je déteste savoir qu'elle souffre. Elle a mal et c'est à cause de moi. Mon absence l'a torture. Je l'ai entendu, je l'ai senti. Sa douleur est aussi puissante que la mienne.

Malgré tout, je suis parti pour elle, pour qu'elle puisse m'oublier et peut-être passer à autre chose. Je lui ai fait du mal, je ne peux pas revenir. J'en ai pourtant tellement envie. Je ne peux pas me permettre de flancher. Je suis persuadé qu'elle sera bien mieux sans moi. Je ne la mérite pas. Elle devrait refaire sa vie. Même si elle m'aime, même si je l'aime aussi, il faut qu'elle reste loin de moi. Elle devrait être avec quelqu'un qui prend soin d'elle et qui ne la repousse pas pour lui échapper. Elle devrait être avec quelqu'un qui saurait comment l'aimer correctement. Elle devrait être avec quelqu'un qui ne représente pas un danger pour elle. Je ne suis définitivement pas cette personne.

Je l'ai compris il y a quelques jours de cela. Après notre dispute et ma altercation avec Josh, tout m'est apparu plus clair. Il fallait que je prenne une décision radicale. Alors, j'ai choisi la fuite, l'abandon. J'ai fait mes affaires et je suis parti en lui laissant seulement un mot. J'ai essayé de lui écrire une lettre pour lui dire tout ce que je ressentais mais je n'y suis pas arrivé. Je n'ai pas pu trouver les bons mots. Alors, j'ai simplement griffonné « Je suis désolé » sur un bout de mon bloc-notes de dessin et je l'ai laissé sur mon lit. Je me suis tiré sans dire à personne où j'allais.

Dans ma tête, la destination idéale était évidente. Il fallait que je rentre chez moi, mon véritable chez-moi. Je ne pouvais pas rester dans le coin. Emery ou les gars m'auraient forcément retrouvés. Il était impératif que je parte loin. Ainsi, personne ne pourrait venir me trouver. Je savais que Portland était assez éloigné de Denver et que ma grand-mère m'hébergerait sans problème. Avant que je ne puisse y réfléchir plus, j'étais déjà dans l'avion.

Depuis mon départ, je vis l'enfer. J'ai mal comme jamais je n'ai eu mal de toute ma vie. Je pense sans arrêt à elle, à ce qu'elle fait, à ce qu'elle ressent. Je passe mes nuits à réfléchir à ce que je lui ai fait et à ce qu'elle m'a fait, elle aussi. Je bois plus que je ne mange. L'alcool est toujours mon échappatoire. J'en ai besoin pour ne pas devenir dingue. Sans elle, je me sens tellement mal. C'est encore pire quand je pense qu'elle est aussi mal que moi. Je vois bien qu'elle n'arrête pas d'essayer de me joindre. Mon coeur saigne dans ma poitrine chaque fois que je vois son nom s'afficher sur l'écran de mon portable. Je ne veux pas répondre. Je sais que lui parler me ferait changer d'avis. Je craquerais obligatoirement devant elle. Elle me pousserait à la rejoindre, à oublier ma décision première. Je dois déjà me faire violence pour ne pas la rappeler et lui dire que je suis désolé et que je rentre à la maison. Il faut que je m'en tienne pourtant à mon plan de départ, c'est-à-dire, la laisser refaire sa vie sans moi.

A l'heure qu'il est, je ne sais pas à quoi vont ressembler les prochaines semaines. Je sais seulement que j'ai deux semaines devant moi pour trouver une solution. Une fois rentré à Denver, je devrais sûrement l'affronter. Il faut que j'y pense, que je réfléchisse à une stratégie pour ne pas craquer. Elle pourrait me faire changer d'avis. Je ne veux pas que cela se produise. Je veux faire les choses biens et garder en tête cette décision que je pense être la meilleure qui soit.

Pour l'instant, il faut que je me remette de cette gueule de bois phénoménale que je me paye après mes excès de la nuit. Enfin, du petit matin surtout. Je suis rentré du bar vers neuf heures trente. J'ai traîné là-bas toute la nuit à picoler et à raconter ma vie à un pochtron du coin. C'est le vague souvenir que je garde de cette nuit.

THE WAY - LE MENSONGEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant