THE WAY - LE MENSONGE

CHAPITRE CINQUANTE-DEUX

Mon coeur a terriblement besoin d'être apaisé lorsque je grimpe quatre à quatre les marches menant à l'appartement des garçons. Je fonce comme une dératée depuis que j'ai quitté la résidence. Je n'ai pas réfléchi une seule seconde. J'ai enfilé un manteau à la hâte et me suis précipitée dans le froid de Denver. J'ai conduis moins prudemment que d'habitude pour arriver jusqu'ici. J'ai tant besoin de le voir pour le prendre dans mes bras et lui montrer qu'il n'est pas seul. Je ne veux pas le mettre au courant de ce que j'ai appris mais je souhaite tout de même le réconforter. Cela me consolera peut-être moi-même.

Depuis que j'ai lu cet article concernant l'accident dans lequel Cam a perdu son père, j'éprouve une envie irrépressible de le consoler, de mettre fin à sa peine. Je ne peux même pas imaginer la violence de la scène qu'il a dû vivre. Son père est probablement mort devant ses yeux alors qu'ils étaient coincés depuis plusieurs heures dans la carcasse morte de la voiture. Les secours ne sont pas arrivés tout de suite après l'accident. Ce fait me rend folle. J'imagine tout un tas de scénarios atroces où le petit Cameron de six ans appelle son père à l'aide alors que celui-ci n'est même plus en état de répondre. Je pense au fait que la voiture a fait plusieurs tonneaux avant de finir dans un fossé enneigé. Cela a dû être terriblement brutale et perturbateur. Je n'arrive même pas à concevoir à quel point cet événement a dû le traumatiser. Je ne peux que compatir à sa douleur.

Ce jour-là, il a perdu son père, son modèle, son meilleur ami. Je veux lui montrer que je l'aime de tout mon être et qu'il peut me faire confiance pour panser ses plaies à vif. Cet accident explique finalement beaucoup de choses concernant l'homme qu'il est devenu. Je trouve qu'il ne s'en est pas si mal sorti, en fait. Cameron est un être complexe et tourmenté mais il continue de se construire. Je pense qu'il mérite d'être récompensé pour s'être relevé de cette épreuve.

Je me précipite donc vers la porte de l'appartement et l'ouvre sans même m'annoncer. J'entre comme je le ferais si c'était mon propre chez-moi. Je ne pense qu'à trouver Cameron pour lui sauter dans les bras. J'entends sa voix me parvenir depuis le salon. Aussitôt, je trouve ça étrange. Je sais que Sam et Tim sont au studio ce soir. Il devrait être seul et pourtant il parle à quelqu'un. Je suppose qu'il est au téléphone.

Je ralentis donc mon allure de peur de débarquer comme une furie et de le déranger. Je m'apprête à rentrer timidement dans le salon lorsque ses mots m'interpellent.

-Vous ne saurez rien de plus, Evy. Je vous en ai déjà trop dit.

Evy ? Ma mère ? Impossible.

Je me stoppe net et n'essaie même pas de faire un pas de plus. Je suis figée et interloquée par cette discussion improbable que je suis visiblement en train d'interrompre.

Qu'est-ce que Cameron fait au téléphone avec ma mère ?

Je suis littéralement sous le choc. Je ne pensais pas assister à une telle situation un jour. Je suis la première à éviter les appels de ma mère. Je ne vois donc pas pourquoi Cameron serait en contact avec elle. Ça n'a absolument aucun sens.

Je tends l'oreille pour en entendre plus. Je rentre dans la peau d'une espionne.

-Je crois que j'ai été assez clair, dit-il. Je ne suis pas votre indic. Je veux bien vous rassurez de temps en temps sur ce qu'il se passe mais ça s'arrête là. Je refuse d'être votre balance. J'en fais déjà trop pour vous.

Je ne sais pas ce que je dois comprendre. Ce que je suis en train d'entendre est complètement ahurissant. Je pensais que Cameron n'appréciait pas mes parents tout comme eux ne sont pas vraiment fans de lui. Bon, mise à part ma mère qui semble avoir changé son fusil d'épaule. Je pensais tout de même qu'il se satisfaisait de leurs relations inexistantes. J'ignore donc pourquoi il est en ce moment au téléphone avec elle. D'après ce que j'entends, ce n'est pas la première fois qu'ils sont en contact, d'ailleurs. Je crois comprendre qu'ils se sont appelées plus d'une fois. Je suppose qu'ils ont parlé de moi à chaque fois. Je n'aime pas ça du tout. Quelque chose se trame dans mon dos. Je ne suis pas sûre d'être en mesure de garder mon calme après ce que je viens de découvrir.