chapitre 61

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Un agent aidait Tom à enfiler une combinaison de protection. On venait de glisser le corps de Léa dans un body bag et on l’avait emmenée avec les autres victimes dans un dépôt mortuaire improvisé sur le parking du centre commercial.

- Suivez-moi ! Ordonna un agent à Tom. Le commandant Williams veut vous voir !

A l’extérieur du bâtiment régnait une véritable effervescence. Les militaires appelés en renfort évacuaient les corps et portaient secours aux rescapés. D’autres dressaient des tentes et apportaient du matériel pour sécuriser la zone.

Léa était allongée à même le sol à côté d’autres victimes.

- Allez-y ! demanda Williams

Un agent tira sur la fermeture éclair sur laquelle était clippée une étiquette avec un numéro d’identification. Williams découvrit le visage sans vie de la jeune adolescente. Comment une jeune fille d’apparence aussi fragile avait pu lui résister aussi longtemps ? Se demanda-t-il. L’intervention d’un agent le sortit de ses pensées.

- Commandant Williams, le garçon qui a éliminé la fugitive.

Williams se retourna et dévisagea Tom.

- Pourquoi avez-vous fait ça ? Demanda-t-il froidement

- Je ne sais pas, monsieur ! Répondit Tom.

- Pourquoi avez-vous pris ce risque ? Insista Williams.

- Je ne sais pas, monsieur ! Marmonna Tom en baissant la tête

Williams marqua une pause et s’approcha de Tom en lui prenant les mains.

- Vous êtes un héros, jeune homme ! Dit-il doucement. Vous avez éliminé une des plus grandes menaces qui pesait sur l’Amérique. Mais dans votre intérêt, il est préférable que tout ça reste entre nous. Vous comprenez ? Demanda-t-il en faisant pression sur ses mains.

- Oui, monsieur ! Se contenta de répondre Tom.

Williams le libéra de son étreinte et se retira.

Tom s’approcha de Léa. La vue de son visage le troubla à nouveau.

- Que va-t-elle devenir ? Demanda-il à l’agent d’une voix hésitante.

- Un hélico va la transporter à Irvine pour une autopsie. Répondit l’agent.

- Quand ?

- Il ne devrait pas tarder

- Je peux ? Demanda Tom

- Allez-y ! Répondit l’agent

Tom se pencha sur Léa et remonta la fermeture éclair du body bag. Il se releva et suivit l’agent. L’étiquette du sac mortuaire de Léa avait disparu.

Les chaînes d’information annonçaient la mort de Léa Greenberg. Les présentateurs reprenaient les termes du communiqué transmis par le FBI : La dangereuse fugitive Léa Greenberg a été interceptée et éliminée par les forces spéciales à 12H45 au centre commercial de Carridge. Le message était accompagné d’une photo du visage de Léa qui avait été prise sur place. Le communiqué ne mentionnait pas le nom de Tom Porter.

Tom s’approchait du camion militaire qui devait le conduire hors de la zone de contamination pour un « debriefing ». Deux agents l’entouraient. Tom s’arrêta un instant et se mit tousser. La toux était si violente qu’un agent le prit par le bras pour l’aider à se maintenir debout. La visière du masque de Tom était maculée de sang et l’agent comprit que Tom était à son tour infecté. Tom s’écroula sur le sol en se contorsionnant.

- Va chercher de l’aide ! Hurla l’agent à son collègue.

L’agent se pencha sur Tom qui respirait difficilement.

- Ca va aller ! Il faut tenir le coup ! Dit l’agent en lui prenant le bras.

Deux infirmiers arrivèrent et basculèrent Tom sur un brancard pour l’emmener sous une tente où agonisaient de nombreuses victimes du virus. Les médecins passaient d’un lit à un autre en prodiguant des soins qu’ils savaient inutiles. Les râles et les cris des patients faisaient échos aux jurons et aux ordres du personnel soignant. Les victimes arrivaient toujours plus nombreuses. Les équipes médicales débordées, faisaient au mieux pour gérer le chaos. Les brancardiers déposèrent Tom sur un matelas à l’entrée de la tente et reprirent aussitôt un brancard vide pour aller chercher un autre malade. Une infirmière retira le masque de protection de Tom. Le bas de son visage était couvert de sang. L’infirmière l’essuya et lui donna un comprimé que Tom avala avec un peu d’eau. Elle repartit vers autre malade qui venait d’arriver. Tom se pencha sur le côté, essuya l’intérieur de son masque et le rattacha. Il se releva furtivement et profita de la confusion pour sortir de la tente. Personne ne prêta attention à lui. Désorienté, il cherchait la zone où se trouvait Léa. Le bruit assourdissant d’un hélico qui atterrissait le fit accélérer. Tom zigzagua entre les voitures du parking et arriva sur le terre-plein où étaient alignées les victimes. Il y avait déjà 4 rangées de plusieurs dizaines de corps. Des militaires allaient et venaient dans la plus grande confusion. Un photographe faisait des clichés de chaque victime pour les envoyer en dehors de la zone de contamination où elle devait être identifiée. Il enjambait les corps, ouvrait les body bags, prenait la photo et refermait le body bag. Le travail était fastidieux. Tom se proposa de l’aider en ouvrant et en refermant les sacs mortuaires à sa place. Le photographe accepta. Tom prit un peu d’avance pour ouvrir quelques sacs et revint derrière le photographe pour les refermer. Il gardait toujours un œil sur l’emplacement du corps de Léa qui se trouvait à quelques rangées de lui. Des brancardiers venaient d’arriver, ils regardaient les étiquettes des body bag et semblaient en chercher une en particulier. Tom arracha l’étiquette d’un sac et mit à la place celle qu’il avait prise du sac de Léa. Un des brancardiers était en discussion avec un militaire en faction. L’autre passait d’un corps à l’autre pour lire les étiquettes. Tom s’approcha d’eux.

- Est-ce que je peux vous aider ? Demanda Tom d’une voix pleine d’assurance

- Nous cherchons le numéro D1010. Dit le brancardier.

- Léa Greenberg ? Questionna Tom

- Oui ! Répondit le brancardier

- C’est par ici. Tom le conduisit jusqu’au sac mortuaire.

Le brancardier vérifia l’étiquette et bascula le corps de Léa sur le brancard. Il fit signer à Tom un formulaire de décharge et lui laissa un double. Les brancardiers transportèrent le corps inconnu jusqu’à l’hélicoptère sous le regard satisfait de Tom. Le plus difficile restait à faire, il fallait qu’il sorte de la zone de sécurité. Tom s’avança vers une tente qui servait de PC de commandement. Il y entra et brandit son formulaire au premier militaire qu’il rencontra.

- J’ai besoin rapidement d’un véhicule pour transporter un corps en dehors de la zone. Ordonna-t-il

Le militaire parcouru rapidement le questionnaire.  L’en-tête lui suffisait. Il prit son talkie-walkie et fit la demande. Une jeep arriva quelques minutes après.

- Où dois-je vous conduire ? Demanda le militaire

- Nulle part ! Je n’aurai pas besoin de vous ! Répondit Tom d’un ton sans équivoque. C’est une opération confidentielle !

Il présenta le document. L’en-tête de la Sécurité Nationale fit une nouvelle fois son effet. Tom prit la place du chauffeur et démarra. Il arrêta sa Jeep devant l’alignement des corps. Sur le parking, Williams discutait avec des militaires. L’un d’entre d’eux lui montrait l’hélico qui décollait. Tom s’approchait du groupe quand Williams se retourna. Leurs regards se croisèrent furtivement. Tom baissa la tête et pivota sur ses talons. Le visage de Tom ne se révéla pas dans la mémoire de Williams qui regardait l’hélico s’envoler avec satisfaction. Tom remonta la rangée de corps et s’adressa à un brancardier pour l’aider à déplacer celui de Léa qu’ils déposèrent dans le véhicule. Il ouvrit le body bag et s’empressa de quitter la zone de contamination.

ToxiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant