Léa poussa la porte de l’église Sainte Marie de la Mer. Il n’y avait personne à cette heure matinale. Elle avança dans l’allée centrale et s’approcha de l’autel derrière lequel se trouvait un grand crucifix. Elle s’agenouilla et ferma les yeux. Elle se sentait apaisée et confiante. Tout était clair en elle maintenant. Elle était comme Joseph dans le livre de la Genèse. Joseph avait dû faire confiance à Dieu au fond d’une citerne avant d’arriver au palais. Il avait été accusé injustement, humilié, jeté en prison... et pourtant il n'avait pas oublié Dieu à qui il avait dû faire confiance en dépit des multiples souffrances qu’il subissait. Et puis, un jour, Dieu le délivra de sa prison pour le mettre dans une position de pouvoir et de prestige qui lui permit de faire le bien autour de lui. Elle savait maintenait que Dieu la mettait à l’épreuve pour qu’elle apprenne ce que signifiait « espérer en Dieu. » Une seule question la taraudait encore, elle avait toujours voulu faire le bien et elle avait été choisie pour porter le mal. Pourquoi ? Elle se le demandait chaque jour. Mais peut-être ne se posait-elle pas la bonne question ? Le virus fixé en elle était-il vraiment le mal ? Il était peut-être autre chose, une protection ou une arme pour lutter contre un autre mal. Elle rouvrit les yeux comme si elle venait d’avoir une révélation. La pensée qui venait de la traverser la saisit d’effroi. Une voix l’interpella. Léa sursauta et sa pensée s’échappa.
- Bonjour, vous êtes bien matinal jeune homme !
Léa se releva et vit le pasteur de la paroisse s’approcher d’elle.
- Pardon je devrais dire bonjour jeune femme ! Dit-il en souriant.
Léa releva son foulard sur la bouche et recula.
- Arrêtez-vous ! Ne m’approchez pas ! Lança Léa
- Vous ne craignez rien de moi ! Dit d’un ton rassurant le pasteur en continuant à s’approcher
- Je suis Léa Greenberg !
Le pasteur s’immobilisa d’un coup en entendant le nom. Léa fit un pas vers lui et cette fois, c’est le pasteur qui recula. Sur son visage, la bonne humeur avait laissé place à de l’inquiétude.
- Ecoutez-moi ! Je ne suis pas celle que vous croyez. Je ne suis pas une dangereuse terroriste. Si j’ai fait du mal, c’est parce qu’on m’avait fait du mal. Le reste, ce ne sont que des mensonges.
Elle marqua une pause. Elle attendait une forme d’approbation du pasteur qui restait impassible.
- Oui, je suis malade et très dangereuse. Mais croyez-moi, je ne veux faire de mal à personne. Ce qui m’arrive, je ne l’ai pas voulu. Je veux simplement quitter ce pays et disparaître. Révérend, j’ai besoin de votre aide.
Le silence s’imposa. Léa attendait le verdict.
- Que voulez-vous ? Reprit le pasteur
- J’ai besoin de me reposer et je repartirai à la nuit.
Le pasteur réfléchit un instant.
- Très bien ! Suivez-moi ! Se contenta-t-il de répondre.
Il la conduisit dans une annexe de la chapelle où se trouvait un dortoir pour les retraites. Il ouvrit une porte et entra dans une petite chambre avec un lit et une table.
- Ici, vous serez en sécurité. Je vais vous chercher de quoi vous restaurer. Avez-vous besoin d’autre chose ? Demanda-t-il avec bienveillance.
- Non, merci ! Se contenta de répondre Léa. Elle ne savait pas quoi répondre d’autre. Elle était troublée. Ca faisait tellement longtemps que personne ne l’avait aidée. Elle s’allongea sur le lit et ferma les yeux. Malgré sa nuit blanche, elle ne trouvait pas le sommeil. Le pasteur revint quelques instants après pour lui apporter un plateau avec des sandwiches et de l’eau. Si elle n’avait pas sommeil, elle avait faim et soif. Elle le remercia à nouveau.
- Restez ici et ne bougez pas ! Où comptez-vous aller ? demanda-t-il plein de sollicitude
- Au Mexique. Répondit Léa.
- Très bien ! Je vous conduirai à la frontière ce soir.
Léa retrouvait espoir. Elle aurait voulu le prendre dans ses bras. Elle lui sourit et le remercia une nouvelle fois. Après s’être restaurée, Léa s’allongea et s’assoupit. Elle n’entendit pas le pêne de la serrure bloquer la porte. Le pasteur Diaz sortit son téléphone portable et appela la police.
