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chapitre 32 : Monte Cassino et les étendards de la liberté

JAY

Un mois avait passé depuis qu'ils étaient partis de Naples. Un mois plus rude que jamais et même Jay qui avait l'expérience du combat, l'expérience dans ses années et années de déploiement... Même lui, commençait à sérieusement craquer. Il se surprenait même parfois à avoir peur. Non, lui, il n'avait pas le droit de mourir. Pas pour ce qu'il aviat laissé au pays. Ça lui était interdit.

Ils avaient mis deux jours pour atteindre Monte Cassino. Ils s'engouffraient en No Man's Land par petits convois, histoire de ne pas trop se faire repérer. Ce qui séparait le mur militaire de Rome à Pescara et celui établi par le Général de brigade Natoli, n'était que de l'incertitude. Il n'y avait plus d'habitants et les villes et le villages étaient fantomatiquement vidés. L'ennemi pouvait être là comme non. En tout cas, il ne valait pas mieux le découvrir d'une mauvaise façon.

Certains n'avaient pas survécu au voyage, surtout les blessés. Ils s'étaient allégés d'au moins une trentaine d'hommes, malheureusement et quinze avaient succombé dès leur arrivée.

Si l'accès à l'abbaye avait été plus que complexe, ils avaient très vite remarqué que c'était l'endroit idéal pour s'installer. La position géographique comme locale était tout à leur avantage.

Seth avait été un véritable génie.

***

Un mois. Un mois entier. Un mois à sécuriser les alentours, à déployer des peletons à des kilomètres et des kilomètres à la ronde, creuser des tranchées, établir un front... Un mois pour tout ça et pourtant aucun bruit de balles, de bombes ou de cris. Le silence était stressant. La sécurité l'était encore plus. Être en sécurité sur le No Man's Land, voilà quelque chose qui n'était absolument pas envisageable. Un piège se sentait comme la peste. D'ailleurs, alors qu'il faisait nuit noire, Jay était dehors, debout sur l'une des tourelles, appuyé sur la pierre pour regarder les paysages désolées autour de lui. La brume était épaisse et la neige glacée étincelait sous les rayons de lune. Ses yeux d'expert sillonnaient les recoins, un doigt sur la détente de son son long fusil de précision.

Mais rien. Nada.

Il soupira et s'assit sur la pierre froide dont il avait déblayé la neige, ses genoux repliés à son torse. Il refit nerveusement ses lacets déjà bien serrés quand Parker surgit derrière lui. Il n'avait pas besoin de se tourner pour savoir qui s'était.

- je viens prendre la relève, Capitaine.

- ça va aller. Je peux m'en occuper.

- allez dormir. On a pas besoin d'un taré en plus.

Jay lui tendit son majeur mais Parker se contenta d'enlever son fusil pour placer le sien. Il se leva donc, battu, et demanda, en essuyant ses mains saupoudrées de blanc.

- je croyais que tu avais tiré un trait sur le fait d'être sniper...

- je sais. Mais je peux chasser quelques lapins, non ?

Jay leva avec exaspération les sourcils vers le ciel étoilé et le laissa là, pour retourner à l'intérieur. Il suivit le petit couloir illuminé par des bougies et frissona. Parfois, il avait vraiment une frousse bleu de ces couloirs. Disons qu'il était un peu superstitieux. Jay savait qu'à sa mort, le Seigneur n'aura aucune pitié pour lui, que sa destination était plus enflammée qu'ennuagée. Mais bon. Il s'apprêtait à prendre la direction de la chapelle principale où ils avaient mis en ligne la plupart des couchettes des hommes, quand son attention se porta sur une chapelle du fond. Ayant vraiment envie d'avoir un semblant d'intimité, il s'y enfourgua et ferma à demie la porte derrière lui. Devant lui s'étendait quelques chaises de prière, un autel et plus de bougie allumées qu'on ne pouvait compter. Sur les murs étaient représentés toutes les étapes de la mort du Christ. Des fresques modernes, refaites après les ravages des Nazis et les bombardements injustifiés des Américains. Après la guerre, les Italiens avaient bien essayé de reconstruire les lieux mais... Ce ne serait jamais comme avant.