chapitre 84 : sous les décombres d'une fraternité perdue

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SHAYNE

Allongé sur un coussin peu confortable, déjà préparé, Shayne regardait la salle d'urgence de l'hôpital se remplir depuis sa chambre. Il pouvait encore entendre les bruits des sirènes dehors, accompagnés de cris qui se répercutaient à quelques mètres de lui, un fond d'alarme à bombardement tiraillant le peu que ses tympans alourdis pouvaient encore accepter.

Paralysé, ses bras étendus le long de son corps, le lieutenant-colonel reporta son attention sur le plafond au-dessus de lui.

Lorsqu'il était arrivé à l'hôpital, le matin même, pour affronter le grand jour de son opération cérébrale, un rayon de soleil avait pourtant divisé les nuages de neige. Un faible faisceau de lumière et de chaleur, qui ne prévoyait en rien l'attaque si violente de leurs voisins et ennemis. Il avait laissé les enfants en sécurité, mais même ainsi, il craignait le pire.

La peur, le doute, les mille et une questions qu'il se posaient, se bousculaient dans sa tête avec la violence d'une course de voitures.

Il se blessait, à chaque pensée. Se fissurait, au moindre mot qui ne dépassait pas la barrière de ses lèvres.

Ses mâchoires cramponnées dansaient dans la même harmonie que ses doigts rigides, accrochées à ses draps d'hôpital, lorsque les cris se firent plus forts et plus intenses.

Et malgré tout, malgré sa réaction face aux décombres dans lesquelles tombaient Dallas, face aux tibias ouverts qu'on roulait à travers la salle d'urgence, Shayne ne pensait qu'à une seule chose : son appel avec Jay.

Jay... Depuis L'Italie... Après des mois de silence radio, l'avait appelé... Et n'avait fait que confirmer ses doutes les plus profonds et ouvert un puits sans fond de remords, de rancœurs, de haine et de colère.

Avant la Troisième Guerre Mondiale, il avait une femme. La mère de son fils...

Mais Sarah n'était qu'un souvenir.

Avant la Troisième Guerre Mondiale, il avait une famille, des frères d'armes aux côtés de qui il s'était battu et qu'il aurait défendu jusqu'à son dernier soupir...

Mais ils n'étaient plus.

Avant la Troisième Guerre Mondiale, Shayne croyait qu'il avait un frère. Sa chair et son sang. Une séquelle détruite d'une famille à la lignée si emplie de larmes et de sang.

Mais Jay avait trahi. Pour la dernière fois.

Alors Shayne était paralysé. Car seul dans son lit d'hôpital, avec pour seule compagnie un anévrisme cérébral datant de la mort de Laïthan... Il sentait le poids d'un monde fébrile, s'écroulant sans arrêt sur lui avec la lourdeur du rocher de Sisyphe.

Plus de femme.

Plus de frères d'armes.

Plus de frère tout court.

Même presque plus d'espoir.

Mais avant que son esprit ne divague sur Nala ou Neil ou encore Bonnie, sa seule vraie famille restante, son œil valide capta quelque chose dans la salle d'urgence.

Du moins quelqu'un.

Dans un sursaut, il jaillit de son lit, mais grogna sous la douleur que provoqua l'aiguille qui était enfoncé dans son coude. Le lieutenant-colonel finit par abandonner sa bataille avec ses perfusions qui refusaient de le quitter et se contenta de sortir de sa chambre, ses poches à sa suite. Il manqua de peu de renverser deux brancardiers qui couraient derrière un lit avec un blessé grave, mais peu lui importait.

One Last Mission T05 ~The Wars We Fight For| ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant