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Ça fait une semaine que nous sommes ici, mais j'ai l'impression que ça fait beaucoup moins que ça. Mes épaules ont commencé à peler, mais j'ai pu me remettre à m'appuyer contre n'importe quels dossiers sans douleur. Je sors de la salle d'eau en jogging et t-shirt avant d'aller préparer ce que nous allons manger ce soir. Le binoclard est déjà allé se laver avant moi et s'occupe sur le canapé avec son téléphone.

Je commence à faire cuire lorsque l'autre adolescent m'indique que mon téléphone, que j'ai laissé sur la table basse avant d'aller me doucher, vient de vibrer. Je lui demande de regarder de quoi il s'agit et il m'indique que c'est un message de ma mère. Comme il y a quelques jours, elle m'interroge certainement sur comment je vais et notre séjour. Iagan me le confirme et m'indique qu'elle vient d'envoyer autre chose. Elle me demande également si j'ai envie de quelque chose de spécial pour mon anniversaire, me faisant soupirer.

"C'est bientôt ton anniversaire ? " Réagit aussitôt le binoclard.

Dans plus d'un mois, vers la fin du mois d'août alors que nous sommes à peine en mi-juillet. Il veut lui aussi savoir si quelque chose me ferait plaisir, mais je lui donne la même réponse que celle que je vais donner à ma mère. Je ne veux rien. Nous ne nous attardons heureusement pas beaucoup sur le sujet, mangeons puis passons la soirée devant la télé.

À plus de vingt-et-une heures trente, une coupure publicitaire interrompt le film dont les images servaient plus à éclairer la pièce plongée dans l'obscurité qu'autre chose. Nous ne bougeons pas du canapé et continuons à discuter de l'année prochaine, à indiquer qui nous aimerions retrouver dans la même classe et ceux que nous ne voudrions surtout pas avoir. L'adolescent espère qu'il sera avec le moins de membres de son ancienne bande possible, mais qu'il fera quand même tout pour continuer de rester à l'écart d'eux peu importe leur nombre. Nous désirons en tous cas tous les deux retrouver Lorelei.

"Mikahel aussi, je pense que c'est le seul de la bande qui me dérangerait pas pour pouvoir essayer de le connaître plus je pense."

Je mets plusieurs secondes à remettre un visage sur ce nom, m'attirant les moqueries de mon interlocuteur. Se souvenant que c'est aussi arrivé avec les quatre amis, il s'inquiète faussement pour ma mémoire et continue de rire doucement. Je lui réplique d'être au moins content que je me souvienne de son nom à lui.

"T'es mon Ianis préféré." Je passe mon bras derrière ses épaules avec mon sourire en coin.

Je me reçois un coup de coude et une insulte la seconde qui suit, mais ça ne m'empêche pas de ricaner. Je l'appelle cette fois me fichant gentiment de lui par le nom que lui donne sa mère, m'attirant un coussin en pleine tête.

"C'est souvent qu'elle t'appelle "Iaggy" ?

- Tout le temps."

Il me retourne la question pour le "Theody" de mon père et nous ricanons tous les deux avant de rester épaule contre épaule le temps de nous calmer. Le film vient de reprendre, mais nous ne faisons pas plus attention à l'histoire ennuyeuse que plus tôt et touchons distraitement la main de l'autre poursuivant les conversations.

Je pensais que l'ambiguïté installée dans le bar ne durerait que jusqu'au lendemain matin, mais nous accumulons depuis les comportements de ce genre. Ça s'éloigne de la relation que nous étions censés avoir, nous le savons tous les deux, mais aucun n'a encore lancé le sujet. La proximité est plus ouverte, ne provoque presque aucune gêne, il n'y a pas ce sentiment que ça devrait rester comme un secret, à la différence de quand nous étions à l'hôtel.

"On est pas comme pendant le voyage là." Je le fais remarquer à voix haute.

Le garçon aux cheveux quasiment noir éloigne sa main et se décale légèrement. Je précise aussitôt que ça ne me dérangeait pas et plaisante sur notre incapacité à suivre quelque chose qui devrait pourtant être simple. Puisque le sujet est un peu lancé, il retente pour la première fois depuis plusieurs semaines de me demander comment ça se passe avec mon géniteur. Je hausse mentalement les épaules et en profite également pour lui résumer les raisons pour lesquelles il était parti.

Derrière Les FaçadesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant