8

1.2K 94 45
                                    

Une nouvelle semaine a commencé et, n'étant plus malade, je suis donc retourné en cours. Même sans connaître les détails, ma mère sait que je n'ai pas vraiment de liens avec mes camarades, mais elle espérait tout de même que quelqu'un aurait pris mes cours pour que je puisse rattraper plus facilement. De mon côté, je préférais ne rien attendre de personne. Et je pense avoir eu raison.

Notre première heure se termine donc nous partons vers notre deuxième salle de la journée pour l'Histoire. Le trentenaire nous fait entrer, nous autorise à nous asseoir puis, une fois tout le monde paré, il poursuit la leçon.

Puisque je n'étais pas là vendredi, je laisse un côté de ma feuille blanche, bien que je doute qu'il soit complété un jour, et prends une petite partie des notes d'aujourd'hui. Environ un quart d'heure plus tard, Monsieur Sartel nous distribue des documents complétant ce qui a été dit et sur lesquels nous devons travailler en autonomie. Je commence à lire les questions quand l'adulte s'approche et commence à me parler à voix basse. Il me donne les cours de vendredi qu'il a imprimé pour moi et me demande si je suis passé à la vie scolaire.

"Non, j'y vais jamais.

- Vas-y. C'est mauvais sur les bulletins les absences non justifiées."

Il m'explique ensuite brièvement certaines parties de ce qu'il vient de me donner puis me laisse travailler tranquillement.

"Tu lui feras une pipe pendant la pause pour le remercier ? " Me questionne discrètement la frisée derrière moi.

Je me retourne avec un visage détachée et remarque son sourire de vipère ainsi que celui de sa voisine de table, qui la soutient du regard. J'affiche le mien en coin presque diabolique :

"C'est plutôt avec ton Iagan chéri que je vais aller baiser dans les chiottes à midi."

Son visage se décompose avant de laisser exprimer du dégoût devant cette réplique que je voulais lui sortir depuis un moment. Ça s'est avéré plus efficace que ce que j'avais imaginé. Je me reconcentre sur ma feuille plutôt content de moi. Ce binoclard ne m'intéresse évidemment pas. Parce que je pense à lui, je tourne la tête l'air de rien vers l'endroit où il est assis, dans le milieu de la salle.

Ses cheveux sont toujours aussi ébouriffés, il a le menton caché dans le col de son sweat gris à capuche, dont le nom et le logo de la marque, quatre lettres au-dessus d'une espèce de virgule, sont imprimés sur sa manche et il fixe sa table dans le vague, l'air perdu dans ses pensées.

La pause s'annonce enfin. Je range mes affaires tandis ma camarade va vite voir le garçon aux cheveux quasiment noirs, certainement pour lui rapporter mes propos. Je me dirige vers la sortie de la pièce et tends l'oreille sur le chemin.

"T'as entendu ce que je t'ai dit ? Il veut baiser avec toi !

- Il a dû dire ça juste pour que tu la fermes." S'exprime t-il la voix morte avant de prendre son sac et d'abandonner son idiote de service sur place.

Il sort juste avant moi et, au lieu de rejoindre des garçons de la classe avec qui il traîne habituellement ou d'aller dans la cage d'escalier juste à côté pour se rendre à notre salle suivante, il slalome entre d'autres élèves en direction du côté opposé. Je le suis du regard quelques secondes puis hausse mentalement les épaules.

Mon camarade aura été noté absent tout le reste de la matinée.

J'avance dans les couloirs peu bondés avec, dans les mains, l'un des pains que je n'ai pas mangé à cause de la tartiflette déjà bien consistante. Sur le chemin, je passe devant un groupe de trois garçons en particulier. Ils m'ignorent, et je fais de même alors que nous parlions tous ensemble il y a plusieurs mois de ça.

Derrière Les FaçadesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant