Chapitre 60

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Severus fixait Harry Potter avec attention, guettant la moindre réaction. Il ne pouvait pas croire qu'il espérait de toute son âme que le garçon soit encore en vie.
Avec un détachement presque clinique, il avait noté ses pupilles réactives et une vague crispation, à peine perceptible. Il n'avait pas senti de pouls ou de respiration, mais il savait qu'il n'était pas infaillible et que les signes vitaux pouvaient être quasi imperceptibles.

Il ne savait pas à quoi s'attendre. Le bon sens aurait voulu qu'il ramène les deux adolescents survivants à Poudlard et qu'il rapatrie le corps de Potter. Mais son instinct le forçait à attendre un peu. Comme si quelque chose allait se produire.


Lorsque le jeune homme cilla — à peine un frémissement —, Severus ne réagit pas. Il crut qu'il avait cligné des yeux et qu'à force de fixer le visage de l'adolescent avec intensité il avait eu une sorte d'hallucination. Une illusion d'optique, probablement.
Mais le mouvement se reproduisit, plus franc, et il retint son souffle, estomaqué.

Il ne voulait pas crier victoire trop tôt, de crainte d'être déçu. Mais il avait envie de sourire comme un imbécile, prêt à parier que Harry foutu Potter allait encore déjouer toutes les statistiques et réaliser l'impossible.


Il posa de nouveau ses doigts sur la carotide du jeune homme, le cœur battant la chamade. Mais il ne sentit toujours rien.
Soudain, un bref battement. Ténu. Unique. Si faible qu'il crut avoir rêvé.

Le jeune homme cilla à nouveau et Pansy, accrochée à sa main, se redressa, pâle comme la mort.
— Il a serré ma main... Professeur... Harry a serré ma main !

Severus hocha la tête, sèchement, uniquement concentré sur Harry Potter. Comme s'il pouvait l'aider à revenir vers eux, comme si le quitter du regard pouvait provoquer sa fin.
Il y eut une brève respiration, sa poitrine se soulevant à peine.

Du coin de l'œil, Severus vit Drago approcher, incertain, pour s'agenouiller à leurs côtés, juste au-dessus de la tête de Harry, les yeux écarquillés. Le Serpentard marmonna soudain, furieux.
— T'avais promis Potter ! T'avais promis qu'on serait ami après tout ça.

Le professeur secoua la tête, mais ne put empêcher un petit sourire de fleurir sur ses lèvres. La tornade Potter avait frappé, bouleversant tout sur son trajet. Il sentit un nouveau battement de cœur sous ses doigts, un peu plus fort. Puis encore un.
Harry respira également une fois de plus et Pansy pleurait de soulagement en lui chuchotant quelque chose à l'oreille.

Les yeux du gamin cillèrent encore, et son cœur commença à prendre un rythme régulier pour redevenir normal en quelques secondes. Sa respiration se stabilisa, et il prit une grande inspiration soudaine en se contractant.

Pansy laissa échapper un rire heureux, soulagé, et Drago se laissa aller en arrière, en état de choc, mais ravi. Severus ne put s'empêcher de dégager le front du jeune homme en repoussant ses cheveux d'un geste affectueux, secouant la tête d'incrédulité, mais tellement soulagé qu'il soit encore en vie — même s'il ne comprenait pas comment c'était possible.

Il vit Pansy murmurer quelque chose au gamin encore une fois et il nota avec fascination la rougeur qui apparut soudain sur le visage de Harry... Il roula des yeux, refusant de demander ce qu'elle avait bien pu dire pour obtenir une telle réaction.

Severus se pencha au-dessus de lui, pour entrer dans son champ de vision et il fut soulagé de voir le jeune homme cligner des yeux pour accommoder sa vision.
— Harry ? Vous m'entendez ?

Il y eut quelques secondes interminables, puis l'infernal gamin eut un large sourire et hocha la tête avant de grimacer.
— Je vais bien, monsieur. Un peu mal à la tête.


Cette fois, l'homme ne put s'empêcher de ricaner, moqueur.
— Bien évidemment. Vous échappez à un Avada, mais vous vous plaignez du mal de tête...
Loin de se vexer, le jeune homme eut un rire amusé et il essaya de se relever. Aidé par Pansy d'un côté et Severus de l'autre, il s'assit et les regarda les uns après les autres, l'air sérieux.
— Personne n'est blessé ?

Drago grogna.
— À part toi ? Nous allons bien, Potter ! Bon sang, il fallait que tu... joues les idiots...
Harry enlaça Pansy et se frotta la tête, encore un peu perdu. Il jeta cependant un regard malicieux au Serpentard pour lui faire un clin d'œil moqueur et les trois adolescents commencèrent à se chamailler comme les enfants qu'ils étaient encore un peu.


*

Severus interpella le jeune homme qui avait tout changé par son courage et sa ténacité.
— Harry ? La guerre est bel et bien terminée grâce à vous. Vous allez probablement faire les unes des journaux pendant un long moment et être encore plus célèbre qu'avant. Petit veinard, vous allez trouver des objets à votre effigie sur le chemin de Traverse désormais.

Il ricana quand le gamin eut une grimace agacée et horrifiée en même temps. Mais Harry se reprit rapidement et se redressa légèrement en laissant échapper un léger gémissement de douleur.
— Il est mort ?
— Bel et bien mort. C'est terminé, Harry. Vous êtes libre.

Harry ferma un instant les yeux et soupira.
— Je l'ai tué ?
Severus grogna et répondit aussitôt, sans la moindre hésitation.
— Non. Moi, je l'ai tué. Le garder en vie aurait pu déclencher une nouvelle guerre.


Le maître des potions décida que ce serait la seule oraison funèbre qu'il concéderait à ce monstre, qui avait détruit tant de vies. Il ne laissa pas au Gryffondor le temps de se poser des questions ou de regretter la mort d'un homme qui vivait pour tuer, et il murmura, fixant les trois adolescents les uns après les autres.
— Il vaudrait mieux cacher à tout le monde ce qui s'est produit ici. Inutile de crier que Harry Potter a survécu une fois de plus à l'Avada. Qu'il y ait une explication logique ou non... les répercussions d'une telle annonce pourraient être désagréables pour vous, Harry. Outre l'adulation du monde magique dans son entier, le Ministère pourrait bien missionner les langues de plomb de vous étudier pour découvrir quel est votre secret.

Harry cligna des yeux, un peu perplexe. Il eut un léger sourire hésitant.
— C'est une plaisanterie ?
Severus le fixa simplement et haussa un sourcil presque moqueur.
— Dites-moi, Potter. Est-ce que j'ai l'habitude de plaisanter ?

Chantage brûlantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant