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Le silence régnait dans la pièce, Alice avait les yeux ouverts et regardait la poitrine de sa fille se soulever à chaque bouffée que la machine lui donnait. Elle n'avait pas pleuré depuis de nombreuses heures, mais le poids dans sa poitrine était permanent. Elle prit la main de sa fille dans la sienne, et la caressa doucement. Elle n'avait plus qu'elle maintenant, et elle ne devait pas se laisser abattre, elle devait survivre pour elle. La porte de la chambre s'ouvrit doucement. Alice ne prit pas la peine de relever la tête, et continua de regarder la poitrine de sa fille. Une main dans ses cheveux, lui fit fermer les yeux. Elle pouvait reconnaître le toucher de son père, mais elle resta sans bouger.

-       Je suis désolé, ma chérie, murmura-t-il en posant un baiser sur le haut de son crâne.

Un sourire triste se dessina sur ses lèvres, il regarda sa petite fille qui avait un bandage sur sa poitrine. Il n'oublierait jamais l'appel qu'il avait reçu la veille. Quand il avait appris la fusillade au Palais de Justice et que des membres de sa famille étaient touchés, il avait pris le premier train et était arrivé rapidement à Brest. Il était arrivé à temps pour soutenir sa fille dans cette douloureuse épreuve. Ils avaient attendu de longues heures avant de pouvoir avoir des nouvelles de Maena, qui heureusement avait survécu à la fusillade. La seule chance qu'elle eût, était que la balle était ressortie, et que les premiers soins avaient vite été prodigués sur elle. Jacques fit le tour du lit, et s'approcha de sa petite fille. Il caressa les cheveux de Maena, avant de poser un baiser sur son front.

-       Le docteur Michael a dit qu'elle ne devrait pas garder la machine plus de quarante-huit heures.

Alice ne bougea pas, et continua de caresser la main de sa fille. Elle ne sentait pas la force d'affronter cette réalité, cette réalité où elle avait tout perdu. Elle ne pourrait plus jamais exercer son métier, sans avoir les images de ce qu'il s'était passées, constamment dans sa tête. Elle ne pourrait plus travailler dans un tribunal, sans revivre ce jour. Elle ne put stopper ses larmes, et les laissa glisser silencieusement le long de ses joues.

-       Alice, dit Jacques doucement en s'approchant d'elle.

Il la contourna, et se mit face à elle. Elle avait toujours la tête posée sur le matelas, et la main de sa fille dans la sienne. Il se baissa légèrement et passa une main sur sa joue. Il ne la vit pas réagir à son toucher.

-       Ma chérie, il faudrait que tu te reposes.

-       Je ne peux pas, chuchota-t-elle sans lâcher sa fille du regard.

-       Très bien, mais tu as besoin de prendre une douche, et de changer de vêtements.

-       Je ne peux pas, répéta-t-elle une seconde fois.

-       Je reste avec elle, je te promets de ne pas la quitter une seule seconde. La douche est juste à côté Alice. Tu n'en as pas pour longtemps. S'il y a un problème, je t'appelle.

De longues minutes passèrent avant qu'Alice ne relève finalement la tête. Elle regarda son père, mais elle ne le voyait pas vraiment. Elle était un automate, les seules choses qui occupaient son esprit, étaient sa fille et les images de son bureau, et tout le sang par terre. Elle laissa son père la prendre dans ses bras, et ferma les yeux en laissant de nouvelles larmes silencieuses couler. Elle se décala et embrassa sa fille avant de rejoindre la salle de bain.

Alice ferma la porte derrière elle, et s'approcha du miroir. Elle passa une main sur son visage pour effacer ses larmes. Elle souffla longuement, et observa le sang sur ses mains. Elle avait perdu tellement de sang dans le bureau. Alice ne se souvenait plus vraiment de ce qu'il s'était passé, une fois l'ambulance arrivée. Il lui avait pris sa fille, qui respirait difficilement. Il lui avait dit que tout allait bien aller, et lui avait demandé si elle était blessée. Elle avait hoché négativement la tête. Une personne l'avait aidé à se lever du sol, elle avait quitté le bureau avec ce qu'il semblait être des pompiers. Elle avait jeté un dernier coup d'œil dans la pièce, et avait quitté le corps par terre. Il n'y avait plus rien à faire pour lui, quant à la seconde victime, elle était en vie d'après les ambulanciers, mais grièvement blessée.

Nouvelle vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant