Chapitre 5 : Riley

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Cela faisait près d'un mois que je stationnais chaque jour près d'un hangar, à l'écart de celui où se trouvait Roxie et que j'observais ce qui se passait à l'intérieur dans une pièce dérobée du bâtiment. Ils ne se rendaient jamais dans cette salle obscure et crasseuse. Cela avait été une opportunité en or pour moi afin d'être plus près que jamais de la femme qui m'obsédait depuis mon coma.

Chaque jour se ressemblait. Je ne pouvais que noter la progression de l'homme, aux soins de Roxie, qui se battait durement pour sortir de ses travers. Cela me permettait d'assister aux scènes qui allaient être miennes par la suite. Je ne pouvais que constater la souffrance de l'homme. J'appréhendais, par conséquent, que mon tour vienne. Cependant, j'étais prêt à tout pour elle. Mon seul but était un rapprochement. S'il fallait en passer par la même torture que cet homme, cela en serait ainsi. L'homme semblait aller de mieux en mieux. Il était plus calme depuis mon arrivée. Il dormait paisiblement depuis des heures tandis que les trois personnes présentes s'affairaient autour de lui pour surveiller ses constantes et s'assurer de ses soins. Il avait eu droit à sa première levée, trois jours plus tôt, sous surveillance, afin d'aller prendre une douche. Avant cela, c'était l'infirmier, Stephen, qui assurait sa toilette. Il avait, également, pu se rendre aux toilettes. À présent, il n'avait plus qu'à demander avant d'être sanglé à nouveau à son lit. Avant cela, le médecin, Gilbert, lui avait posé une poche où il pouvait se soulager. Savoir que j'y allais passer aussi me fit poser une main sur mon paquet avec une grimace.

Roxie s'avança jusqu'au lit et posa une main sur le front de son patient en hochant la tête vers le docteur.

- Tout va bien. Il progresse de façon spectaculaire. Je ne m'attendais pas à de tels résultats en si peu de temps.

- Il est coriace et déterminé, confirma Gilbert.

- Il m'impressionne, souriait-elle.

Le médecin souriait à son tour.

- Il s'accroche férocement à l'image de ses enfants. Ses constantes sont très bonnes, au vu des circonstances.

Stephen s'avança à son tour.

- Je vais aller chercher les repas. Je vous passe commande messieurs dames, attrapa-t-il un carnet et un stylo, mimant l'attitude d'un serveur, faisant lever les yeux au ciel de Roxie alors qu'un sourire étira sa belle bouche qui me faisait tant rêver.

- Prends-lui des tacos. C'est son plat préféré. Il le mérite. Quant à moi, je ne dirais pas non à un bon gros hamburger végétarien et une tonne de frites. Oh et, une part de tarte aux noix de pécan.

- Toujours autant d'appétit, ricana l'infirmier, ce qui lui valut un majeur levé dans sa direction.

Le serveur d'un jour rigola d'autant plus à ce geste.

- Et vous, monsieur ?

- Quelque chose de moins américain souffrant d'obésité, se moqua le médecin. J'aimerais des sushis et des sashimis.

- Tu ne veux rien pour le dessert ?

- Apporte-nous des fruits. Je crois que ça ne ferait pas de mal, à miss je-mange-comme-deux-ogres-en-gardant-ma foutue-ligne, de manger plus sainement lors de ses casse-croutes intempestifs.

- Ne soit pas jaloux, ria-t-elle.

- Arrêtez de vous disputer, les enfants et soyez sage durant mon absence, accompagna-t-il la psychiatre dans son hilarité tout en leur tournant le dos pour sortir de la bâtisse.

Lorsqu'ils se retrouvèrent seuls, ils cessèrent leurs piques et se remirent au travail sérieusement.

Roxie était une femme impliquée mais qui aimait détendre l'atmosphère par l'humour. Je l'en aimais qu'un peu plus. Drôle mais jamais au détriment de son boulot et de la santé de ses patients. Toutes ces années de traçage ne m'avaient pas permis de lui trouver un quelconque défaut. Elle était tout simplement la femme parfaite par excellence et elle était à moi. J'étais un homme chanceux. Je n'avais qu'une hâte, qu'elle s'en rende compte, elle aussi.

Notre rencontre approchait. Plus que dix-neuf jours, à patienter. Je ne pouvais m'empêcher d'imaginer la réaction de celle-ci lorsqu'elle m'aurait vu pour la première fois. Cela serait forcément un choc pour elle. Je savais que les médecins de l'hôpital n'avaient pas beaucoup d'espoir quant à mon réveil. Aussi, je pensais qu'elle non plus ne devait pas en avoir beaucoup aussi. Me pensait-elle toujours dans le coma ? ou s'était-elle renseigner à mon sujet et savait que je m'étais réveillé ? si cela avait été le cas, avait-elle cherché à en savoir plus ?

Elle s'éloigna du centre de la pièce pour aller s'asseoir à la table, qui prônait plus loin, en soupirant et se passant une main sur le visage. Stephen la rejoignit.

- Ça va ?

- Ouais, je suis juste un peu fatiguée.

- Tu devrais faire une pause, Rox.

- Je sais. J'irais faire un petit somme après manger. Il va bien mieux.

Le médecin agréa à sa décision avant de se lever pour préparer deux cafés. Il revient à elle en lui tendant une des deux tasses.

- Merci.

Elle avala une gorgée du breuvage puis reposa la tasse sur la table en grimaçant.

- C'est fou que l'on apporte ici du matériel à plusieurs milliers de dollars mais qu'on ne soit pas foutu de ramener une machine à café décente.

- Parfaitement d'accord.

Roxie repoussa son mug, croisa les bras sur la table et laissa reposer sa tête sur ceux-ci. Gilbert passa une main dans ses cheveux, qu'il caressa tendrement. Mes mâchoires se verrouillèrent sous l'impulsion de jalousie qui me pris à la gorge. Je savais qu'il n'avait aucune attente envers elle mais cela n'empêchait pas l'horreur des visions de son corps brûler jusqu'aux os me parvenir. Je n'aimais clairement pas les gestes affectueux qu'il avait envers Roxie. Cela me revenait. Il n'y avait que moi qui pouvais me le permettre mais voilà, je ne faisais pas encore partie de sa vie et je devais me résoudre à assister, impuissant, à l'affection des autres hommes envers elle. Cela était parfois si insupportable qu'il me fallait toute ma maitrise pour ne pas sortir de mon anonymat afin de punir ces personnes qui se permettaient de prendre ma place durant un instant. Je n'avais qu'une envie, à cet instant... lui couper cette foutue main afin qu'il la lâche. Je serrais les poings et me contraignais à la patience. Encore et toujours cette putain d'attente. Plus le temps passait, plus cela était réellement difficile de me réfréner. À mes yeux, il n'y avait qu'elle. Savoir que cela n'était plus le cas pour elle, laissait des marques sur mon esprit, si bien que fut un temps, j'avais ressenti de la colère envers elle. Cependant, cela m'était, rapidement, passé. Je ne pouvais lui en vouloir de poursuivre sa vie alors qu'elle me pensait, sûrement, toujours endormi. Elle devait penser qu'elle n'aurait pu avoir aucune chance avec moi étant donné ma situation. Il lui faudrait, certainement, un peu de temps pour retrouver ce lien entre nous lorsque je réapparaîtrais subitement. J'étais prêt à lui accorder cela.

Je comptais bien y aller en douceur avec elle. Je ne pouvais pas débarquer en imposant mon amour pour elle. Cela lui demanderait, sans doute, quelques ajustements mentaux au vu de la situation nouvelle. Elle aurait besoin de faire le point sur ses sentiments durant un temps. Néanmoins, ma patience aurait, à un moment donné, ses limites.

Je réclamerais, à un moment donné, ce qui me revenait. Elle devrait comprendre qu'elle était MA femme. De gré ou de force !

The spicy benefactress~Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant