8. La mise à plat

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[Narration : Lucie]

« Manquait plus que ça... soupira Takeo en claquant sa chopine sur la table située dans un angle du Black Stone. 

Il se leva avec rudesse et déclara qu'il allait faire un tour dehors pour s'aérer l'esprit.

— C'est tout ce que t'as à dire ? » grimaça Kensei.

Takeo fronça les sourcils en secouant la tête d'un air vain.

Les grandes figures des quatrièmes années étaient toutes présentes pour cette réunion exceptionnelle en semaine : Takeo, Kensei, Minoru, Ryôta, Nino, Mika, Tennoji, Jotaro, Daiki et à présent Jun. J'étais assise entre ces deux derniers, recroquevillée sur mon verre auquel je n'avais pas touché.

Depuis deux jours, Kensei dormait chez moi. Je n'avais pu tenir seule dans mon appartement plus d'une nuit. Le lendemain de la rencontre avec le clan yakuza, Kensei était arrivé devant ma porte avec un canif replié dans chaque poche de son pantalon.

Une main passée autour du dossier de sa chaise, il proféra d'un ton sec :

« S'ils avaient voulu passer à l'acte ils n'auraient pas hésité.

J'eus plutôt l'impression qu'il tentait de se rassurer. Kensei avala une gorgée et fit la moue comme s'il voulait tout recracher :

— Pas un seul instant, crut-il bon d'ajouter.

Un mauvais frisson parcourut mon corps. Je ne sentis que trop bien la véracité de ces propos.

Minoru m'adressa un regard inquiet et articula doucement à mon attention :

— Tu ne les verras plus jamais.

Il insista sur ces deux derniers mots.

— Je ne les verrai plus jamais, répétai-je pour essayer de m'auto-convaincre.

— Ils ont voulu te faire peur. C'est tout. Ça leur faisait vraiment plaisir...

J'inclinai la tête sur le côté. Minoru poursuivit d'un ton réconfortant à peine trahi par les contusions marquant son visage rouge et violet :

— Avant toute chose, les yakuzas sont convaincus que tu n'as pas de liens directs dans cette histoire, que tu ne joues aucun rôle. Nous terroriser était aussi l'occasion de se sentir puissant face à une petite souris apeurée. Et puis t'es une étrangère : ils cuirassent leur réputation.

— Elle n'est pas déjà suffisamment établie ? rétorquai-je, amère.

Les avant-bras posés sur la table, le dos courbé, Minoru secoua lentement la main d'un air fatigué.

— Depuis quelques années, les gouvernements exercent une lutte sans pitié contre les organisations criminelles. En plus, les yakuzas sont sérieusement concurrencés par les mafias chinoises et coréennes. Et eux sont plus cruels que les Japonais. Ils ne laissent rien passer et gagnent du terrain partout à cause des lois qui gênent leur activité.

— Tu les défends ?

— Je fais juste un état des faits, contra-t-il.

— Et maintenant, Minoru, intervint Jotaro. Pour en revenir au sujet principal, Ryôta et toi comptez rivaliser avec Fumito sur le terrain de Nintaï ? interrogea-t-il d'un air peu convaincu.

Sous les flashs des stroboscopes du bar, Minoru et Ryôta s'entreregardèrent. L'intermittence des lumières accentuait la défiguration temporaire du visage contusionné de Minoru. L'Idol regrettait que ce soit lui qui ait écopé de tous les coups. Il prit la parole, le regard résolu :

Octopus - Tome 5 : La Pieuvre vit deux ansOù les histoires vivent. Découvrez maintenant