Impraticable

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A 5h30, Eric Cahen se réveilla. Il avait une opération à cœur ouvert de prévue à 8h, à Marseille, à l’hôpital où il exerçait. La routine. Un patient qui souffrait de problèmes cardiaques depuis des années allait pouvoir retrouver une vie normale. Ne plus avoir peur de voir son cœur lâcher à n’importe quel moment.

Eric laissa sa femme Patricia endormie dans la chambre conjugale. Se doucha dans la luxueuse salle de bains de la suite parentale. Bu un café dans sa cuisine immaculée. Izac dormait encore, évidemment. Il ne commençait pas les cours avant 8h, à dix minutes de la maison. Eric n’allumait jamais la radio le matin, ni la télé. Il profitait du calme de la journée qui n’a pas encore vraiment commencé. Il avait tout le temps d’écouter les infos pendant son heure de trajet vers l’hôpital.

Une routine bien rodée.

Il s’installa dans sa Mercedes rutilante. Celle qu’il avait achetée avec l’argent de l’assurance après que celle qu’il conduisait avant ait été volée. La gendarmerie ne l’avait jamais retrouvée. Pas plus que les voitures des autres habitants de Valparaiso qui avaient elles aussi été volées la nuit de la coupure d’électricité. 

Eric pressa le bouton de la télécommande commandant l’ouverture de la porte du garage. La lumière blanche des phares se reflétait sur la neige immaculée, vierge de toute trace de pas humain ou de pattes de chien.

Valparaiso était endormis sous un grand manteau blanc.

— Merde…

Eric soupira, il n’avait pas vraiment pris au sérieux les prévisions météo. Il lui avait paru peu probable qu’il neige suffisamment pour entraver la circulation si près de la mer. Sauf que…

Eric appuya sur la pédale du frein, plaça le levier de vitesse en position drive et se dit que le trajet allait lui prendre plus de temps que d’habitude. Tant pis si l’opération commençait avec une heure ou deux de retard. Il s’engagea au pas dans la rue. Les pneus de la voiture faisaient crisser la neige fraîche. Tout se passa bien sur les premières centaines de mètres. Les rues étaient droites et plates.

Sauf que le seul moyen de quitter le quartier de Valparaiso, perché au sommet d’une colline rocheuse était de prendre une route très pentue vers le centre-ville. En temps normal, les minots qui sortaient du lycée situé à quelques mètres plaisantaient qu’on pourrait y faire du ski s’il y avait de la neige.

Ce matin de janvier, il y avait de la neige. Eric sentit un léger frisson qui n’était pas dû au froid le parcourir. Était-ce bien raisonnable de tenter de descendre avec toute cette neige ? Il tenta les premiers mètres, senti la voiture glisser vers l’avant, enfonça la pédale de frein sans grand effet, puis le frein à main.

La voiture s’immobilisa dans la pente.

Ca sert à rien…

La route était impraticable. Eric regarda son portable. 6h du matin. Les flash infos commençaient à affluer.

Circulation difficile, dangereuse, impossible.

Eric sourit.

J’ai remarqué…

Sa jolie Mercedes était coincée au milieu de la route. S’il desserait le frein à main, elle risquait de dévaler la pente façon luge d’Izac quand il était petit pendant leurs vacances à Courchevel…

On va éviter.

Il récupéra son manteau posé sur le siège passager, son téléphone et sortit de la voiture. Ouvrit le coffre et mit le triangle de visibilité au cas où quelqu'un d’autre fasse la même erreur que lui. Puis il fit la seule chose qu’il pouvait faire dans son cas.

Mi Beau Gosse Mi Bâtard III - Jamais deux sans troisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant