Les cours de 17h à 18h furent annulés pour un motif inhabituel: coupure de courant !
Aucun lycéen ne s'en plaint. Raphaël enfourcha son scooter sous la pluie battante pour rejoindre Shira chez elle. Les autres ne s'attardèrent pas devant le lycée, sous le déluge. Il faisait nuit, les bus étaient bondés. Ceux qui habitaient à Valparaiso hâtèrent le pas dans les grandes rues vides. Côme, Alban, Izac et Waël atteignirent leurs villas respectives trempés jusqu'aux os. Et dans le noir.
Raphaël, lui se retrouva face à un problème de taille, enfin plutôt, un portail de taille. Il avait le code, mais l'électricité était coupée...
Il appela sa chère et et tendre pour lui demander ce qu'il devait faire. Dans le cas présent, l'escalade n'était pas une option.
Shira vint lui ouvrir.
Loin des problèmes de riches de Valpa', aux Olivettes, les dealers s'étaient réfugiés dans le bar à chicha, lui aussi privé d'électricité. Dans le cas contraire, ils auraient pu allumer la télé et apprendre que 80 000 foyers de la région étaient privés d'électricité. Mais ce n'était pas le cas, et surtout, ils discutaient d'un sujet autrement plus lucratif que le JT.
Les bagnoles de ces fils de putes de richards de Valpa, qui, en temps normal, étaient enfermées dans des garages toutes les nuits. Garages dont les portes étaient toutes électriques, sans exception.
Mais ce soir, si l'électricité n'était pas rétablie, les Porsches, Mercedes, Tesla, Jaguar et BMW passeraient la nuit dehors.
Une aubaine en or.
***
6h12. Eric Cahen finissait son café. Il devait être à 7h30 à Marseille, à l'hôpital. Une opération à coeur ouvert l'attendait ce mardi matin. Rien d'exceptionnel. Il était un cardiologue réputé, autant pour ses compétences que son humanité. Contrairement à beaucoup de ses confrères, il ne se prenait pas pour Dieu le Père. Il avait conscience des limites de ses compétences. Que parfois, on ne pouvait plus soigner, et qu'il fallait alors rassurer et accompagner.
Mais aujourd'hui, il pouvait soigner, et il allait le faire. Permettre à son patient de retrouver une vie quasi normale après des années à craindre de voir son coeur lâcher au moindre effort.
L'électricité était revenue vers trois heures du matin, mais la voiture d'Eric, elle s'était fait la malle.
- Et merde !
La jolie Mercedes flambant neuve avait mit les voiles...
Évidement, il n'avait pas pu l'enfermer dans le garage de sa propriété de Valparaiso, comme il le faisait tous les soirs. La porte du garage était électrique, et il avait dû se résoudre à aller se coucher en la laissant dehors. Dehors, dans les rues sombres aux lampadaires désespérément éteints.
A la faveur de la nuit, certaines voitures s'étaient volatilisées. Les plus chers, celles dont les pièces se revendent le mieux. Celles prisées des petits dealers.
La Mini Cooper de sa femme, elle, était toujours là.
Il repartit dans la maison, Patricia, sa femme, et Izac, le plus jeune de ses trois enfants, dormaient encore. Il hésita à réveiller sa femme, avant de se contenter de prendre ses clés de voiture en se disant qu'elle comprendrait. Le patient qu'il devait opérer ce matin-là attendait son opération depuis des semaines, et n'y était pour rien dans cette histoire de Mercedes volée.
***
Patrick Abitan était comfortablement installé sur son fauteuil de cuir. Son bureau était situé au quatrième et dernier étage du bâtiment qui accueillait son entreprise de cyber sécurité. Il avait entendu parlé du vol des luxueuses voitures de ses voisins. Des Mercedes, des BMW, des Lexus... Envolées au petit matin après la coupure d'électricité. Pas sa Maserati. A chaque vague de cambriolage dans le quartier, la plus luxueuse propriété, la sienne était épargée.