Le souhait du roi

Chapitre 104

J'avais pu profiter d'un moment de calme pour le repas du midi et maintenant que Geun Rye venait de le débarrasser, j'étais en pleine réflexion sur ce que j'allais faire de mon après-midi. Évidemment, la première chose qui me venait, c'était d'exercer mon don, tout dangereux soit-il. J'avais l'intime conviction que si j'arrivais à le maitriser, je pourrais faire en sorte d'obtenir les informations qui me manquaient tant.

Mais je n'étais pas vraiment sûre que le Tigre me laisserait faire. S'il se rendait compte que j'utilisais mon pouvoir, même un peu, il y avait des chances pour qu'il m'arrête tout de suite, sans même me laisser faire mes essais. Jusque-là, il m'avait toujours rattrapée in extremis mais comme la dernière tentative était un peu limite et qu'il avait bien dû comprendre que je n'avais aucune envie de renoncer à utiliser mon aptitude, je craignais qu'il ne soit un peu plus vigilant. Peut être même qu'il s'était résolu à espionner mes pensées comme la Piri pouvait le faire ?

Heureusement, cette pensée ne provoqua rien d'autre que le silence. Peut être que je m'en faisais pour rien. Puisqu'il en était ainsi, fallait-il que je fasse une offrande au Tigre sur l'autel qui lui était consacré pour détourner son attention et en guise de dédommagement pour le souci que je lui causais ? Seulement, je n'avais rien de bien intéressant à offrir. En plus, Yeo Sang s'était arrangé pour rapporter du poisson, surement pêché dans le cours d'eau du jardin vu qu'il ne s'éloignait jamais beaucoup de moi. Il l'avait fait vider et découper par les servantes pour rendre ça plus présentable et leur avait demandé de tout poser sur l'autel en mon nom. Elles avaient sans doute été surprises que je veuille mettre autant de nourriture à la fois sur l'autel mais elles n'avaient fait aucune objection. La seule chose que j'espérais, c'est qu'elles retireraient la nourriture avant qu'elle ne commence à sentir. Parce que même si la consommation de cette nourriture était spirituelle, je pensais bien que sa décomposition serait bien réelle et bon, l'autel était quand même dans ma pièce de vie.

De toute façon, je n'eus pas le loisir de m'interroger bien longtemps. Comme j'aurais dû m'en douter, Hong Sim vint m'informer que quelqu'un m'attendait à l'extérieur. Qui cela allait-il être aujourd'hui ?

Je sortis pour satisfaire ma curiosité -et parce que j'étais un peu obligée d'accueillir mes visiteurs- et vit qu'il s'agissait d'une servante. Au vu de ses vêtements, ce devait même être une servante royale. Et oui, je commençais à les reconnaitre.

Celle-ci s'était inclinée en me voyant apparaitre et semblait vouloir rester dans cette position tant que je ne prenais pas la parole. Je m'offris le luxe de lever les yeux au ciel avant toute chose. Ces foutus protocoles.

« Qu'êtes-vous venue me dire ? » demandai je de but en blanc, m'interrogeant sur qui me l'envoyait.

« La reine mère vous fait demander. » me dit elle, très formelle, en se redressant.

Je retins de justesse une grimace. Aie. Je me souvenais très bien de ma première rencontre avec elle. Cette fois aussi elle m'avait convoquée et même si au final elle avait été gentille avec moi, elle avait fait comprendre à demi-mots qu'elle n'approuvait pas l'intérêt que son fils me portait. C'était d'ailleurs pour cette raison là qu'elle avait fait en sorte de me fiancer avec le prince Seong Hwa. Je le savais pertinemment. Alors quoi, maintenant ? Elle avait découvert que son fils venait toujours me voir et qu'il projetait de répudier sa femme actuelle à mon profit ? Si c'était le cas, j'allais passer un sale quart d'heure. J'en n'en avais pas du tout envie. Mais c'était la reine mère.

« Et quand veut-elle que je vienne ? » demandai je donc, résignée.

« Maintenant si vous êtes disponible. » répondit la servante, polie. « Sa majesté souhaiterais prendre le thé avec vous. Il s'agit d'une invitation informelle. » précisa-t-elle.