Chapitre 13 - partie 3/3

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Le lendemain, des combats sont organisés dans le cours de James. Je me retrouve en binôme avec Nicolaï. Nous nous affrontons au corps à corps avec des dagues. Elles sont certes protégées par de la magie mais restent tout de même assez dangereuses pour que nous conservions l'envie de nous défendre comme il faut.

Nicolaï et moi nous faisons face en position de garde, à un mètre de distance l'un de l'autre au centre d'un cercle créé par les autres membres de notre groupe. Comme des chats prêts à se battre, nous tournons l'un autour de l'autre.

C'est lui qui attaque en premier. Vite et en visant mes côtes. Il ne l'est cependant pas assez, car j'arrive à pivoter sur mes hanches.

La lame passe au ras de ma peau.

Je reprends mes distances.

En même temps, emporté par son élan, il roule par terre et se relève tout aussi vite, avec souplesse.

Cette fois, c'est moi qui me lance.

Je feinte.

Je fais semblant de frapper du poing dans son épaule, et tente de lui asséner un coup de lame dans le ventre. Une blessure qui, en situation réelle, l'aurait tué presque sur le champ.

Raté.

Il esquive mon poing et attrape mon poignet de justesse, à un cheveu de son abdomen.

Puis il me donne un coup de genou dans le ventre.

Il n'est pas assez fort pour me jeter à terre mais l'est assez pour me rappeler un mauvais souvenir.

Maywenn.

Éloignant ce souvenir tout aussi vite qu'il m'est venu, je me reconcentre sur le combat. Ayant remarqué que j'ai été déconcentrée un instant, il a dû se sentir en confiance, prêt à gagner.

Il attaque à nouveau.

À la jugulaire.

Un coup mortel.

J'esquive son coup de la même manière que le précédent et cette fois, je l'accompagne dans sa chute.

Nous nous retrouvons à terre, lui sur le dos et moi au-dessus, bloquant ses bras contre le sol. Estimant avoir gagné le combat, je me redresse et m'écarte de lui. Je ne m'attendais pas à ce qu'il se relève pour revenir à l'assaut.

Ne s'encombrant plus de son arme et optant pour une tactique plus basique, il la laisse à terre et se lance dans une offensive de poings et de coude de plus en plus rapide. J'arrive à bloquer la plupart de ses coups ou à les éviter, mais certains m'atteignent.

Me reculant pour avoir un temps de répit, je range la dague dans la poche arrière de mon pantalon et le combat reprend, de plus en plus féroce et vif.

Au bout d'un moment, je reprends l'avantage et passe en mode attaque. Je bloque de l'avant bras un coup de poing qui était destiné à mon visage. Dans la foulée, je me baisse et passe sous son coude encore tendu. Obligée de me jeter à terre pour éviter son coup de genou, je roule derrière lui.

Je me relève précipitamment, accroupie.

Il pivote à une allure surhumaine sur ses hanches, les poings levés à hauteur de visage mais la garde légèrement trop ouverte.

Je tourne tout aussi vite que lui sur mes pointes de pied, les genoux pliés, pour me retrouver face à lui et passer sous sa garde.

Je me relève et dans le même geste j'attrape la dague toujours dans ma poche arrière, la sors et la lève si rapidement que le geste en devient flou.

La dague s'est arrêtée à un millimètre de sa gorge, la pointe aussi affilée qu'une lame de rasoir posée sous son menton, nos deux corps presque collés l'un à l'autre, pantelants. Nos visages sont, je m'en rends compte en relevant mes yeux vers les siens, aussi proches l'un de l'autre que ma lame l'est de son cou.

Le temps d'un instant, je m'imagine l'embrasser. Il dégage du bout de ses doigts une mèche collée par la sueur en travers de mon visage.

— Bravo, tu t'es bien battue, souffle-t-il, la respiration courte et chaude.

— Merci, toi aussi.

Venant de quelqu'un qui sait déjà excellemment bien se battre au corps à corps, un tel compliment me fait vraiment plaisir. Et encore plus s'il vient de lui. Réalisant ce que j'allais faire juste avant qu'il ne parle, je détourne les yeux et rougis. Nicolaï a dû le voir et deviner car il sourit, amusé, puis il s'écarte.

Pendant ce temps, les autres membres de notre groupe saluent notre performance. En rejoignant la place que nous avions quittée au début du combat, près de nos amis, je vois du coin de l'œil James qui applaudit, un sourire satisfait flottant sur les lèvres. En croisant mon regard, il hoche la tête et je lui rend un sourire.

Pendant deux heures avec Akira, l'elfe, nous avons fait un cache-cache géant dans la forêt pour nous apprendre à nous dissimuler dans la nature. Plus tard ce soir-là, je rejoins encore une fois le bureau de ma grand-mère. En entrant dans la bibliothèque, à laquelle j'ai maintenant libre accès, je la vois assise à la table, penchée sur un journal. Je remarque d'un coup d'œil que la pile de livres parcourus a largement augmentée depuis hier soir. Je ne sais pas combien de temps elle a passé ici la nuit dernière... et je ne veux même pas imaginer.

— Comment ça va, Amma ?

Elle répond évasivement « bien, bien ».

— Tu devrais aller t'aérer un peu l'esprit.

— Je termine de lire ça et j'y penserai.

N'insistant pas, je prends un grimoire et m'attable. Celui-ci parle des capacités étranges qu'ont développées certains Anges. Il y a des particularités inutiles comme pouvoir changer uniquement la couleur de ses yeux ou encore pouvoir se faire pousser un orteil – ce qui serait apparemment assez douloureux – mais d'autres sont vraiment intéressantes. Par exemple, il est connu que les magiques peuvent sentir d'instinct de quelle espèce sont les autres. Certains Anges ont autrefois pu modifier la façon dont les autres magiques les « perçoivent » en se faisant passer par exemple pour un vampire ou un humain normal. Il est également écrit qu'un Ange pouvait arrêter le temps quelques instants. Et un autre pouvait...

— C'est impossible !

La voix de ma grand-mère brise, en s'exclamant, le silence qui régnait depuis trente minutes dans la pièce ; me faisant sursauter.

— Quoi, Amma ? Qu'est ce qui est impossible ?

— Je... Il ne peut pas être en vie ! Depuis le temps, il a dû mourir !

— Qui ça ?

— Mais ça ne peut pas être aussi simple que cela ! C'est inconscient ; c'est du suicide de faire cela aussi grossièrement !

— De quoi tu parles, Amma ? Tu veux bien me répondre à la fin ?

Elle finit par lever les yeux sur moi. Une nouvelle lueur brille dans son regard ambré. Sa voix a le ton grave qu'elle prend chaque fois qu'elle m'annonce quelque chose de sérieux.

— Gwen, il y a une chance pour que tu ne sois pas le dernier Ange sur cette Terre.

Le Dernier AngeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant