Chapitre 49

12.6K 958 18
                                    

Flashback.

Enzo vient de fêter ses neuf mois, je me pose des questions sur son avenir. Lorenzo ne souhaite pas s'attarder sur cette conversation, il fuit sans arrêt. J'ai tenté par tous les moyens de le confronter à la réalité, qu'Enzo ne suivra pas sa trace, mais il balaie d'un revers de main mon  objection. Il suivra la lignée familiale. Ce n'est  fondamentalement pas ce que je souhaite pour son avenir. Il côtoie ce milieu à mon plus grand regret, j'aurais dû faire autrement.

Je frappe au bureau de Lorenzo, il est au téléphone , il me fait signe de m'asseoir. Il finit par raccrocher et pose les yeux sur moi. Notre relation n'est pas au beau fixe, on se dispute sans arrêt. Notre histoire est allée trop vite, la grossesse est venue ajouter des tensions dans notre couple.

— Il faut qu'on en parle.
— Valentina, je n'ai pas le temps pour ça.
— C'est ce que tu veux ? Qu'il tue froidement des hommes ?
— Il s'y fera. Comme je l'ai fait.
— Moi, je ne m'y ferai pas !
— Tu es trop sensible, cara.

Je quitte son bureau enragée, je suis trop sensible, je ne comprends pas son comportement. Il aurait dû aller dans mon sens. Son enfance n'a pas été des plus agréables, ce n'est pas ce qu'il devrait souhaiter pour ses enfants.
Je prépare Enzo, pour aller nous balader au centre-ville. Comme d'habitude, des dizaines d'hommes m'accompagnent. Je ne passe pas inaperçu en ville. Je suis cette femme qui ne sort jamais seule ou qui déjeune dans une terrasse vide.  Je me dirige vers des boutiques, je fais quelques achats pour Enzo. Je remets mes achats aux hommes de main.
Je suis en train d'acheter une boisson fraîche, quand on entend des coups de feux, les hommes de main, me couvrent et tentent de me mettre à l'abri. Les cris autour de nous sont assourdissants, des corps tombent au sol. Un des hommes s'effondre devant mes yeux. Je prends Enzo dans mes bras et lui bouche les oreilles. Je fuis vers une ruelle, tout va tellement vite, j'accélère le pas pour rejoindre ma voiture. Quand je me sens saisir par deux mains.

— Donne-le-moi!
Il fixe Enzo.

— Tu peux crever!
Il rit.

Il me donne un coup de poing, ma tête cogne contre le mur, le choc est violent, mes yeux se ferment.

Quand je me réveille, je suis dans un lit, un docteur aveugle avec une lampe torche. Je tourne la tête pour m'éloigner de la lumière aveuglante.

— Elle se réveille.
— Laissez-nous docteur.

Lorenzo s'assoit à mes côtés, abattu. Il n'a pas besoin d'ouvrir la bouche, tout est limpide. Ils ont pris Enzo. Un cri d'horreur se fait entendre dans la chambre. Je n'arrête pas de hurler de douleur. C'est trop douloureux, j'ai le souffle court, mon cœur explose en mille morceaux. Lorenzo me prend dans ses bras, mais je n'y trouve plus cette chaleur.

— C'est ta faute!
— Tu crois que je ne le sais pas!
— Ils vont tuer mon bébé à cause de toi. Je ne te pardonnerai jamais.

J'éclate en sanglots, il quitte la pièce anéantie.

Des jours que je ne quitte pas la chambre, je suis comme morte intérieurement. Je me réveille la nuit en hurlant le prénom de mon fils. On m'injecte plusieurs calmants pour dissiper les crises d'angoisses.
Chaque jour, j'attends qu'on me dise qu'ils ont retrouvé son petit corps. Je ne me fais plus d'illusion. Femme ou enfant, ils ne lui laisseront aucune chance, c'est l'enfant de leur ennemi.
Lorenzo a tenté de me parler, mais c'est fini, il a brisé quelque chose en moi et je ne pourrais plus lui pardonner. Je m'endors avec le visage de mon fils en tête.

Deux semaines, à vivre comme une loque, je refuse toute visite, je me laisse mourir, j'ai perdu tout espoir. On n'aura pas la consolation de l'enterrer entier, son cercueil sera vide. Je m' m'effondre à cette pensée. Une douleur lancinante envahit mon cœur. Je repense à ses rires aux éclats quand on le chatouillait. Je me relève et me dirige vers sa chambre, je m'approche de son berceau et me saisis d'une de ses peluches. Je hume son odeur, et je tombe au sol. La douleur est trop forte, je suis assailli d'images de lui. Je sens des mains me relever, Lorenzo me porte jusqu'à notre chambre, qu'il a désertée. Il dort dans une chambre d'ami. Ce n'est pas plus mal, sa présence me rebute. Il me pose sur le lit.

— On l'a retrouvé.
Je relève les yeux vers lui. Mes poumons se gonflent d'air comme une forme de renaissance.

— Est-ce qu'il est...
Mes larmes coulent.

— Non cara. Il va bien.

J'émets un râle de soulagement, suivi de pleurs de joie. Je saute dans les bras de Lorenzo. Il resserre la prise, il est tout aussi soulagé. Des jours à le voir terré  dans son bureau, pour trouver des pistes. Il a maigri, ses yeux sont cernés. Il  n'a pas fermé l'œil de la nuit depuis des jours.

— On l'a retrouvé cara.
Il pleure.

Prison HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant