La dernière pile de lettres officielles arrive dans mon bureau, situé à la toute fin de la limite de mes appartements. Je fais tourner mon poignet pour le détendre un peu.
Courage, c'est la dernière.
Rédigées par les scribes, ces lettres seront envoyés dans les habitations et les forêts recluses, à la Tour sans fin sur l'île du prisonnier et aux petits villages. Elles informeront le peuple que le sénéchal a été nommé et que le nouveau gouvernement est officiellement en place.
Je gratte encore et encore et encore le papier avec ma plume que j'ai déjà dû changé trois fois tant les pointes s'émoussent vite. Je signe une à une les lettres en prenant soin de toutes les relire pour m'assurer qu'il n'y a pas d'erreurs, comme on me l'a recommandé, même si j'ai confiance en les scribes chargés de rédiger les papiers officiels. Ils connaissent bien mieux leur métier que je connais le mien.
Je prends le temps de signer la dernière lettre en savourant d'avance le repos que je vais accorder à mon poignet. Puis, comme à chaque fois que je finis de m'occuper d'une pile, je la fais passer à Ezeckiel qui s'est installé sur une table en chêne le long d'un des murs de la pièce. Satisfaite de mon travail, je me lève pour détendre mes jambes dans le couloir.
— Où allez-vous ? demande mon sénéchal.
— Je vais demander du thé et me dégourdir les jambes. Je reviendrai quand vous aurez fini.
— Nous n'avons pas signé les lettres pour les influents.
Je le regarde, perplexe. Nous avons signé des milliers de lettres, les leurs ne sont-elles pas dedans ?
— Leurs lettres sont différentes, elles s'adressent au peuple de leur domaine. Cela nous évite d'en rédiger plus. Ils sont bloqués au château tant que nous ne les avons pas signé et comme ils sont présents depuis le couronnement, je suppose que leurs demeures commencent à leur manquer.
— Dans ce cas, pourquoi ne les avons-nous pas faites en premier ?
— Les premières lettres sont parties en direction des recoins les plus éloignés. Le temps qu'elles soient livrées, c'est le temps qu'il faudra aux influents pour rentrer chez eux. Tout le monde découvre plus ou moins sa lettre en même temps, c'est pour éviter les conflits diplomatiques inutiles.
A ce moment-là, un gobelin arrive avec une autre pile de feuilles, cette fois-ci la dernière des dernières. Dépitée, je retourne m'assoir sur mon fauteuil rouge derrière le grand bureau aux multiples tiroirs. Je découvre les nouvelles lettres personnalisées que je m'empresse de signer. L'une part pour le domaine de Pithaya, l'autre pour l'île des Orcs, une troisième pour la cité de l'air du Sud et la dernière, dans un papier différent des autres, est destiné à la crique aux étoiles pour le peuple marin. Puis je les confie à Ezeckiel qui les signe à son tour.
— M'accompagnez-vous les remettre ? me demande-t-il.
— Bien sûr.
Je me lève et étire discrètement mes chevilles. Le château est divisé en plusieurs parties. Il y a les salles importantes, comme la salle du Conseil ou la salle du trône. Puis il y a les salles de travail, comme la bibliothèque, le laboratoire d'alchimie et les bureaux. Il y a bien sûr une quantité étonnante de salons et de verrières pour discuter ou se prélasser quand l'envie nous prend. Mais il y a aussi un nombre incalculable de chambres et d'appartements pour loger les gardiens, les Influents lorsqu'ils se déplacent pour le Conseil et les servants qui travaillent jour et nuit dans l'ombre pour maintenir le château en bon état et s'assurer du bien-être de tous.
C'est à cet étage rempli de logements luxueux que nous nous aventurons jusqu'aux appartements des Influents. La première personne à qui nous confions sa lettre est le seigneur Fangir de l'île des orcs. Ezeckiel frappe à la porte en nous annonçant.
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Le secret des reines de Diopelfe
FantasiAurore n'a pour souvenir que son nom lorsqu'elle se réveille dans le royaume de Diopelfe où on la couronne reine. Alors que le peuple réclame le retour de la magie, presque complètement disparue depuis la crise magique, le mystère des reines plane...