Chapitre 30

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Mon corps est engourdis. Je suis allongée sur quelque chose de dur et froid, mais une douce chaleur enveloppe ma nuque et ma tête. Peu à peu, je me sens revenir à moi.

— Votre Majesté !

J'ouvre doucement les yeux. Le visage soucieux d'Ezeckiel est penché sur moi. Je n'avais jamais vu autant d'inquiétude dans son regard.

— Est-ce que tout va bien ?

— Je crois, oui... je réponds en quittant ses cuisses.

J'ai encore un peu la tête qui tourne. Je m'oriente vers le tableau de la reine Imelda depuis le sol. Comment ai-je pu l'oublier s'il s'agit bel et bien d'un souvenir ? Elle était si belle, si forte, si généreuse. Et nous étions... si proches.

Je me relève en titubant, accompagnée par les bras du sénéchal qui ne restent pas loin pour me rattraper si je tombe.

— Il va falloir que je réessaye, dis-je en m'approchant d'un autre tableau.

— Que se passe-t-il ? Je ne comprends rien.

— Je crois... Je crois que j'ai eu une vie avant de naître à Diopelfe, je lui réponds la voix tremblante. Je crois que j'ai un passé et que je suis bien plus liée aux reines que tout le monde le pense. J'ai grandi avec la reine Imelda, j'ai connu Marie-Louise et toutes les autres, les reines du passé et celles qui ne sont pas encore apparues. Sénéchal, je crois qu'il y a quelque chose de bien plus grand derrière nous. Nous ne faisons pas qu'apparaître, vivre et disparaître. Non, Je suis certaine que nous avons eu une vie avant Diopelfe. J'ai besoin de comprendre.

— C'est pour cela que vous cherchiez un temple ? Valerian m'en a parlé.

— Oui, il y a un temple quelque part avec un immense cristal, un cristal de vie. Je dois le protéger mais je ne sais pas où il est et personne ne voit de quoi je parle. J'ai l'impression d'être complètement folle...

— Moi je vous crois, répond Ezeckiel le plus sérieusement du monde. Que voulez-vous faire ?

— Je vais essayer de toucher d'autres objets pour voir si je retourne dans cet autre monde.

Il hoche la tête.

— J'ai confiance en vous, j'ajoute. Empêchez-moi de me cogner la tête si je tombe, je ne voudrais pas la perdre définitivement.

Le sénéchal se place derrière moi tandis que je m'approche, déterminée à découvrir la réalité, de la bague en saphir d'Élise Floconbleu. Pendant une fraction de seconde, j'hésite. Mais hésiter ne fera que retarder l'inévitable. Je touche la pierre du bout des doigts et voilà que le flash lumineux m'entoure de nouveau.

Plongée dans mon autre monde, je me retrouve cachée dans un buisson avec d'autres enfants qui doivent avoir à peu près mon âge. A vrai dire, je ne sais pas vraiment à quoi je ressemble dans ce monde. Je suppose que je suis moi, plus jeune. J'ai des petites mains, des petits pieds, des cheveux bouclés parsemés de brindilles, de la terre sur les genoux... Je reconnais les visages encore enfantins de quelques reines présentent sur les tableau, en âge de gouverner un reinaume.

Je vois la jeune Élise entre les branchages, avec ses yeux bleus comme la glace et ses cheveux noirs comme la tourmaline. Elle est assise sur une balançoire suspendue à une branche d'arbre au bord d'une rivière, un livre à la main. Ses pieds fouettent l'herbe à mesure qu'elle se balance.

— Chut, chut ! Le voilà ! s'exclame une petite fille à côté de moi.

Les quatre enfants avec moi pouffent en chahutant pour tenter de rester discrètes mais le regard dur et froid d'Élise qui se tourne dans notre direction nous fait taire. Heureusement, elle ne semble pas nous avoir vu.

Le secret des reines de DiopelfeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant