Le secret des reines de Diopelfe

Chapitre 13

— Vous avez fouillé toute l'île ? les combles de la tour ? les souterrains ? Les navires ont-ils été inspectés ?

— Oui, monsieur, répond le messager en tremblant.

— Comment ont-ils pu laisser ça arriver ?! Elle est censée être enchainée dans des mailles ensorcelées !

Ezeckiel est complètement hors de lui. Il fait les cents pas dans le couloir et passe ses mains dans ses cheveux, griffant ses paumes avec les petites cornes de chaque côté de son front.

Mayela Houdini, ce nom n'annonce rien de bon. J'ignorais même qu'elle était toujours en vie et enfermée dans la prison. J'espère qu'il ne s'agit que d'une fausse alerte et qu'elle est toujours emprisonnée, sinon, j'ai bien peur que le reinaume court un grave danger.

— Il faut réunir le Conseil d'urgence, votre Majesté.

Sans attendre plus, j'ordonne au messager d'envoyer des missives aux Influents et de regrouper les chefs de garde. Il s'exécute et court à toute allure dans les couloirs.

Un frisson glacé traverse mon dos et fige mon corps. Mayela a monté les faeries les uns contre les autres et ensorcelé les fonds marins pour qu'ils se soulèvent contre la terre afin de tenter de renverser la reine Imelda et mettre fin à son règne. Sa magie est inégalable, il n'y a pas plus puissante qu'elle dans tout le reinaume. Si la reine ne l'avait pas arrêté, elle aurait pris le contrôle de Diopelfe et qui sait ce qui aurait pu se produire.

J'espère qu'il ne s'agit que d'un pur malentendu entre les gardiens, mais j'ai bien peur que ce genre d'alerte soit à prendre au sérieux immédiatement. Je réalise qu'il n'y a sans doute pas à chercher plus loin pour comprendre l'explosion de la magie à travers le reinaume. Elle s'est évadée, c'est une fatalité à laquelle nous ne pouvons pas échapper. Nous sommes sûrement tous en danger, villageois comme châtelains.

Les Influents arrivent aussi vite que le trajet leur permet. J'entends les sabots des chevaux marteler le sol et les roues des carrosses déraper dans la boue causée par l'agitation et la rosée du matin. Sans se soucier de leur moyen de transport, ils confient leurs chevaux et leurs carrosses aux écuyers à bout de bras et filent dans le palais en direction de la salle du Conseil. Il n'est pas difficile de comprendre que l'heure est grave en voyant les mines décomposées et inquiètes des personnes qui m'entourent.

— Comment ont-ils pu laisser ça arriver ? s'exclame Fangir de l'île des Orcs en frappant ses immenses mains vertes sur la table en forme de croissant de Lune.

— Mes soldats sont vingt-quatre heures sur vingt-quatre en train de garder la cellule. Il est impossible qu'elle ait filé sous leur nez, se défend Valerian.

— N'a-t-elle pas pu ensorceler l'un d'eux lorsqu'elle se faisait nourrir ou changer ?

La peau verte de Florifer est brunie par l'angoisse, comme une plante à laquelle on a coupé la lumière, et la couronne en pétales de fleurs rose sur son front semble se flétrir peu à peu et perdre de son éclat.

— Impossible, les chaines sont ensorcelées, ses mains clouées dans des moufles en fer empêchant toute magie et ses yeux sont camouflés par un linceul noir.

— Quand a été faite la dernière vérification des enchantements ? demande Mirelty.

— Il y a tout juste deux semaines et tout était parfait, assure la femme lapin.

— Allons, calmons-nous, tempère Dashalric. Nous ne sommes même pas encore certains qu'elle se soit volatilisée. Attendons le retour des messagers.

— Nous ne jouons pas au chat et à la souris. C'est d'une traque humaine dont il s'agit, répond Fangir.