Chapitre 42

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De retour à la réalité, le calme du monde de mon village natal dans le grand royaume d'Estria n'est plus. Les soldats avec lesquels je partageais un repas un peu plus tôt sont à présent en train d'affronter leurs alliés. Ezeckiel et Valerian se battent comme des bêtes sans pour autant les blesser. Ils les coincent contre le sol avec des ficelles, nouent leurs poignets, assomment les plus violents. Mais ils ne sont pas assez nombreux pour réussir à tous les arrêter. Mayela contemple l'ampleur du massacre. Elle soupire, presque lassée du spectacle. Elle agite le poignet et tous les soldats ensorcelés se relèvent comme une armée de zombies prête à tout détruire. Sans une once d'hésitation, elle lève la main en gardant les doigts rivés vers le sol et les plantes jaillissent de la terre, venant s'enrouler autour des soldats conscients. Ils se débattent mais ils sont pris au piège. Son armée zombifiée vient les entourer et les retiennent, empêchant les lianes de céder.

— Relâchez-les, j'ordonne.

— Patience, ils ne craignent rien comme ça. Il n'y aura aucun blessé. Nous pouvons poursuivre à présent.

Ezeckiel attrape la lame cachée dans sa botte tout juste avant de se faire plaquer au sol par les lianes de Mayela et les tranche d'un coup sec. La sorcière grogne et le relève à l'aide de ses lianes. Mais avant de lui tourner le dos, elle repère sa main empoigner l'argent de son épais collier. Elle claque de la langue et le tire vers nous avec ses plantes.

— Si tu viens avec nous il n'y aura pas de problèmes et je les relâcherai vite.

Le sénéchal grogne mais il ne cherche pas à tenter plus pour le moment. C'est la première fois que je le vois se faire malmener de la sorte. C'est ce qui m'inquiète le plus.

— Comment allez-vous ? demande-t-il à mon oreille lorsqu'il arrive à ma hauteur.

— Ca va, je n'ai rien pour l'instant.

— A-t-elle répondu à vos questions ? Que vous a-t-elle montré ? Nous vous avons vu disparaître quelques minutes, je pense qu'elle arrive à gérer de plus en plus d'illusion à la fois.

— J'ai l'impression d'en avoir bien plus qu'à mon arrivée...

— Pas de messes basses, nous coupe-t-elle.

Elle jette un dernier coup d'œil derrière elle aux soldats qu'elle paralyse sans aucun effort, puis d'un geste de main, nous voilà de retour au Grand Royaume d'Estria. Cette fois-ci Ezeckiel est avec nous. Ses yeux se déplacent furtivement sans que sa tête ne tourne. Il analyse tout ce qui se trouve autour de lui en vitesse avant de se concentrer à nouveau sur nous.

Le village est rempli de faeries, ce qui me paraît presque étrange car Mayela m'a parlé d'une extinction proche. Pourtant, ils cohabitent avec les gardiennes et pour la première fois, je vois des hommes entre les maisons, sans qu'il n'y ait d'animosité ou quoi que ce soit d'autre. Ezeckiel fronce les sourcils. Il ne semble pas très à l'aise avec ce qu'il voit, mais il ne dit rien pour le moment.

— Depuis plusieurs années à ce moment-là, les faeries et les gardiennes travaillent ensemble à l'entretient du cristal de vie et du village, à la suite du mariage de Marie-Louise et Hélmédos. Les gardiennes les protègent des agents du royaume et eux leur apportent la magie.

Je repère alors une petite fée, semblable à celles de la forêt morne, agiter quelques poussières brillantes au-dessus d'enfants passionnés par cette magie dont ils ignorent tout. Quelques hommes aussi ont rejoint le village, les maris, les amants et les pères des gardiennes et des futures gardiennes, alors que jusqu'à présent, je n'en avait croisé que très peu. C'est comme si le village, autrefois réservé aux femmes qui entretiennent le cristal de vie, s'ouvrait un peu plus au monde au fil du temps.

Le secret des reines de DiopelfeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant